Petite histoire du château de Mauvezin
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Quand : 1379 - 1907
Mauvezin, mauvais voisin
Le blond Phébus
On paraît tout petit, au pied de l'immense forteresse de Mauvezin !
Oh là, il doit bien se cacher un esprit légèrement mégalo derrière sa construction, non ?
Effectivement ! Celui de Gaston III de Foix-Béarn, sobrement surnommé... Phébus.
Ce grand seigneur, qui entre en possession du château en 1379, est jeune, fort et beau.
On l'a surnommé Phébus, sûrement parce qu'il est blond, ou qu'il porte un soleil sur ses armes...
C'est lui qui se trouve à l'origine de la construction de la ceinture de forteresses qui émaille les Pyrénées : Montaner, Morlanne, Pau...
Mauvezin, dont le nom signifie « mauvais voisin », représente un pion de plus.
Le donjon carré de Mauvezin
Le fils d'Aliénor de Comminges et de Gaston II de Foix-Béarn fait en tout cas reconstruire et consolider le fief de son ancêtre vicomte de Béarn, Centule, qui a élevé la forteresse quadrangulaire primitive au XIe s.
Dès 1379, donc, sort de terre l'énorme donjon carré haut de 37 m.
Une forteresse imprenable oui, mais qui avait quand même bien souffert au cours de son histoire.
Pendant la guerre de Cent Ans surtout, lorsque Mauvezin se fait assiéger par les Anglais (3 fois), avant que Philippe le Bel n'y mette un terme en 1292, enlevant aux comtes de Béarn leur forteresse.

Remparts de Mauvezin | ©Hammondtravels / CC-BY-SA
Plus d’eau !
En 1360, avec la signature du traité de Brétigny qui cède le Bigorre (lieu où se trouve notre château) aux Anglais, Mauvezin se retrouve de nouveau sous tutelle ennemie, avec comme puissant chef le Prince noir, Edouard.
Heureusement, en 1373, le duc d'Anjou parvient à reprendre Mauvezin après un siège (éprouvant !) de 6 semaines.
C'est comme ça que Gaston Phébus a pu récupérer son bien !
Les Français avaient coupé l’accès au puits du château... qui s’assèche vite !
Le chroniqueur Froissart raconte :
« Oncques goutte d’eau du ciel n’y chut depuis 6 semaines tellement il faisait chaud et sec.
« Et ceux de l’ost avaient bien leur aise de la belle rivière du Lées qui leur coulait claire et raide et dont ils se servaient pour eux et leurs chevaux.
« Les compagnons de la garnison de Mauvezin (les Anglais, ndlr) ne pouvaient longuement durer : des vins avaient-ils assez, mais la douce eau leur manquait. »
En attendant, les descendants de Phébus délaisseront peu à peu le château... jusqu'à plusieurs restaurations, au début (1907) et à la toute fin du XXe s.
L’Antéchrist dans la citerne
Puisqu’on parle d’eau...
Dans la cour du château se trouve encore une énorme citerne qui recueillait l’eau de pluie (bien pratique en cas de longs sièges).
On la transforma ensuite en prison, dans laquelle on enferma des Protestants au XVIe s. Si, si : même que sur un des murs on peut encore lire
« Dieu seul sera adoré, et l’Antéchrist de Rome abîmé »...
Le blason de Jean de Grailly
Sur un des murs des remparts, on voit un blason, représentant une frise de choux et des têtes de loups.
Une inscription dit : « J’ai belle dame ». Tout un programme !
A-t-elle un rapport avec le blond Phébus, sacré bourreau des cœurs ?
Même pas : il s’agit de la devise de Jean de Grailly, comte de Foix et de Béarn, qui vécut là au XVe s.
C’est un superbe jeune homme qui fait sensation à la cour du roi de France, neveu et successeur de Gaston Phébus : ah, oui, avec un tonton comme ça, aussi, il a de qui tenir...
La dame à la ceinture
Dans le château se tient un petit musée d’histoire locale : ne le manquez pas ! Surtout pour découvrir l’histoire de la chambre de la Dame à la ceinture de chasteté...
Leonna, la femme du féroce seigneur de Castelbon, s’était vue affublée d’une ceinture de chasteté pendant qu’il allait guerroyer au loin.
Il fait donc venir un forgeron du village voisin, juste avant son départ.
Mais quand ledit forgeron voit la si belle jeune femme toute en larmes, il saute sur le seigneur et lui assène un coup de marteau sur le crâne.
Après quoi il peut se glisser dans le lit de la dame... Profite bien, la fête sera de courte durée !
Car Leonna le fait arrêter sitôt les draps quittés, immédiatement pendu au donjon...
C’est que madame, libérée d’un mari et de sa ceinture, n’allait tout de même pas se farcir un autre homme à la maison...
La tradition locale dit même que ce cadavre pendu, sinistre vision, a donné son nom de « mauvais voisin » au château...
La visite de Mauvezin
Quelques salles abritent aujourd’hui un musée historique.
Sympathique, et le cadre qui l’abrite l’est encore plus !
Un bien beau château dont les murs ont été faits de galets venant de la rivière voisine, en contrebas.
On dit qu’à l’époque, le seigneur a mis les hommes du village à contribution, qui se faisaient la chaîne en se passant les galets un à un...
Source
- Bernard Duhourcau. Guide des Pyrénées mystérieuses. Éditions Tchou, 2001.