Késako ?
Cette épice jaune dorée cultivée depuis des millénaires est originaire du Moyen-Orient et d'Asie.
En France, on la cultive dans le Loiret depuis le 16e siècle !
Le safran, crocus sativus de son petit nom savant, est un oignon, une plante à bulbe.
Elle a une jolie fleur de couleur violette, avec, aux extrémités, des stigmates, sorte de fins filaments rouges : la seule partie exploitable, qui une fois séchée, donne la fameuse épice !
Celle-ci se présente sous la forme de petits brins rouges, à forte odeur.
Elle sert de teinture, de plante médicinale, mais on l'utilise surtout en cuisine comme colorant ou comme exhausteur de goût.
Le safran est rare, donc cher, car la cueillette et l'épluchage à la main demandent du temps.
Pour vous donner une idée : 200 000 fleurs donnent 1 kg de safran !
La petite histoire
À la base, on cultive le safran à Boynes, dans le Loiret.
Puis la culture se répand dans tout le département : Montargis, Pithiviers, Boiscommun...
Réputé meilleur safran du monde, il connaît son heure de gloire au 17e siècle, avant de voir son déclin et sa fin au milieu du 20e siècle.
Pourtant, en 1987, il fait son retour dans le Loiret, grâce à la belle initiative d'un lycée horticole de la région !
Un musée lui est dédié à Boynes et depuis 1997, il existe une confrérie des Chevaliers du safran du Gâtinais... pour que vive la tradition !
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Des croisés et des bulbes
Mais d'où vient le safran du Gâtinais ?
Jacques-Hector de la Taille des Essarts, qui publie en 1766 son Mémoire sur le safran, en parle le mieux.
Mais on a aussi le prieur de l'abbaye de Ferrières, Dom Morin, qui en parle dans son Histoire du Gâtinais au 17e siècle.
Il rapporte que notre safran est cultivé dans la ville de Boynes, que :
« Les habitants en font un grand trafic, les Allemands y font tous les ans une descente pour acheter cette marchandise et il s'en vend pour plus de 300 000 livres par an. »
C'est un seigneur de Boynes, le sieur Pocquaire (ou Porchaire) qui introduit l'épice en Gâtinais.
Mais on ne sait pas bien quel membre de la famille : Jean, gentilhomme du 16e siècle, ou un chevalier dont on ne connaît pas le prénom, qui rapporte un oignon de safran des croisades, au 13e siècle ?
En tous cas, le petit bulbe si précieux se plaît dans son nouveau pays et s'acclimate remarquablement bien à la terre.
Il donne du travail aux familles, jusque là pauvres laboureurs.
L'or rouge et la fraude
Les rois, conscients de la valeur de cet « or rouge », font faire des ordonnances réglementant sa vente.
Comme celle d'Henri II, sur l'interdiction de « faire aucune mixion dans les safrans », publiée le 18 mars 1550 :
« Au pays du Gâtinais croît grande quantité de safrans de pareille ou plus grande bonté que ceux qui croissent en autres pays étrangers, et partant les marchands d'Allemagne et d'ailleurs ont toujours accoutumé d'en venir acheter en nos foires pour les mener en leur pays, pour le nécessaire usage qu'ils en ont fait pour le corps humain, et préservation de maintes maladies. »
Un marché très juteux, qui évidemment entraîne des fraudes !
Certains marchands n'hésitent pas à mélanger le safran avec d'autres épices de même couleur et de même aspect :
« A été trouvé un certain nombre de safran qui a été altéré, déguisé et sophistiqué, chargé d'huile, de miel, de moût et autres mixions afin que ledit safran qui se vend au poids se trouve plus pesant. »
La marchandise est confisquée, puis brûlée en plein marché.
En plus, des « peines corporelles » sont infligées aux fraudeurs !
Sources
- Jacques-Hector de la Taille des Essarts. Mémoire sur le safran. 1766.
- Dom Morin. Histoire générale du Gâtinais. 1630.