Le château d'Écouen, chez le connétable Anne de Montmorency
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Quand : 1493 - 1567
En deux mots !
Il a fait construire le château d’Écouen, chef-d’œuvre Renaissance aux portes de Paris.
Grand ami du roi François Ier, tombé en disgrâce, il a été l'un des grands personnages de son règne, issu d’une des plus illustres familles de France : sa charge de connétable le rend le chef suprême de l’armée royale !
Devenu duc en 1551, il est l’un des plus riches seigneurs fonciers, possédant pas moins de 600 fiefs, 130 châteaux, terres et seigneuries. Dont Écouen !
Une illustre famille !
Par son père Guillaume, Anne fait partie des Montmorency, grande famille française apparentée à la famille royale. Ils tiennent leur nom de la ville éponyme actuelle, située non loin d’Écouen.
Le grand-père paternel d’Anne n’est autre que ce Jean de Montmorency, dont le fils Jean de Nivelle, après une sombre histoire d’héritage, a donné naissance à une célèbre expression !
Anne de Montmorency, par sa mère Anne Pot, descend du célèbre seigneur bourguignon Philippe Pot, seigneur de La Rochepot, puissant diplomate et grand sénéchal de Bourgogne au service des fastueux ducs de Bourgogne : on le connaît pour son célèbre tombeau, aujourd’hui au musée du Louvre.
Château d'Écouen | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA
Un prénom mixte
Son prénom est épicène : c’est-à-dire qu’il peut être à la fois porté par un homme comme par une femme.
À l’époque, Anne est la version féminine, tandis qu’Anné ou Annet est son pendant masculin.
Notre futur connétable, né en 1493, tient son prénom de sa marraine... la reine Anne de Bretagne !
On reste en famille !
Sa grande amitié avec le roi, Anne de Montmorency la doit à une enfance passée à la cour au château d’Amboise, aux côtés du futur François Ier.
Ils ont moins d’un an d’écart, en réalité ! Une grande amitié va les lier des décennies durant.
Anne fait littéralement partie de la famille royale : il devient neveu de Louise de Savoie (la mère de François Ier), et le cousin germain de ce dernier, quand il épouse Madeleine de Savoie, en 1526 !
Château d'Écouen | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA
Frères d’armes
Anne de Montmorency participe aux batailles mythiques, en Italie, de Marignan, Ravenne, Bicoque.
Après cette dernière, malgré la défaite des Français, il est nommé maréchal de France, pour sa bravoure.
À Pavie, en 1525, l’ennemi le fait capturer avec le roi : les deux sont envoyés en prison en Espagne.
Connétable, chef suprême des armées
En 1526, le roi nomme Montmorency grand maître de France.
Il s’agit là d’un très important personnage de la cour, qui dirige la Maison du roi, à savoir tout son personnel : l’équivalent des sénéchaux ou chambriers.
Nommé la même année gouverneur du Languedoc, Anne accède à la charge ultime, en 1538, la plus haute du royaume de France : connétable.
À la base responsable des écuries du roi, la fonction de connétable évoluera, pour devenir commandant suprême des armées royales.
- Le tout premier connétable, d’ailleurs, en 1060, est un ancêtre d’Anne : Albéric Ier de Montmorency !
- Les plus célèbres connétables ? Bertrand du Guesclin ou Olivier de Clisson, pendant la guerre de Cent Ans !
Château d'Écouen | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA
La fin d'une amitié
« Pourquoi demandez-vous congé pour aller chez vous ? Croyez-vous que je ne suis plus votre bon seigneur ? Je ne peux trouver qu'une faute en vous , c'est que vous n'aimez pas ceux que j'aime . »
Voici ce qu’écrit François Ier à Anne de Montmorency, un jour de décembre 1540, quand celui-ci lui annonce qu’il quitte la cour.
Car Anne venait d’être disgracié par le roi... la fin d’une longue amitié de 40 ans !
Une femme s’était dressée entre les deux hommes, que voulez-vous : la favorite du roi, la duchesse d’Étampes, qui ne supportait pas Anne.
Château d'Écouen | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA
Montmorency s'exile à Écouen
Voilà donc l’heure de la disgrâce, pour notre connétable ! Zou, exil à Écouen, sur ses terres, que sa famille possède depuis l’an 1000 !
Le château actuel, il le fait reconstruire entre 1539 à 1555 par deux architectes majeurs de la Renaissance française : Jean Bullant et Jean Goujon.
Montmorency avait fait graver cette phrase tirée d’une ode d’Horace (qui en dit long sur son état d’esprit), à l’entrée du château : Aequam memento rebus in arduis servare mentem, « Souviens-toi de conserver une âme inébranlable face aux épreuves. »
Sa devise, Aplanos (invariable, sans écart), exprime la même idée !
Château d'Écouen | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA
Attention, pavés glissants !
La disgrâce aurait-elle rendu notre connétable amer et ronchon ? C'est ce que la légende semble dire...
Car il se murmure que pour ne plus voir Paris et la cour, Anne de Montmorency construit de gigantesques remblais plantés d’arbres, autour du château !
Aussi, le connétable aurait conçu la cour pavée intérieure toute glissante : à tel point qu’on devait laisser son cheval à l’entrée, pour y entrer.
Et si le roi venait, il serait obligé de mettre le pied à terre... plus bas que terre !
Mais François Ier n’est jamais venu à Écouen...
Château d'Écouen | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA
Un décor somptueux : les cheminées peintes
Des décors datant de l’époque du connétable, nous restent notamment de superbes cheminées peintes (au nombre de 12). Elles constituent un ensemble unique Renaissance !
L’une d’elle, dans les appartements du connétable, illustre la Chasse d’Ésau par Jacob, d’après l’Ancien Testament.
Un clin d’œil à l’histoire personnelle du connétable !
Jacob est le cadet de sa famille, comme Anne, qui hérite des biens de son père, à la suite de la mort de son frère aîné.
Autre petit clin d’œil : le propre père d’Anne est lui aussi fils cadet, devenu chef de sa famille après le déshéritage de ses deux demis-frères aînés.
La Chasse d'Ésau | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA
Un décor somptueux : les vitraux
Autres éléments importants du décor du château, datant de l’époque du connétable, les vitraux ornés des emblèmes de ce dernier ou de ceux de François Ier, Henri II ou son épouse Catherine de Médicis.
À l’origine, ils ornaient les fenêtres des pièces les plus importantes du château.
Oui ! Les vitraux n’étaient pas uniquement destinés aux édifices religieux, mais se retrouvaient bel et bien dans les grandes résidences seigneuriales ou les bâtiments civils, au 16e siècle.
Château d'Écouen : vitrail à la salamandre (16e s) | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA
La mort d'un vieux chef
Anne de Montmorency ne revient à la cour qu’en 1547. Il trouve le fils de François Ier, Henri II, sur le trône.
Celui-ci, en mémoire de la longue amitié qui liait Anne et François, l’appelle « mon compère. »
Le connétable reprend sa vie sur les champs de batailles, cette fois pendant les guerres de Religion. Il y trouve la mort en 1567, à l’âge de 74 ans.
À la tête de l’armée royale, à Saint-Denis, il se retrouve acculé, encerclé par les protestants. Refusant de se rendre, un coup de pistolet dans le dos a raison de lui deux jours plus tard.
Ses derniers mots ? « Croyez-vous qu’après avoir vécu près de 80 ans avec honneur, je ne sache pas mourir en un quart d’heure ? »
Château d'Écouen : appartement du connétable | ©Anecdotrip / CC-NY-NC-SA
La fin des Montmorency à Écouen
En 1632, c’est le drame !
Un des nombreux fils du connétable, Henri Ier de Montmorency, se fait décapiter pour trahison, après avoir comploté contre le roi.
La famille de Montmorency perd toutes ses terres... le château d'Écouen inclus.
Sources
- Francis Decrue. Anne de Montmorency, grand maitre et connétable de France à la cour, aux armées et au conseil du roi François Ier. 1885.
- Patrice Boussel. Guide de l'Ile-de-France mystérieuse. Éditions Tchou, 1969.
- Charles Terrasse. Le château d'Écouen. 1925.
- Château d’Écouen : musée national de la Renaissance (fascicule remis lors de la visite du château). 2022.