On estime à 6 millions les individus dont les restes reposent aux Catacombes, sur 11 000 m2, à 20 m sous terre !
6 millions de Parisiens, dont de nombreuses célébrités de l'histoire de France.
Là, on est en 1785.
On va assister à la création des Catacombes, voir le tout début du transfert des restes de ces 6 millions d'individus, évacués de la vingtaine de cimetières insalubres que compte la ville à l'époque.
Tout commence avec le cimetière des Innocents
Saturation et asphyxie !
Alerte ! En cette fin de 18e siècle, le cimetière des Innocents sature !
Il est temps de faire quelque chose.
Comme évacuer les os du charnier des Innocents, où les morts de plus de 20 paroisses s'entassent depuis des siècles ?
Ça urge... déjà en 1780, des vapeurs nauséabondes ont asphyxié des gens du quartier des Halles, dans les caves de leurs maisons, voisines du cimetière.
Le charnier cocotte dur... et menace les gens.
Les fluides des corps en décomposition contaminent l'eau des puits, les miasmes atteignent vin et nourriture.
Mais personne ne bouge le petit doigt. Les riverains n’arrêtent pas de se plaindre ? On s'en fiche !
Une affaire qui prend de l'ampleur
Jusqu’à ce que des incidents plus importants arrivent dans les caves rue de la Lingerie.
Une des fosses communes des Innocents cède brutalement sous la pression de milliers de corps, tous ces restes se retrouvant éboulés là, dans les caves !
Les habitants font une supplique au lieutenant de police, rapportant que :
« Ce foyer de corruption dans lequel le nombre de corps déposés, excédant toute mesure et ne pouvant se calculer, en avait exhaussé le sol de plus de 8 pieds au-dessus des rues et habitations voisines. »
Même Voltaire s'empare de l'affaire... qui finalement, aboutit :
« Un petit cimetière infectait l'Église et les maisons voisines. Un simple particulier a réclamé contre cette coutume abominable. Il a excité ses concitoyens, il a bravé les cris de la barbarie, on a présenté requête au conseil. Enfin le bien public a emporté sur l'usage antique et pernicieux : le cimetière a été transféré à un mille de distance. »
Le transfert dans les carrières de la Tombe-Issoire
Le transfert
En 1785, on choisit les anciennes carrières de la Tombe-Issoire, dans la plaine de Montsouris, pour devenir l'ossuaire souterrain de Paris. Nos Catacombes actuelles.
L'inspecteur général des carrières Guillaumot se charge de leur aménagement. Et quel chantier !
Le transfert des os des Innocents dure d'avril 1786 à janvier 1788.
Regardez. La scène se passe à la nuit tombée. Silence de mort. Longue file sinistre.
Les silhouettes noires des fossoyeurs accompagnent les charrettes où s’entassent les restes.
Une file de prêtres crapahute derrière, jusqu’à l’entrée des catacombes où l'on déverse les os dans un puits.
Puits toujours visible au n° 8 de l’avenue Coty, dit le Guide de Paris mystérieux (éd Tchou) !
Une vingtaine de cimetière
Mais minute : ajoutez aux corps du charnier des Innocents ceux de 16 cimetières parisiens, supprimés entre 1792 et 1814...
Les transferts continueront jusqu’au dernier cimetière, en 1859 !
Les guillotinés de la Révolution sont aux Catacombes !
Aux Catacombes, on a aussi les os, pêle-mêle, de tous les grands noms de la Révolution française...
Guillotinés, enterrés dans les fosses communes de 4 cimetières et mélangés au cœur des Catacombes aux millions d’anonymes parisiens :
- Le cimetière de Picpus (il existe toujours).
- Le cimetière des Errancis (8e arr, vers le 97 de la rue Monceau). Ici reposaient Danton, Camille et Lucille Desmoulins, Fabre d’Églantine, Lavoisier, Robespierre, Élisabeth de France, la sœur de Louis XVI.
- Le cimetière de Sainte-Marguerite (11e arr).
- Le cimetière de la Madeleine (8e arr, emplacement de l'actuel square Louis-XVI, bd Haussmann). Ont été inhumés ici : Charlotte Corday, Louis XVI et Marie-Antoinette, Mme Roland, Mme du Barry, Olympe de Gouges, l’amiral d’Estaing.