
La fontaine des Innocents a changé trois fois de place. C’est parti pour un voyage dans le temps !
Partie 1 : le cimetière des Innocents
La fontaine primitive
La fontaine primitive se trouvait au Moyen Age à l'angle de la rue Saint-Denis et de la rue Berger (autrefois rue aux Fers), collée à l'église et au cimetière des Saints-Innocents.
Longue histoire pleine d’anecdotes, que celle du cimetière des Innocents ! Célèbre pour son charnier et sa danse macabre.
Mais en 1786, il est temps de le fermer, transférer les restes de millions d’anonymes aux Catacombes.

La fontaine Renaissance actuelle
La fontaine Renaissance actuelle voit le jour en 1548, pour remplacer la fontaine médiévale initiale.
Aux commandes, l’architecte Pierre Lescot, qui a, entre autres, rénové la façade du palais du Louvre ou construit l’hôtel Carnavalet, à Paris.
Les bas-reliefs signés Jean Goujon représentent des nymphes, d'où son nom de « fontaine des Nymphes » !
Des bas-reliefs démontés depuis, car détériorés par l’écoulement de l’eau : on peut les voir au musée du Louvre !

Partie 2 : le pittoresque marché des Innocents
La fontaine déménage
Lorsqu'on supprime le cimetière des Innocents en 1786, la place est libre !
On y installe un marché, celui des Innocents, qui s'établit là en 1788 !
Les architectes Poyet et Molinos y déménagent la fontaine.
Le monument ne compte seulement que 3 faces, lors de sa réalisation ; le sculpteur Augustin Pajou en ajoute une quatrième, tandis que Houdon crée trois nouvelles naïades.

Un marché haut en couleurs !
Le livre Paris à travers les siècles (1881) évoque « les étalages pittoresques, les tentes grossières et les immenses parapluies sous lesquels se tenaient des commères marchandes de choux ou de carottes à la langue trop bien affilée. »
Guide général dans Paris (1855) dit :
« Les marchandes avaient pour tout abri de vastes parapluies et se tenaient dans des tonneaux. C’est le rendez-vous de toutes les industriels nocturnes dont Paris abonde. La vie y commence à 11 heures du soir, et finit à 6 heures du matin. »

On y vend légumes et fruits, ajoute le guide :
« Environ 320 charrettes apportent les légumes nécessaires à la consommation quotidienne de la capitale. 420 voitures et autant de bêtes de somme ont occupées à leur transport. On y vend pour 1 500 000 francs de salade par an. »

Les merveilles du nouveau Paris (1867) évoque :
« Les marches entourant la fontaine furent bientôt envahies par des cuisines en plein vent, installées sous d'immenses parapluies rouges, et offrant à un bas prix impossible la soupe et le bœuf, des saucissons, des pommes de terre frites et des beignets, pendant que tout alentour, les marchandes également installées sous des parapluies, offraient leurs marchandises aux chalands dans un langage trivial. Les marchands de vin qui entouraient le marché des Innocents restaient ouverts toute la nuit. Aussi, vers minuit, on voyait se rabattre de ce côté toute une population de flâneurs, d'élégants débauchés... »
Partie 3 : l’emplacement actuel
En 1858, on remplace le marché des Innocents par un petit square.
Hé oui ! Les gigantesques Halles de Baltard viennent de se construire : le petit marché devient donc inutile…
L'architecte Gabriel Davioud se charge de placer notre fontaine au milieu d'un grand bassin, en 1860.
Et voilà ! Depuis cette époque, le square Joachim-du-Bellay sert de point de rendez-vous à beaucoup de Parisiens !
Sources
- Jacques Hillairet. Connaissance du vieux Paris. Éditions Princesse, 1963.
- Guides Bleus Paris. Hachette, 1994.