1 - Une construction à rallonge
183 m de long et des tours hautes de 40 m... il a fallu 70 ans pour construire le pont !
C'est au 13e siècle qu'un évêque de Cahors, Barthélémy de Ruffy, conçoit l'idée du pont au lieu-dit port de Valentré.
Mais ce sont les consuls de Cahors qui décrètent sa construction dans un acte de 1306.
Le premier consul de Sabannac pose la première pierre en 1308.
Mais les fonds commencent très vite à manquer et les travaux sont suspendus entre cette époque et 1313, où le roi accorde à la ville de nouvelles ressources, grâce aux droits de « barres », donnés pour 3 ans seulement.
En 1328, le consul Pierre Marin sollicite à nouveau le roi pour avoir la fameuse taxe.
Les travaux se terminent en 1355 !
2 - D'où vient le nom Valentré ?
Étrange nom que ce Valentré, qui a fait couler beaucoup d'encre !
Plusieurs étymologies possibles.
Valentré viendrait de intra vallum, à cause de « la situation du pont dont l'entrée se trouvait au bout du vallon occidental (où il y avait un port) qui conduit à la ville », raconte le Congrès archéologique de France (XLIVe session, 1878).
Valentré pourrait venir de pount de Bolondres, le bolondre n'étant autre que le mot patois pour balandre, une sorte de barque à fond plat qui faisait la communication entre les deux rives du Lot (Recherches et observations sur le patois du Quercy, P. Lescale, 1978).
Lou pount de Bolondres prend alors le nom du bac qu'il avait remplacé !
Mais une autre explication explique autre chose de bien plus intéressant !
La revue Le Domaine : revue littéraire, artistique et corporative du 15 novembre 1922 explique ceci : les Anglais, alors installés dans le Sud-Ouest pendant la guerre de Cent Ans, transportaient de Cahors à Bordeaux, leur fief, des denrées par barques.
Une cité alors connue sous le nom de Petite Londres : le patois appelait Bordeaux Loundré et les gens qui vont à Bordeaux des « Bô o Loundré ».
Le port d'où les Anglais partaient à Cahors devint lou pount dé Bâloundré... puis plus tard Valentré.
3 - La cage pénitentiaire
On retrouve, à la toute fin du 19e siècle, une cage en fer dans le Lot, sous une des piles du pont Valentré.
La tradition veut qu’on y enfermait les femmes infidèles avant de les plonger dans la rivière, depuis le pont !
En survivant au bouillon, elles étaient innocentes, en se noyant c’est la preuve qu’elles avaient péché…
Oh, mais, on peut toujours voir cette cage : au musée Henri-Martin de Cahors !
4 - La légende
On appelle aussi le pont Valentré... pont du Diable !
Comme le pont du Gard ou le pont de Céret, celui de Cahors a sa petite légende diabolique.
Le maçon, qui n’en peut plus de la lenteur des travaux, fait appel au Diable pour l’aider.
Satan lui promet de finir le pont en une nuit, mais en échange, hé : il doit lui donner son âme comme monnaie d’échange...
Le Diable envoie ses petits diablotins construire le pont.
Le pont est presque achevé, et notre maçon se met à penser à son âme. Pas question de la perdre !
Pour se libérer du pacte infernal, il demande au Diable d’aller chercher de l’eau pour ses ouvriers, dans un crible... un récipient percé.
100 fois, Satan tente d’aller chercher l’eau. Rien à faire !
Vexé, furieux, le Diable envoie depuis chaque nuit un sbire desceller la dernière pierre de la tour du milieu, que les ouvriers remettaient en place tous les matins...
Cette tour s’appelle depuis tour du Diable : en 1879, l’architecte qui restaure le pont y fait apposer un petit diable sculpté...
Sources
- René Alleau. Guide de la France mystérieuse. Éditions Tchou, 2018.
- Éloïse Mozzani. Légendes et mystères des régions de France. Robert Laffont, 2015.
- Encyclopédie d'architecture et des arts qui s'y rattachent (volume 2). 1890.