Petite histoire du château de Sagonne à travers 4 propriétaires

De 1542 à 1793

Le châteauLe château | ©Manfred Heyde / CC-BY-SA

Une foule de propriétaires connus !

Nous avons, dans l’ordre :

  • l’ancêtre (supposé) d’Hugues Capet et de tous les rois capétiens, Robert ;
  • le connétable de France Louis de Sancerre, compagnon d’armes et successeur de du Guesclin, les deux ayant eu le rare honneur de se faire enterrer dans la basilique Saint-Denis, aux côtés des rois ;
  • Jean Babou, seigneur de La Bourdaisière, grand-père de la célèbre Gabrielle d’Estrées, la maîtresse d’Henri IV ;
  • sans oublier, bien sûr, Jules Hardouin-Mansart, ainsi qu'une gouvernante liée à Marie-Antoinette et la famille royale, dont nous reparlons plus bas...
Le châteauLe château | ©Patrick / Flickr / CC-BY-SA

1 - La famille de Gabrielle d’Estrées : 1542-1630

Un soir de Noël 1596, Gabrielle d’Estrées passe les fêtes avec sa famille, au château de Sagonne, rapporte le livre Le Berry secret (M. Croze, M.-F. Lafond, 1990)...


C’est normal, le château appartient à sa famille, les Babou de La Bourdaisière : depuis que l’épouse de Pierre d’Amboise, compagnon d’armes de Jeanne d’Arc, elle-même héritière des Sancerre, l’a vendu en 1542 au grand-père maternel de la favorite d’Henri IV.


Une des nombreuses sœurs de Gabrielle, Alphonsine Babou, l’une des demoiselles d’honneur de Marie de Médicis, s’appelle d’ailleurs Mlle de Sagonne. Elle laisse dans l’histoire l’image d’une jeune fille trèèès scandaleuse ! Tallemant des Réaux rapporte dans ses Historiettes :

« Le baron de Termes était de fort amoureuse manière. Rien ne fit tant de bruit que la galanterie d’une fille de la Reine-mère, nommée Sagonne. Il alla familièrement coucher avec elle dans le Louvre. La gouvernante fit du bruit, il sauta par la fenêtre, mais il laissa son pourpoint. La demoiselle fut chassée et lui exilé. »

La version du mémorialiste Pierre de l’Estoile est plus colorée : Termes, « ayant été surpris, la nuit, couché en la chambre des filles de la reine, avec la Sagonne, une des filles de ladite dame, qu’il aimait, étant grosse de son fait, s’en étant sauvé tout nu et en chemise » !


En tous cas, le château n’a jamais été aussi beau, dixit la description suivante, rédigée par l'intendant du comte de Sagonne, M. de l’Aubespine, au milieu du 17e siècle :

« Le château de Sagonne est un fort beau bâtiment couvert en ardoise ; son donjon est des plus magnifiques et des plus élevés de France, dans lequel se trouve un grand escalier. Il est entouré de plusieurs grands corps de bâtiments, contenant une chapelle, les logements des seigneurs, des fermiers receveurs, domestiques, etc. Lesdits bâtiments sont flanqués de deux tours couvertes en tuiles. Un grand portail sur le devant, aux côtés duquel sont deux autres tours couvertes en ardoises. En avant sur le fossé, un pont-levis, au-delà une cour et un passage voûté simulant un fort, garnie d’une herse levée et plus à l’intérieur un grand jardin et un colombier à pied le tout entouré d’une haute muraille dont la base est baignée par l’eau des fossés à fond de cuve. »

Gabrielle d'EstréesGabrielle d'Estrées | ©Rijksmuseum / CC0

2 - Jules Hardouin-Mansart : 1699-1708

Son nom… est associé à la création de joyaux architecturaux ! Premier architecte de Louis XIV, on lui doit les châteaux de Versailles et Marly, les places Vendôme et des Victoires à Paris…


Mais là, le voilà à Sagonne. En 1699, le grand Jules Hardouin-Mansart se porte acquéreur du château de Sagonne ! Dès 1703, celui-ci fait planter un grand parc à la française, aménager une orangerie et dessiner une cour d'honneur, avant de réaménager l'intérieur du château. De somptueuses cheminées de marbre décorent les salles, des lambris et des peintures allégoriques habillent les murs.


Tout est fait pour recevoir Louis XIV, qui pouvait faire étape à Sagonne, en se rendant aux eaux thermales de Bourbon-l’Archambault !


Hardouin-Mansart fait même construire un bâtiment pour loger les mousquetaires constituant la garde du roi. Nec plus ultra, il fait installer quatre canons, pour tirer des salves en son honneur ! Tous les bâtiments de cette époque ont malheureusement disparu à la Révolution.


Quid de la visite du roi, alors ? Louis XIV n’écoute pas les conseils de son médecin, lui recommandant les eaux thermales de Bourbon… il ne fera jamais étape à Sagonne ! Hardouin-Mansart, lui, devait mourir à Marly-le-Roi à 63 ans, en 1708.

Hardouin-MansartHardouin-Mansart | ©Rijksmuseum / CC0

3 - Madame Étiquette : 1765-1769

Le château de Sagonne passe en 1765 à une descendante d’Hardouin-Mansart : Anne-Claude-Louise d’Arpajon, comtesse de Noailles. Il s’agit de la première dame d’honneur de la reine Marie Leszczynska, puis de la toute jeune Marie-Antoinette : c’est elle qui l’accueille en 1770, à la frontière avec l’Allemagne en Alsace, à l’arrivée de la dauphine en France ! Elle doit veiller à ce qu’à Versailles, elle respecte bien toutes les règles.


Marie-Antoinette ne l’aime pas beaucoup… elle la trouve trop sur son dos, ne la laissant pas faire ce qu’elle veut ! Du coup, elle la baptise Madame Étiquette ! La reine la renvoie en 1774.


La dame de Sagonne est noble, donc… elle se fait, Révolution oblige, guillotiner le 27 juin 1794, à 65 ans, sur la place du Trône, à Paris. Elle repose au cimetière parisien de Picpus.

4 - La Révolution à Sagonne : 1793

Un épisode féminin haut en couleurs a lieu à Sagonne ! On en parle dans cet article. À l'époque, ce qu'il reste du pauvre château désossé est acquis par le sieur Foubert-Rousson comme bien national.

Source

  • Recherches historiques sur la forteresse de Jouy et le château de Sagonne. In Mémoires de la Société historique, littéraire et scientifique du Cher (2e série, 3e volume). 1876.
Madame ÉtiquetteMadame Étiquette | ©Rijksmuseum / CC0