Marie-Aurore, la grand-mère de George Sand et Nohant

Marie-Aurore de SaxeMarie-Aurore de Saxe | ©Paris Musées - Musée de la Vie romantique / CC0

La grand-mère de George Sand, Marie-Aurore de Saxe, achète Nohant en 1793 et en fait son refuge.

Elle y élève sa petite-fille comme une mère, de ses 4 ans jusqu'à ses 17 !

Trois générations d'Aurore

Marie-Aurore est un pilier, dans la vie de sa petite-fille, la future George Sand !

C'est elle qui l’élève à Nohant, lui donne le goût d'écrire et celui, plus important que tout, de l'indépendance.

George a 4 ans, en 1808, quand elle s'installe à Nohant, après la mort accidentelle de son papa.

La petite Aurore, future George Sand... prénommée comme sa grand-mère, elle-même tenant son prénom de sa grand-mère, Aurore de Koenigsmark, maîtresse du roi Auguste II de Pologne !

Car figurez-vous que Marie-Aurore de Saxe est la fille naturelle (comme on dit) de l'actrice Marie Rinteau et du maréchal Maurice de Saxe... toute une histoire !

Maurice de SaxeMaurice de Saxe | ©Rijksmuseum / CC0

Marie-Aurore, fille de...

Marie-Aurore de Saxe naît le 20 septembre 1748, à Paris.

Ses grands-parents maternels ? Claude Rinteau, marchand-limonadier, et Marie-Anne Dupuy.

D’origine modeste et populaire, ils veulent assurer à leurs deux filles un avenir sûr et pérenne.

Le paternel pense au maréchal de France Maurice de Saxe, qui adore l’art dramatique et a pris l'habitude d'emmener avec lui, sur les champs de bataille, une troupe ambulante d’acteurs… dont de jolies comédiennes.

Rinteau lui présente ses filles, en 1747. Dont Marie, 17 ans.

Aaah, Marie ! Maurice tombe fou amoureux, elle devient sa maîtresse. Il a 49 ans.

Aurore de KoenigsmarkAurore de Koenigsmark | ©Paris Musées - Musée de la Vie romantique / CC0

Et voilà la petite Marie-Aurore qui pointe le bout de son nez, en 1748 !

Deux sangs totalement opposés coulent dans ses veines. Un mélange détonnant !

Le maréchal est lui aussi issu d’une liaison illégitime... Celle du roi de Pologne, le prince allemand Auguste II de Saxe et de la comtesse allemande de Koenigsmark.

Marie-Aurore épousera quant à elle le berrichon Louis Dupin de Francueil, de 33 ans sa cadette.

Un mariage heureux ! Maurice, le papa de George Sand, naît en 1778.

Marie RinteauMarie Rinteau | ©The Metropolitan Museum of Art / CC0

Nohant, le refuge

Marie-Aurore et son mari s’installent à Châteauroux en 1783, puis à Paris où ils mènent un train de vie étincelant.

Louis disparu en juin 1786, l'orage révolutionnaire se rapprochant, Marie-Aurore préfère s’éloigner de la capitale et se rapprocher du Berry, où elle a de solides attaches.

Le 23 août 1793, elle achète le domaine de Nohant pour 230 000 livres... soit tout l’argent qu'il lui reste, après avoir payé les dettes de Louis !

Elle s'y installe définitivement dès l'automne 1794, après avoir été emprisonnée quelques mois à Paris.

Elle agrandit le domaine en agrégeant de nouvelles terres, pour atteindre 250 hectares.

En 1802, elle réalise les premiers aménagements intérieurs (notamment l'escalier de pierre qui mène au premier étage).

George Sand écrit dans Histoire de ma vie :

« Je dirai quelques mots de cette terre de Nohant où j’ai été élevée, où j’ai passé presque toute ma vie et où je souhaiterais pouvoir mourir. L’habitation est simple et commode. Ce pays nous plaît et nous l’aimons. Ma grand’mère l’aima aussi, et mon père y vint chercher de douces heures de repos à travers les agitations de sa vie. Ces sillons de terres brunes et grasses, ces gros noyers tout ronds, ces petits chemins ombragés, ces buissons en désordre, ce cimetière plein d’herbes, ce petit clocher couvert de tuiles, ce porche antique, ces grands ormeaux délabrés, ces maisonnettes de paysan entourées de leurs jolis enclos, de leurs berceaux de vigne et de leurs vertes chènevières, tout cela devient doux à la vue et cher à la pensée quand on a vécu si longtemps dans ce milieu calme, humble et silencieux. Le château, si château il y a (car ce n’est qu’une médiocre maison du temps de Louis XVI), touche au hameau et se pose au bord de la place champêtre sans plus de faste qu’une habitation villageoise. »

Le parc de NohantLe parc de Nohant | ©Anecdotrip.com / CC-BY-NC-SA

Mère et grand-mère

Brune et blonde

Mais pourquoi George Sand a-t-elle passé toute sa jeunesse à Nohant auprès de sa grand-mère, qui l'élève comme une mère ?

À cause de la rivalité de Marie-Aurore avec sa bru, Sophie...

Maurice, le fils de Marie-Aurore et Louis, épouse à l’insu de sa mère Sophie Delaborde, en juin 1804.

Une roturière, roh là là ! Une femme de rang inférieur, fille d’un tenancier, petite-fille d’un vendeur d’oiseaux parisien...

Une modiste courageuse et travailleuse, qui « valait dix ouvrières à elle seule. Elle osait tout et réussissait tout. Elle eût fait des souliers, des meubles, des serrures s’il l’avait fallu. »

Un mariage express que ne peut empêcher Marie-Aurore.

Il faut dire que tout oppose les deux femmes.

George écrira que sa mère était « peuple jusqu’au bout des ongles », sa grand-mère grande dame de l’Ancien régime, portant haut l’orgueil de son rang, « l’une, blanche, blonde, grave, calme et digne dans ses manières, une véritable Saxonne de noble race, l’autre brune, pâle, ardente, gauche et timide devant les gens du beau monde, mais toujours prête à éclater quand l’orage grondait trop fort au dedans. »

Avides d'affection

De cette union naît la future George Sand, Aurore, le 1er juillet 1804.

La petite fille devient l'objet de violentes rivalités entre mère et grand-mère.

Elle écrit le terrible : « Avides de mon affection, ma mère et ma grand-mère s'arrachèrent les lambeaux de mon cœur. »

D'abord élevée à Nohant par les deux femmes, George voit bientôt Sophie finir par abandonner sa tutelle à sa grand-mère, moyennant une rente annuelle, en janvier 1809.

Toutes deux ont aimé l'enfant, à leur façon... et George a hérité de leurs deux forces de caractère !

Mais voilà Aurore-George chez sa grand-mère.

Elle gardera toute sa vie une profonde affection pour sa bonne-maman, malgré sa rigueur et ses manières.

Sophie DelabordeSophie Delaborde | ©Paris Musées - Musée de la Vie romantique / CC0

Une amie

Marie-Aurore s'éteint à Nohant le 26 décembre 1821, à l'âge de 73 ans.

Ses derniers mots ? Pour son Aurore, bien sûr : « Tu perds ta meilleure amie »...

Celle dernière hérite du domaine de Nohant. Elle y passera 40 années de sa vie. Les 40 plus belles !

Sources

  • Gaston Maugras. Les Demoiselles de Verrières. 1890.
  • Edmond Plauchut. Le Berry de François Ier à la Révolution. In Revue des Deux Mondes (62e année). 1892.
  • George Sand. Histoire de ma vie. 1856.
  • Michelle Perrot. George Sand à Nohant, une maison d'artiste. Éditions du Seuil, 2018.