Catherine de Médicis tient la conférence dite de Talcy, en juin 1562, avec les principaux chefs protestants.
Accompagnée du jeune roi Charles IX, elle tente pour la dernière fois de réconcilier catholiques et protestants.
Quoi ? Que se passe-t-il à Talcy ?
La « conférence » dite de Talcy confronte Catherine de Médicis, les seigneurs catholiques, le jeune roi Charles IX (12 ans) et les principaux chefs protestants.
Elle se tient au château de Talcy, les dimanche 28 et lundi 29 juin 1562.
Le château appartient alors à Jean Salviati, d’une famille de banquier d‘origine italienne, apparentée aux Médicis.
Le frère de la mythique Cassandre de Ronsard, le père de la célèbre Diane d’Agrippa d’Aubigné...
Ami de la reine et libéral, opposé à toute forme de guerre.
Pourquoi ? La situation
Six mois plus tôt, on avait signé l’édit de Janvier, qui autorisait les protestants à pratiquer leur culte en dehors des villes.
Le duc de Guise, sur le prétexte d’avoir vu des protestants aller au prêche en pleine ville, à Wassy, ordonne un massacre.
Il avait montré qu’il ne ferait pas respecter l’édit !
Il n’en faut pas plus pour que les deux camps s’affrontent : le début des guerres de Religion...
À plusieurs reprises, Catherine de Médicis tente de faire la paix.
Comme ici à Talcy.
Qui ? Les participants
Côté catholique, qui trouve-t-on autour de la régente Catherine de Médicis ?
- Le duc François de Guise, qui va mourir l’année suivante, assassiné, près d’Orléans.
- Jean de Montluc, évêque de Valence, le confident de la reine mère.
- Antoine de Bourbon, roi de Navarre (le père du futur Henri IV), qui a longtemps hésité entre protestantisme et catholicisme... avant de choisir ce dernier.
- On n’oublie pas non plus le jeune roi, Charles IX, 12 ans. Bon, là, il est plus occupé à jouer avec les enfants de Salviati, du même âge que lui !
Mais de l’autre côté, chez les protestants ?
- Condé. Louis Ier de Bourbon-Condé. L’oncle d’un certain futur Henri IV… un des chefs du parti protestant !
Les participants logent au château de Talcy. La reine et son fils ont leur appartement séparé.
L’armée catholique campe autour du château, dans le bourg, les prairies et les champs voisins !
Zoom sur les évènements
Round 1 : la lettre de Condé
Pendant son séjour à Talcy, Catherine reçoit une lettre signée par 16 chefs protestants, le 24 juin 1562.
Qui dit quoi ? Si les chefs catholiques s’éloignent de la cour et déposent les armes (le duc de Guise inclus bien sûr), ils obéiront à tout ce que le roi leur demandera.
Ils offrent aussi à la reine que Condé vienne la voir à Talcy pour se remettre entre ses mains, comme gage de leur bonne foi.
Catherine accepte. Elle envoie les chefs catholiques à Châteaudun et demande à Condé de venir à Talcy.
Round 2 : l’arrivée de Condé à Talcy
Comme promis, ce dimanche 28 juin, Condé arrive à Talcy depuis Beaugency, entouré de catholiques qui le mènent « comme en triomphe ».
Il trouve la reine et tous les siens dans le grand salon du château, à l’étage.
Le voilà comme seul. Terriblement vulnérable. Des amis l’ont prévenu qu’un guet-apens pouvait avoir lieu…
Mais au fait ? Catherine a-t-elle pensé à faire disparaître Condé ?
Possible !
Le dimanche au matin, en tous cas, alors qu’elle l’attend, accoudée à une fenêtre avec le roi de Navarre, dans une chambre proche des cuisines, elle entend « deux goujats » faisant rôtir une oie dans la cheminée, qui « chantaient des vilenies contre la reine. »
« L’un disait que le cardinal de Lorraine l’avait engrossée d’un petit mulet ; et maugréaient de la chienne tant elle leur faisait de maux. »
Le sang de Navarre ne fait qu'un tour : il veut les faire pendre !
La reine l’arrête : « Mon cousin, il ne faut pas que nos colères descendent là. Ce n’est pas notre gibier. »
Non… le gibier s’appelait Condé ou Coligny, diront d’autres ! Une anecdote rapportée par Salviati lui-même…
Round 3 : de Talcy à Beaugency
Condé, aux mains de l’ennemi, donc, ne laisse rien transparaître.
Il annonce à Catherine qu’il ne veut pas s’engager pour les signataires de la lettre : il lui propose qu’elle vienne avec lui à Beaugency, les rencontrer.
Le lendemain, les voilà donc sur la route qui mène à Beaugency, laissant Charles IX et Navarre à Talcy.
La situation s’est renversée, on dirait ! Voilà Catherine à son tour isolée, dans le nid protestant, à la merci de n’importe quoi. On dit les protestants armés jusqu’aux dents...
Catherine arrive après une heure et demie de route, appuyée sur un bâton, car une mauvaise chute de cheval, quelques jours plus tôt, la fait boiter.
Un loup de velours noir dissimule son visage : elle ne le quittera plus de la journée.
L’entrevue pouvait commencer…
Round 4 : les discussions
Les protestants demandent la remise en place de l’édit de Janvier.
Non, impossible, répond Catherine. Cet édit n’a plus de raison d’être, vu le ras-le-bol et l’agacement des catholiques.
On ne pouvait plus « tolérer autre exercice de religion au royaume, sinon celui de l’Église romaine. »
Il sera défendu aux protestants de faire « aucuns prêches ni administrations de sacrements. »
Les protestants s’étranglent !! La régente les fait taire. Elle leur rappelle la lettre du 24 juin, reçue à Talcy, ce qu’ils ont promis, et tout.
Elle a tenu parole, elle a éloigné les chefs catholiques à Châteaudun. Hé bien ! Qu’ils respectent eux aussi leur parole, et se soumettent !
Le rendez-vous de Beaugency a duré deux heures.
Au bout desquelles il est une chose claire, pour les protestants : ils refusent de renoncer à l’exercice de leur culte, préfèrent quitter le royaume. L’exil, voilà !
Catherine s’offusque, puis accepte. Elle autorise les protestants à l’exil pendant deux ans, jusqu’à la majorité du roi.
Round 5 : l’exil ? Tu parles !
L’entrevue finie, chacun part de son côté : Catherine retourne à Talcy, il est tard. Elle craint aussi un renversement de situation…
Condé, lui, apprend que s’il revient à Talcy, il sera arrêté. Ah oui ? Alors il quitte la France sur le champ !
Ses compagnons regrettent déjà… l’exil ?… quelle folie ! Mais comment en est-on arrivé là ?
Surtout que Condé et les siens ne comptent pas vraiment partir !
Les catholiques avaient bien menti, prétendant s’être éloignés de la cour, à Châteaudun, alors que non, tout est faux, c’est une ruse pour que la reine obtienne ce qu’elle veut des protestants !
Ils ne sont plus tenus de s’exiler, la guerre peut commencer !
Round 6 : Talcy assiégé ! Enfin... presqueundefined
Les protestants rameutent leurs troupes, faisant courir le bruit que la reine a voulu les expulser du royaume.
Survoltés, ils se décident à marcher sur le château de Talcy, de nuit. On part le 2 juillet au soir.
Sauf que la campagne, à cette époque, en pleine nuit… difficile de s’y retrouver ! On ne trouve pas le château.
Pour se rendre compte au petit matin qu’on est à Lorges… à 10 km !
Mais la reine, mise au parfum, a quitté Talcy entre-temps, avec le roi.
Guise, qui voulait une confrontation, n’a pas le temps d’amener ses troupes, Condé est reparti.
Un pauvre pasteur, Chasseboeuf, fera les frais de la rage des catholiques, attaché à la queue d’un cheval et traîné de Beaugency à Talcy.
Une victime qui ouvrait le bal fou et macabre des massacres inhumains de ce qu’on a appelé guerres de Religion.
La paix ? Oh, oui… on verra plus tard...
Source
- Edmond Stapfer. Souvenirs du XVIe siècle, le château de Talcy. In Revue chrétienne (tome 3). 1887.