Rémy Belleau, un poète de la Pléiade dans les jardins Renaissance de Joinville !

De 1563 à 1566

Le châteauLe château | ©sanclaste / CC-BY-SA

Connu en son temps comme le plus beau château qui soit, le Grand-Jardin porte bien son nom, puisqu'on peut visiter les jardins Renaissance en question, reconstitués d'après documents de l'époque !

Le château des Guise

Les jardins Renaissance actuels datent de la toute fin du 20e siècle, mais le premier duc de Guise, Claude de Lorraine, les fait aménager dès le 16e siècle.

Ils se font abîmer par le passage des troupes de Charles Quint en 1544, puis remettre en état deux ans plus tard.

Oui, à l’époque Renaissance, on trouve citronniers, orangers, grenadiers à foison, parterres de buis et plantes médicinales… des fontaines traversent les allées, on a même un petit bois qui finit sur les bords de la Marne.

Un document écrit permet de nous faire une idée de ces jardins primitifs : un poème d’un membre de la Pléiade, Rémy Belleau !

C'est parti pour le voyage !

Rémy BelleauRémy Belleau | ©Catholic University of Leuven / Public domain

Belleau, un poète à Joinville

Rémy Belleau, c’est son nom... un poète de la mythique Pléiade, regroupant entre autres Pierre de Ronsard, Joachim du Bellay et Pontus du Thyard.

Il séjourne au château de Joinville entre l’été 1563 et 1566 : les Guise lui ont confié l’éducation du petit Charles d’Elbeuf, petit-fils de Claude de Lorraine.

Les seigneurs du château de Joinville sont les mécènes de Belleau, en fait !

Le grand CanalLe grand Canal | ©Aroche / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

Les jardins dans la Bergerie de Belleau

Belleau évoque le château et les jardins de Joinville dans la première partie (« journée ») de son poème La Bergerie.

Cette poésie pastorale rend hommage aux Guise, ainsi que le précise Philippe Ford dans un compte-rendu sur Belleau, paru dans Bulletin de l'Association d'étude sur l'humanisme, la réforme et la Renaissance (n°55, 2002).

Carreaux émaillés et bourgeons

Belleau commence par poser le décor : c’est l’aube, à l’heure où le soleil a chassé la « brune épaisseur de la nuit ».

« Une croupe de montagne » se dessine, sur laquelle est posée une vaste terrasse « pavée de porphyre moucheté de taches blanches, rouges, vertes et grises et de cent couleurs différentes, nettoyée par des égouts faits à gargouilles et mufles de Lyon. »

À l’une des extrémités de cette terrasse, « une galerie vitrée, lambrissée sur un plancher de carreaux émaillés de couleur » avec une façade « à grandes colonnes cannelées ».

La vue depuis cette galerie offre « montagnettes, ruisselets, rivières, fontaines, prés, châteaux, villages et bois. »

Puis les yeux du poète se posent sur la vigne, qui

« commençait à ébourrer le coton délicat de son bourgeon, allongeant entre ses feuilles tendrelettes deux petites menottes tortillées et recourbées comme deux petites cornes de limaçon. En quelques lieux se voyait le pampre verdissant qui commençait à développer ses feuilles largettes découpées, un peu jaunissantes sur les bords. »

Les jardinsLes jardins | ©sanclaste / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

Figues et pêches

Dans la Deuxième journée de La Bergerie, Rémy Belleau évoque les jardins et toutes ses essences, la liste des arbres fruitiers que l’on y trouve.

« … un jardin le plus beau et le plus accompli qu’on pourrait souhaiter, pour le comptant d’arbres fruitiers, à pépin ou à noyau, comme des pommes, poires, guignes, cerises, griottes, oranges, figues, grandes, pêches, presses, persiques, pavies (trois variétés de pêches, ndlr), perdigoines (prunes, ndlr), raisins muscat, prunes de Damas : bref, de tous les meilleurs fruits et plus exquis qu’on saurait recouvrer en notre France. »

Prunes, image d'illustrationPrunes, image d'illustration | ©Pixabay

Un vrai paradis sur terre ! Belleau évoque ensuite

« la beauté du parterre, arrosé de trois fontainettes d’eau vive qui sourd des flancs du rocher, et qui fait un canal de largeur d’une toise et demie, passant au travers de ce jardin enrichi de compartiments, entrelacs, bordures, allées, clôtures, labyrinthes, arcades… »

Sans oublier la Marne, « qui va baignant de ses ondes repliées les murailles de ce jardin »...

Sources

  • Sándor Eckhardt. Rémi Belleau, sa vie, sa Bergerie, étude historique et critique. 1969.
  • Œuvres complètes de Rémi Belleau.