Le gisant de Louis de Sancerre à Saint-Denis
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Quand : 4 février 1402
Qui est Sancerre ?
Connétable de France, « vaillant homme et hardi chevalier durement » (Froissart), « le plus bel ornement de la chevalerie française. »
Rien que ça ! Du lourd.
Après la mort du connétable du Guesclin :
« Il défendit la Guyenne contre les Anglais, et remporte plusieurs fois sur eux d’éclatantes victoires.
« Issu d’une ancienne et illustre famille, il surpassait son compagnon d’armes en noblesse et en affabilité.
« Du reste il méprisait le faste et les vaines pompes du monde, qualité bien rare chez les gens de guerre. »
(Chronique du Religieux de Saint-Denis)
Une tombe près des rois
Le testament
Le 4 février 1402, Sancerre sent la fin proche.
Il dicte son testament et « laissait son corps à la sépulture ecclésiastique, laquelle il eut en l’Église paroissiale de Notre-Dame de Sancerre », où reposait son frère Robert.
Mais secrètement, il espère une sépulture à Saint-Denis, la nécropole des rois de France...
Hé ! En mai 1389, on y avait bien fait inhumer son frère d’armes Du Guesclin, avec une pompe jamais vue encore, pour un serviteur du roi.
Lui qui avait été fidèle à la Couronne se prenait à rêver d’un même sort…
« Accablé de vieillesse et retenu depuis longtemps dans son lit par une maladie cruelle », il « mourut au mois de février, après 60 années d’une vie glorieusement passé dans les camps. »
Vœu exaucé
Le vœu de Sancerre est exaucé !
On célèbre des funérailles hors normes, en la basilique Saint-Denis, en présence des ducs de Bourgogne et d’Orléans, d'une foultitude de barons.
Sur quoi on l’inhume dans la chapelle du roi Charles V, aussi connue sous le nom de Saint-Jean-Baptiste.

Gisant de Sancerre | ©Anecdotrip.com / CC-BY-NC-SA
Les profanations de 1793
Lors des exhumations de 1793, les révolutionnaires trouvent « sa tête encore garnie de cheveux longs, et partagés en deux grandes tresses. »
Tresses de 40 centimètres de long !
On trouve aussi un tombeau de marbre noir et un gisant de marbre blanc, avec cette plaque sur le mur :
« Ci dedans gît sous une lame Louis de Sancerre dont l’âme Soit ou repos du Paradis.
« Car moult bon proudom fut jadis, Sage, vaillant, chevaleureux, Loyal et en armes heureux. Oncque en sa vie n'aima le vice.
« Mais il garda bonne justice, Autant au grand comme au petit, En ce prenait son appétit. Maréchal fut ferme et estable, De France, puis fut connétable fait après par élection.
« En l'an de l'Incarnation Mil quatre cens et deux fina, Et le Roy voult et inclina A l'honourer tant que ciens Avec ses parents anciens Fut mis, pour ce fait bon servir Cil qu'ainsi le veult desservir A ses serviteurs à la fin Quant lui ont esté à fin. »
C'est louche !
Le gisant de Sancerre, très réaliste, serait-il affublé d’un léger strabisme ?
Tout juste ! La Chronique du religieux de Saint-Denis nous renseigne là-dessus :
« Louis de Sancerre avait les yeux de travers, sa figure était laide, mais n’avait rien de désagréable. »
C'est dit !
Tout est dans le détail !
Si vous regardez bien le gisant en détail, vous noterez que le bout du nez, les mains et la dague ont été refaits.
La dalle de marbre noire sous le gisant a disparu.
Quant au lion et aux inscriptions sur l’écu, ils ne sont probablement pas d’époque !
Sources
- Collection de documents inédits sur l'histoire de France (volume 6, n° 3). 1841.
- Fondation Eugène Piot. Statue tombale de Louis de Sancerre. Monuments et mémoires (volume 1). 1894.
- Georges d'Heilly. Extraction des cercueils royaux à Saint-Denis en 1793. 1868.
- Alexandre Lenoir. Musée des monuments français. 1801.