Le trésor de la collégiale Saint-Sauveur de Grignan : le tombeau de Mme de Sévigné

Du 17 avr. 1696 à mai 2005

Collégiale, GrignanCollégiale, Grignan | ©Calips / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

La collégiale de Grignan

La collégiale est construite entre 1535 et 1542 par Louis Adhémar, chambellan de la chambre du roi, ambassadeur du roi à Rome et gouverneur de la Provence.

Seigneur du beau château voisin de Grignan, surtout !

Entre autres trésors, on y trouve un détail historique qui a son importance dans l’histoire de la cité drômoise : le tombeau de la marquise de Sévigné, indiqué par une plaque au sol, dans le chœur.

Un souvenir de la résidente la plus célèbre de Grignan, qui s'éteint effectivement dans le château de sa fille, le 17 avril 1696 !

Mme de SévignéMme de Sévigné | ©Daniel Villafruela / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

La mort de la marquise de Sévigné

La marquise s'éteint au château de Grignan le 17 avril 1696, âgée de 70 ans.

Elle n'avait jamais revu ce Paris qu'elle avait quitté au milieu de l'année 1694, où frappent alors famine et maladies, dans un contexte d'hiver très rude, de mauvaises récoltes et de guerre.

La marquise décide de quitter cet enfer sur terre pour Grignan, un paradis épargné. Elle connaît bien Grignan, pour y avoir fait déjà plusieurs séjours...

Elle avait en plus envie de vivre auprès de sa fille Françoise, qu'elle adore plus que tout au monde, dans ce château qui « est très beau et très magnifique. Cette maison a un grand air ; on y fait bonne chère, et on y voit mille gens. »

À la fin du mois de mars 1696, la marquise est déjà atteinte du mal qui va l'emporter : la petite vérole, la terrible variole contre laquelle on n'avait alors aucun traitement. Et dont l'issue était quasiment toujours mortelle...

Sa santé s'aggrave brusquement début avril. Très vite, la marquise prend conscience de son état et comprend qu'elle doit se préparer à la mort. La maladie l'emporte en 10 jours.

Collégiale de Grignan : le choeurCollégiale de Grignan : le choeur | Collégiale de Grignan | ©Patrick - Morio60 / Flickr / CC-BY-SA

L'inhumation de la marquise de Sévigné

La variole étant une maladie extrêmement contagieuse, l'inhumation de la marquise de Sévigné a lieu très rapidement après sa mort... le lendemain, soit le 18 avril 1696 !

Un procès-verbal d'août 1816, rédigé par le maire de Grignan, indique en effet que :

« Cette dame était morte d’une petite vérole si maligne, que sa famille, non seulement n’avait pas eu le temps de se procurer un cercueil de plomb, mais avait été obligée de la faire inhumer avant l’expiration des délais ordinaires. »

On n'ouvre pas le caveau familial : on l'enterre dans le chœur, à gauche de l'autel. C’est cette plaque au sol qui indique l'emplacement de sa tombe.

Collégiale de Grignan : le choeurCollégiale de Grignan : le choeur | Collégiale de Grignan : le chœur | ©Patrick - Morio60 / Flickr / CC-BY-SA

Une histoire de violation de tombe... et de crâne !

Pillage de sépultures et phrénologie

Au moment de la Révolution française, en 1793, les sépultures qu'abrite la collégiale de Grignan sont violées.

On est à la recherche de plomb, pour fondre armes et canons ! Les cercueils en regorgent. Celle de la marquise de Sévigné ne fait pas exception...

Pour l'occasion, le célèbre médecin Franz Gall vient inspecter le crâne de la dame. Cet Allemand d’origine est le père de la phrénologie, pseudo-science « qui prétend connaître le caractère de quelqu'un par l'examen de son crâne », nous dit le Larousse.

Allons-y pour la marquise ! Pour cela, Gall fait scier son crâne en deux, l’examine, avant de soigneusement le ressouder et de le remettre dans son cercueil.

Il livre ensuite ses conclusions : notamment le fait que la forme du crâne de l'épistolière montre... une absence d'amour maternel !

Où est le crâne de la marquise ?

L'analyse de Gall sera décriée, notamment par l’écrivain Charles Nodier, en 1835, qui écrit que ce n'est même pas sûr qu'il s'agisse du crâne de la marquise.

Argument repris par le maire de Grignan, qui, en 1816, assure que la tombe de la dame de Sévigné n'a pas été violée, en 1793 : les os analysés ne sont pas les siens !

Les rumeurs s'emmêlent bientôt.

  • Le crâne aurait été caché dans un couvent en Belgique, rapporte le Guide de la Provence mystérieuse (éditions Tchou) ;
  • une autre histoire raconte que pendant que l’on sciait le crâne, un prêtre profite que le juge de paix envoyé pour constater les faits, un certain sieur Ralla-Champier, a le dos tourné pour voler un morceau de la tête.

Il l’aurait remis en Italie à la petite cousine de la marquise, qui l’aurait ensuite légué à un couvent de Nancy, où il se trouve encore.

Des analyses ADN ont depuis montré que le crâne de Nancy n'était pas celui de l'épistolière.

Une redécouverte !

En mai 2005 ont lieu des travaux de restauration de la collégiale de Grignan. Le maire de la commune en profite pour faire ouvrir la tombe de la marquise de Sévigné.

On trouve un crâne scié en deux, à tout point semblable à l'opération pratiquée par le docteur Gall, au moment de la Révolution française.

Crâne qui se révélera, après analyse, être celui de Mme de Sévigné !

Sources

  • Collégiale Saint-Sauveur (MH), Grignan. Conservation départementale du patrimoine de la Drôme, cartepatrimoine.ladrome.fr.
  • Claude Lamboley. Mort de Mme de Sévigné à Grignan. In Académie des Sciences et Lettres de Montpellier (tome 47). 14/11/2016. Académie des Sciences et Lettres de Montpellier, ac-sciences-lettres-montpellier.fr.
  • René Gharbi, Caroline Paux. Découvrir la Drôme. Horvath, 1991.