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La statue de Théophraste Renaudot, père du journalisme français, des petites annonces... et des agences pour l'emploi

Statue de Renaudot, Loudun | ©Père Igor / Wikimedia Commons / CC-BY-SA
Statue Inventeur et créateur Statue de Théophraste Renaudot

De qui s'agit-il ?

Théophraste Renaudot (1586-1653) crée le tout premier journal français en 1631 : la Gazette de France.

Il est aussi l'un des médecins de Louis XIII, mais avant cela médecin des plus pauvres.

On lui doit l’ancêtre du Pôle Emploi, des boutiques de prêt sur gage en France, des dispensaires et de la publicité !

Si Loudun lui a dédié une statue, c’est qu’il y naît en 1586, au sein d’une famille bourgeoise protestante.

Son père, Jean, précepteur, est originaire de la Sarthe. Théophraste a 8 ans à la mort de sa mère, 12 à celle de son père.

Statue de Renaudot : détail

Statue de Renaudot : détail | ©Thérèse Gaigé / Wikimedia Commons / CC0

Sa statue à Loudun

La statue en bronze date de 1893, réalisée par le sculpteur poitevin Alfred Charron.

Renaudot, plus grand que nature, est représenté consultant le registre de son « bureau d'adresse », ancêtre du Pôle Emploi, sa création.

Le pupitre est orné d'un serpent buvant dans une coupe.

Sur le socle, on voit le médaillon en bronze d'Eugène Hatin, historien de Théophraste Renaudot au 19e siècle.

L'une des faces du socle de la statue est ornée de cette phrase de Renaudot :

« J'EN VIENS AUX PAUVRES / L'OBJET DE MES LABEURS / ET LA PLUS AGRÉABLE FIN / QUE JE ME SOIS / JAMAIS PROPOSÉE / ME RECONNAISSANT / NÉ AU BIEN PUBLIC / J'Y AI SACRIFIÉ / LE PLUS BEAU / DE MON ÂGE / SANS AUTRE RÉCOMPENSE / QUE CELLE DONT LA VERTU / SE PAIE DE SES MAINS. »
Statue de Renaudot : détail

Statue de Renaudot : détail | ©Thérèse Gaigé / Wikimedia Commons / CC0

Ce que vous devez savoir sur Renaudot en deux mots !

Défiguré par les écrouelles

C'est lors de ses études de chirurgie à Paris, débutées en 1602 au collège Saint-Côme, que Renaudot contracte les écrouelles.

Cette sorte de tuberculose cutanée le défigure à moitié, abîmant notamment son nez. Défaut dont ses détracteurs se moqueront plus tard...

Le plus virulent d’entre eux, le médecin Gui Patin, écrira d'ailleurs une satire intitulée... Sur le nez pourri de Théophraste Renaudot !

Création des ancêtres des dispensaires

Avant de devenir le médecin de Louis XIII, Renaudot soigne les plus pauvres à Paris.

Il donne « consultations charitables » (ancêtre des dispensaires) et médicaments gratuits aux plus nécessiteux, dans sa maison du Grand-Coq, sur l’île de la Cité.

Le succès est tel, qu'il doit se faire aider par chirurgiens et apothicaires, qui préparent les médicaments sur place.

Il faut dire que Renaudot a eu l'autorisation en 1640 de créer son propre laboratoire de chimie, lui permettant de fabriquer ses propres remèdes.

Avec les consultations charitables, Renaudot estime qu'il « faut que dans un État les riches aident aux pauvres, son harmonie cessant lorsqu'il y a une partie d'enflée outre mesure ; les autres demeurent atrophiées. »

Une idée précurseure de la Sécurité Sociale !

Renaudot (17e s)

Renaudot (17e s) | ©BIU Santé, Paris / Public domain

Création de l'ancêtre des agences pour l'emploi, les bureaux d'adresse

Renaudot fonde à Paris un « bureau d'adresse », en 1628.

Lieu où l'on consigne offres et demandes d'emploi, à destination des chômeurs, pour leur éviter de tomber dans la misère.

L'ancêtre du Pôle Emploi actuel !

Renaudot s'adresse à

« toutes personnes qui voudront vendre, acheter, louer, permuter, prêter, apprendre, enseigner ; aux maîtres qui veulent prendre des serviteurs et à ceux qui cherchent condition pour servir en quelque qualité que ce soit ; à ceux qui auront les lieux, commodités et industries propres pour être employés, etc. »

À l’origine des petites annonces dans la presse

Les premières petites annonces paraissent en 1633 dans La Feuille du bureau d'adresse, bureau créé, on l’a vu au point précédent, par Renaudot.

La Feuille, qui sort tous les 15 jours, propose offres d’emplois, mais pas que !

Maisons, terrains, animaux, meubles à vendre ou à louer, mais aussi adresses d’apothicaires et de médecins...

Renaudot en crieur de feuilles volantes

Renaudot en crieur de feuilles volantes | ©BIU Santé, Paris / Public domain

Création des premiers établissements de prêt sur gage

Dès 1627, Renaudot obtient l'autorisation qu'à son bureau d’adresse s'ajoute un bureau de « ventes à grâce, troc et rachats de meubles et autres biens quelconques. »

Le premier organisme de prêt sur gage (mont-de-piété) français, système déjà bien connu des Italiens, définitivement adopté par Louis XVI en 1777 !

La Gazette, tout premier journal français

Le 30 mai 1631, la Gazette de France, qui peut être considérée comme le premier hebdomadaire français, est lancé !

Son nom ? Il vient de l’italien Gazzetta : feuille d’informations vénitienne que l’on achetait au 16e siècle avec une monnaie du même nom.

La Gazette de France compte 4 pages, lors de sa première publication en 1631, puis 8, dès la 2e année.

S'y mêlent nouvelles de la cour de France et de l'étranger, relations de batailles...

Cette Gazette s'impose comme le premier journal politique du pays, le journal officiel du pouvoir royal.

La Gazette de Renaudot paraît jusqu’en 1915.

Première Gazette (1631)

Première Gazette (1631) | ©BIU Santé, Paris / Public domain

Renaudot en pleine tourmente !

En 1642 et 1643, Renaudot perd ses protecteurs, Richelieu et Louis XIII. La Faculté de médecine de Paris et autres jaloux lui tombent dessus !

Vous comprenez, cet individu qui vend sa gazette et soigne les pauvres gratis (quel manque à gagner, crache-t-on !), en leur prêtant sur gage... c’est un charlatan !

Le plus acharné ? Gui Patin. Il hait Renaudot ! Il crache sa bile :

« Si ce gazetier n'était soutenu de l’Éminence en tant que nebulo hebdomadarius (fripon hebdomadaire) nous lui ferions un procès criminel, au bout duquel il y aurait un tombereau, un bourreau. »

La Faculté accuse Renaudot d’exercice illégal de la médecine et somme le Parlement de Paris de l'attaquer en procès.

Un arrêt en 1643 défend à Renaudot d'exercice de son métier, puis le procès s'ouvre en mars 1644. Il est condamné !

Si son cabinet ferme, restent le bureau d'adresse et la Gazette.

Gui Patin (19e s)

Gui Patin (19e s) | ©BIU Santé, Paris / Public domain

La triste fin de Renaudot

Renaudot meurt à l'âge de 67 ans, ruiné, à moitié paralysé à la suite d'une attaque.

Même après sa mort, les attaques des médecins de la Faculté de Paris continuent.

Il est inhumé en l'église parisienne de Saint-Germain-l'Auxerrois, qui a conservé sa pierre tombale avec son épitaphe.

À noter que dans cette église a été enterré un certain Gui Patin... son plus féroce détracteur, mort en 1672 !

Sources

  • Claude Viel. Théophraste Renaudot : évadé de la médecine père du journalisme en France. Académie des sciences, arts et belles lettres de Touraine, 1999.
  • Notice Monument à Théophraste Renaudot sur le site À nos grands hommes, édité par le Ministère de la Culture.
  • Institut français de presse. Théophraste Renaudot : l'homme, le médecin, le journaliste. Colloque tenu le 29 novembre 1986. Institut français de presse et des sciences de l'information, 1987.
  • Daniel Lacotte. Le Pourquoi du comment (tome 3). Albin Michel, 2008.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !