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Nicolas Fouquet en prison au château d'Amboise : le témoignage de La Fontaine

Quand : 4 décembre 1661 - 25 décembre 1661

La Fontaine | Public domain
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Une prison d’État

C’est Louis XIV qui transforme le château d’Amboise, brillant siège de la cour de France aux 15e et 16e siècles, en sinistre prison d’État. Fonction qu’il garde tout au long du 17e siècle.

Où se situent ces prisons ? Dans ce que l’on appelle les tours cavalières !

Deux tours jumelles construites entre 1495 et 1498, sur ordre de Charles VIII : les tours des Minimes et Heurtault.

Elles dont dites « tours à rampe cavalière. » En effet, deux rampes hélicoïdales occupent leurs murs, facilitant l’accès au château des chevaux et autres carrosses.

Mais voyons plutôt le prisonnier le plus célèbre, enfermé au château 21 jours : Nicolas Fouquet.

Tour des Minimes

Tour des Minimes | ©Richard Mortel / Flickr / CC-BY

Malversations

Nicolas Fouquet ? Oh, inutile de vous présenter ce célébrissime personnage de l'Histoire de France une énième fois !

Sauf de rappeler qu’il a été le surintendant des Finances de Louis XIV : l’un des hommes les plus riches et les plus puissants de l’époque !

Accusé de malversations, il est bientôt arrêté sur ordre du roi, condamné au bout d’un épuisant procès de 3 ans, à la confiscation de ses biens et un emprisonnement à vie au fort de Pignerol (Italie), où il meurt le 23 mars 1680.

Avant cela, il avait connu plusieurs prisons, en France. Notamment au château d’Angers, puis ici, à Amboise.

Tour Heurtault

Tour Heurtault | ©Daniel Jolivet / Flickr / CC-BY

Un transfert houleux !

Arrêté à Nantes le 5 septembre 1661, Nicolas Fouquet se fait transférer le 7 au château d’Angers.

Il le quitte le 1er décembre 1661, accompagné de son médecin, le sieur Pecquet, et de son fidèle valet de chambre, Lavallée.

Direction le château d’Amboise, où il arrive le 4 décembre.

Fouquet aurait dû partir pour Amboise bien plus tôt. Mais à cause des très dures conditions de détention à Angers, il était tombé très malade.

Il avait fallu attendre qu’il se rétablisse, pour le transférer à Amboise. C’est sous les huées et les injures du peuple que le carrosse quitte Angers. « Si nous l’avions en main, nous le pendrions ! » entend-on hurler.

Un important cortège de mousquetaires encadre la voiture, le célèbre d’Artagnan en tête. Les huées continuent sur la route qui les mène à Amboise.

Le chemin entre Tours et Amboise doit même être effectué de nuit, pour éviter les émeutes !

Nicolas Fouquet

Nicolas Fouquet | ©Rijksmuseum / CC0

La triste prison de Fouquet décrite par La Fontaine

À Amboise, Fouquet est remis au sieur de Talhouët, enseigne des gardes du corps.

Sa prison au château est pire encore que celle d’Angers. C’est un cachot étroit, dont les ouvertures ont été murées : ne reste... qu’un soupirail !

Jean La Fontaine, grand ami de Fouquet (qui a été son protecteur), passera à Amboise, le 30 août 1663.

Le poète est alors en route pour Limoges, voyage qu’il décrira plus tard dans un livre intitulé Relation d’un voyage de Paris en Limousin.

Il demande à voir la cellule occupée par le prisonnier. Il écrira plus tard à son épouse ce qu’il a vu, dans une lettre datée du 5 septembre 1663.

En apercevant le beau panorama de la ville, ses jolies rives des bords de Loire, La Fontaine écrit :

« De tout cela, le pauvre M. Fouquet ne put jamais, pendant son séjour, jouir un petit moment. On avait bouché toutes les fenêtres de sa chambre, et on n'y avait laissé qu'un trou par le haut. Je demandai à le voir, triste plaisir, je vous le confesse, mais enfin je le demandai. Le soldat qui nous conduisait n'avait pas la clef ; au défaut, je fus longtemps à considérer la porte et me fis conter la manière dont le prisonnier était gardé. Je vous en ferais volontiers la description, mais ce souvenir est trop affligeant. Qu’est-il besoin que je retrace Une garde au soin non pareil ? Chambre murée étroite place Quelque peu d’air pour toute grâce Jours sans soleil Nuits sans sommeil Trois portes en six pieds d’espace ! Vous peindre un tel appartement, Ce serait attirer vos larmes Je l’ai fait insensiblement : Cette plainte a pour moi des charmes. »

L'après Amboise

Nicolas Fouquet quitte la prison du château d’Amboise le 25 décembre 1661, pour un transfert à Vincennes.

Un voyage tout aussi difficile que celui qui a mené le pauvre prisonnier d’Angers à Amboise. Le trajet s’effectue du 25 décembre au 31 décembre 1661.

6 jours, 7 étapes nécessaires à Blois, Orléans, Étampes ou Corbeil. 80 mousquetaires assurent la protection du carrosse du détenu, qui doit, encore une fois, affronter la foule qui déverse sur lui menaces de mort et insultes.

Fouquet supporte ces épreuves, rapporte un témoin, avec « beaucoup de courage et de résolution. »

La suite ? Triste, hélas ! Son procès commence en mars 1662. Il est reconnu coupable de péculat (détournement de fonds public) et de crime de lèse-majesté.

On le condamne au bannissement et la confiscation de tous ses biens. Peine commuée en emprisonnement à vie au sinistre fort italien de Pignerol, où Fouquet finit sa vie, en 1680, à l’âge de 65 ans.

Sources

  • Jean Vatout. Le château d'Amboise (souvenirs historiques). 1852.
  • Pierre Adolphe Chéruel. Mémoires sur la vie publique et privée de Fouquet (tome 2). 1862.
  • Jean-Christian Petitfils. Fouquet. Perrin, 2008.
  • Article Les tours cavalières du château royal d’Amboise sur le site officiel du château d’Amboise, www.chateau-amboise.com.
  • Yves-Marie Bercé. L’affaire Fouquet dans l’opinion de son temps et sous le regard des historiens. Le Fablier, Revue des Amis de Jean de La Fontaine. 1993.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !