1 - La fondation (romancée) du tout premier château
À l'origine, à la fin du 8e siècle, le premier seigneur de Vitré s'appelle Riwallon, compagnon d'armes du duc de Bretagne.
Voilà ce que raconte le récit (plus légendaire que véridique), sur la fondation de la première forteresse...
Un jour pendant un banquet, le seigneur d'Hennebont insulte le duc. Le sang de Riwallon, qui n'est encore que petit seigneur d'Auray, ne fait qu'un tour !
Il venge son ami, en tuant son agresseur en duel. Mais la famille du mort ne cherche qu'à se venger... Riwallon doit aller se cacher à Rennes : il ne pouvait plus revenir à Auray !
Le duc lui offre, pour le remercier, une grande terre entre Maine et Anjou : le pays de Vitré.
Riwallon y fait construire le tout premier château, aujourd'hui disparu, qui se trouvait à l’emplacement de l'actuelle église Sainte-Croix.
2 - Il reste un vestige roman de l'ancien château
Suite à la forteresse primitive édifiée par Riwallon, on vient de le voir, un 2e château en pierres voit le jour, sous l'impulsion du baron André Ier de Vitré, à la fin du 11e siècle.
Il reste... un vestige de cet ancien château !
Un porche de style roman, dans la cour d'honneur du château, qui mélange le granit roux et le schiste noir.
Ce qui en fait la partie la plus ancienne du château (1150 environ) !
3 - Une prison, puis une mairie, construites au cœur du château
La majeure partie du château de Vitré a été remaniée entre 1873 et 1904 par un disciple de Viollet-le-Duc, Denis Darcy. Après lui, l'architecte Paul Gout.
Celui-ci s'occupe, jusqu'en 1913, de construire l'actuelle mairie, dans la cour intérieure du château, à l'emplacement de l'ancienne prison.
Une prison construite au 19e siècle, désaffectée en 1902, rachetée par la ville, puis détruite.
Gout reconstruit un bâtiment d'inspiration médiévale, dans le goût de son époque : le style néo-gothique.
4 - Vitré, un puissant bastion protestant breton
Avec les familles des Rieux et Coligny, seigneurs du château entre 1547 et 1605, Vitré abrite le culte protestant et devient pendant quelques années un solide bastion protestant, en Bretagne.
Voilà pourquoi l'on trouve une chaire protestante (16e siècle), à l'extérieur de l'église Notre-Dame de Vitré !
Mais tout commence avec la conversion de Renée de Rieux, dame de Vitré. Alias Guyonne de Laval ou Guyonne la Folle !
Sa sœur Claudine avait épousé François d’Andelot, le frère du célèbre amiral de Coligny : un protestant pur de dur. C'est lui qui organise l'un des premiers prêches protestants, près de Nantes.
Puis, des bastions protestants naissent à Vitré avec Renée de Rieux, ainsi qu'au château de Blain avec la célèbre Catherine de Partenay et son mari René de Rohan.
Mais la tradition qui raconte comment Guyonne a viré protestante est gratinée : son mari, Louis de Sainte-Maure, la fait excommunier par le pape, vers 1557. Oh, les deux s’entendaient plutôt mal...
Guyonne se retire à Vitré et par dépit, « pour se venger du pontife qui la rappelait à son devoir d’épouse, elle se jeta dans l’hérésie » raconte l’historien La Borderie.
- Vitré sera la seule place bretonne protestante à résister à un siège de 5 mois, contre l’armée royale du gouverneur de Bretagne du duc de Mercoeur, en 1589 !
5 - La tour de l'Oratoire
Ce petit bijou Renaissance date de l'époque des aménagements réalisés par Guy XVI de Laval, baron de Vitré et gouverneur de Bretagne.
Construit entre 1526 et 1531, il s'agit du premier monument Renaissance de Bretagne !
On y voit :
- le blason de ce dernier, flanqué du collier de l'ordre de Saint-Michel (dont il fait partie) ;
- les armoiries de ses 3 épouses successives, Charlotte d'Aragon, Antoinette de Daillon (son père fait construire le château sarthois du Lude) et Anne de Montmorency (la sœur du célèbre connétable).
L'oratoire, construit en tuffeau, a fait l'objet de restaurations au 21e siècle. Cette pierre très poreuse du val de Loire... n'a pas supporté l'humidité du climat breton !
6 - La tour Sans-Nom
C'est la plus récente des 8 tours qui composent le château de Vitré, construites à des époques différentes.
Celle que l'on a surnommé porte Sans Nom date de 1909-1910 : à la base, cette partie du château n'a pas de tour ! Elle a été ajoutée afin d'équilibrer la silhouette de la forteresse.
Tout au long du 19e siècle, cette partie du château a abrité la prison de la ville, avant sa démolition en 1908 et la construction de la tour Sans Nom.
Son architecte, Paul Gout, a utilisé le schiste noir du Portugal et le grès des Vosges : matériaux, qui, comme le tuffeau de la tour de l'Oratoire, sont fragiles, et ne résistent pas à l'humidité bretonne !
Sources
- Encyclopédie Châteaux Passion. Éditions Atlas, 2001.
- Soizic Houllier. La Renaissance s'invite au château de Vitré. Ouest-France, ouest-france.fr. 02/09/2017.
- Nicole Conquer. Les tours du château révèlent leurs secrets. Ouest-France, ouest-france.fr. 05/08/2017.
- Raymond Cornon. Vitré : Ille-et-Vilaine. Éditions SAEP, 1973.
- Collectif. Le pouvoir et la foi au Moyen Âge en Bretagne et dans l’Europe de l’Ouest. Presses Universitaires de Rennes, 2010.
- Marie Sasin. En 1913, quand la mairie de Vitré s’installait au château Ouest-France. Ouest-France, ouest-france.fr. 29/01/2024.