Je vous présente Gaston III de Foix-Béarn, dit Phébus, le célèbre seigneur qui fait construire le château de Montaner, au 14e siècle.
Un homme hors du commun, qui frappe les esprits par sa plume et ses décisions politiques !
1 - D’où vient son surnom de Phébus ?
Son surnom de Phébus ou Febus (écriture occitane) fait référence au nom latin du dieu Apollon.
Soit parce qu’il est blond, soit parce que son emblème est un soleil. Même Louis XIV n’aurait pas osé...
2 - Il écrit un best-seller
Gaston Phébus est surtout connu pour avoir écrit un livre de vénerie (la chasse à courre) : le Livre de Chasse, entre 1387 et 1389.
Un ouvrage de référence sur l’art de la chasse, best-seller du genre, indétrônable jusqu’au début du 19e siècle !
Il est écrit en français, alors que la langue maternelle du comte est le béarnais !
Phébus dédie sa prose au duc de Bourgogne Philippe le Hardi, à qui il écrit dans sa préface :
« Il n’y a pas de plus grand bonheur pour un homme que de partir à la chasse. Il n’y a pas de plus grand bonheur que de revenir le soir bien fatigué à son logis, de manger un peu de lard de cerf, de boire, de savourer la torpeur de la vesprée et de se coucher dans de bons draps frais. Et d’ailleurs, tous les chasseurs vont au paradis ! »
3 - Une devise, un blason
« Touches-y si tu l’oses », toque-y si gauses ! La devise de Gaston Phébus est encore celle aujourd’hui de la ville de Foix.
Sans oublier le blason des Foix-Béarn, avec ses vaches, qui surplombe toujours la porte d’entrée du château de Montaner.
C’est encore aujourd'hui le symbole du Béarn.
Saviez-vous que ces vaches venaient des Vaccéens, peuple celte venu d’Espagne qui emmena sous son bras ses traditions… et ses vaches ?
4 - Un sacré caractère
L’enfance de Gaston ne laisse rien présager de bon. L'intéressé l'avoue lui-même :
« Quand je naquis, j’étais pervers et frivole au point que mes parents avaient honte de moi. Tout le monde disait : Celui-ci ne pourra jamais rien valoir. Malheur au pays dont il sera le seigneur. »
Pourtant... Il a seulement 12 ans, quand il succède à son père.
Il devient comte de Foix, vicomte de Béarn, vicomte de Marsan et co-prince d’Andorre. Un sacré CV !
C’est un prince fier et arrogant, dans son Béarn qu'il a rendu complètement indépendant et qui résiste farouchement à la Guerre de Cent Ans.
Il tient dans ses forteresses (Orthez, Pau, Morlanne, Montaner) une cour fabuleuse.
En 1347, Phébus prête allégeance au roi de France pour son comté de Foix, mais déclare le Béarn neutre dans les conflits.
Il déclare ne tenir son pays de Béarn que de Dieu et de son épée !
5 - Gaston Phébus tue son propre fils
Gaston a été rude avec sa femme, Agnès de Navarre, une princesse Capétienne.
Sous prétexte que la totalité de sa dot ne lui a pas été versée, il la répudie : juste après la naissance de leur fils !
Son beau-frère (futur roi de France Charles II, dit le Mauvais), colère, complote une machination vengeresse en se servant du fiston.
Il lui donne un « philtre d’amour », censé, s’il le donne à son père, raviver l’amour de ses parents…
Naïf, le fils s’exécute… mais, démasqué, il se fait assassiner par son propre père. Son fils unique... La scène se passe à Orthez, un des châteaux de Gaston.
6 - Son fils adoptif meurt brûlé
Jean de Béarn (ou Yvain de Foix) est le fils adoptif de Gaston. Son préféré !
Il veut même qu’il lui succède, le jour venu.
Malheureusement, Yvain meurt dans des conditions atroces, quelques jours après le célèbre Bal des Ardents, le 28 janvier 1393, horriblement brûlé...
7 - La mort d'un dingue de chasse
Fou dingue de chasse, Gaston Phébus trouve la mort des suites de sa passion, après une longue chasse à l’ours.
La scène se passe dans l’actuelle commune de l’Hopital-Orion (64).
Ayant chassé depuis le matin, Phébus s’arrête le soir pour dîner au prieuré de l’Orion, dans une salle toute fraîche.
Il discute avec ses compagnons, quand on lui apporte l’aiguière pour se laver les mains. Il se lève de son siège, plonge ses doigts dans l’eau glacée.
Mais soudain, il devient pâle... les pieds se dérobent sous lui... il retombe lourdement sur son siège, bredouillant un terrible : « Je suis mort. »
Le chroniqueur Froissart (qui est toujours là quand il faut) raconte :
« Oncques plus ne parla et entra en état de peines et de transes. On lui mit à la bouche du pain levé et des épices ; mais de tout cela rien ne lui valut, car en moins de deux heures il fut mort. »
Et dire que l’on avait appris à Gaston, juste avant son malaise, la nouvelle de la mort de Jean d’Armagnac, l’ennemi juré des Foix...
8 - Montaner, l'orgueil de Phébus
Seul vestige de la puissante forteresse de Montaner, voilà le donjon haut de 40 m, qui s'élève bien solitaire en haut de sa colline.
Pour défendre le Béarn face à la Gascogne anglaise !
Entre 1375 et 1380, le château-fort s'élève petit à petit.
On utilise des briques, comme moyen de construction, ce sont des matériaux très économiques.
Point culminant de l'ensemble, le donjon et ses murs épais de 3 m, haut de 5 étages, qui fait la fierté de son constructeur : le blason au-dessus de l'entrée dit, en toute modestie, « Phébus m'a fait » !
Sources
- Bernard Duhourcau. Guide des Pyrénées mystérieuses. Éditions Tchou, 2001.
- Encyclopédie Châteaux Passion. Éditions Atlas, 2001.
- Pierre de Marca. Histoire de Béarn (tome 1). 1894.
- Joseph Lavallée. La chasse de Gaston Phébus comte de Foix. 1854.
- Abbé Monlezun. Histoire de la Gascogne (tome 2). 1846.
- Les chroniques de sire Jean Froissart.