Le coeur de Bertrand du Guesclin repose à Dinan

De 1380 à 1810

La basiliqueLa basilique | ©Patrick - Morio60 / Flickr / CC-BY-SA

La fin d'un connétable

20 années au service fidèle du roi de France Charles V, en pleine guerre de Cent Ans !

Mais là, le connétable breton Bertrand du Guesclin tirait sa révérence.

Il meurt en Lozère, à Châteauneuf-de-Randon, le 13 juillet 1380, après avoir combattu les Anglais, une dernière fois.

Son testament

Bertrand avait écrit son testament quelques jours seulement avant sa mort, le 9 juillet 1380.

Son souhait le plus cher ? Reposer sur sa terre natale bretonne, « en l’église des Jacobins de Dinan, en la chapelle de nos prédécesseurs » (ses aïeux), et aux côtés de son épouse Tiphaine Raguenel.

Au final, on va le voir... seul son cœur arrivera à Dinan !

Du GuesclinDu Guesclin | ©Musée de Bretagne / Public domain

Quatre tombeaux !

Les rois de France ont d’ordinaire trois tombeaux.

C’est un usage banal, à l’époque médiévale : il s’agit de la dilaceratio corporis, la division du corps d’un grand prince ou seigneur en plusieurs parties.

Trois, exactement : viscères, cœur et ossements.

Bertrand du Guesclin, lui, a eu... quatre tombeaux !

On compte ainsi ses os, son cœur, ses viscères, ses chairs.

Les étapes d'inhumation des restes de Du Guesclin

a) Le Puy

Tout d’abord, avant d’entamer le long chemin qui mènera Bertrand en Bretagne, il faut embaumer son corps.

Sa dépouille arrive au Puy-en-Velay (43), cousue dans une peau de cerf.

On dépose ses entrailles dans cette ville, dans l’église des Jacobins (actuelle Saint-Laurent), puis on reprend le chemin vers la Bretagne.

Du Guesclin sur son lit de mortDu Guesclin sur son lit de mort | ©Musée de Bretagne / Public domain

b) Montferrand

Ensuite, on fait étape à Montferrand (63).

Là, on se rend compte qu’avec la chaleur étouffante de ce mois de juillet, le corps se décompose !

On doit faire bouillir les chairs, afin de séparer les os :

« Le corps de monseigneur Bertrand fut bouilli en l’eau, et fut ôtée toute la chair et les os, et fut coulé dans le corps de la glaise. »

Les chairs sont déposées dans l’église des Cordeliers de Montferrand (détruite en 1793), tandis que les os, reconstitués dans la glaise, reprennent leur route.

Saint-Sauveur, Dinan : le déambulatoireSaint-Sauveur, Dinan : le déambulatoire | ©Patrick - Morio60 / Flickr / CC-BY-SA

c) Saint-Denis

Plus tard, au Mans, on reçoit un ordre royal.

Halte-là ! Le message ordonne de conduire les os de Du Guesclin à Saint-Denis, afin qu'ils soient inhumés aux côtés des rois de France !

Charles V voulait honorer la mémoire de son fidèle Bertrand, en lui faisant une place de choix, aux pieds du tombeau qu’il s’était fait préparer.

Charles meurt finalement deux mois avant la mort du Breton !

Ne restait plus, de ce dispatche macabre, que le cœur du connétable. Qui pouvait enfin prendre la route de Dinan !

Détail du tombeau de Du GuesclinDétail du tombeau de Du Guesclin | ©Patrick - Morio60 / Flickr / CC-BY-SA

L'arrivée, enfin, du cœur à Dinan !

Le cœur de Bertrand prend donc la route de la Bretagne : cap sur Dinan, et son église des Jacobins.

Il trouve sa place dans un reliquaire en forme de cœur de plomb, sous une dalle de pierre, ornée du blason de Du Guesclin, « l’aigle de sable à deux têtes, éployée, becquetée et membrée de gueules, à la bande de gueules brochant sur le tout. »

L’épitaphe en lettres dorées dit :

« Ci-gît le cœur de Messire Bertrand Duguesclin, en son vivant connétable de France, qui trépassa le 13e jour de juillet l’an 1380 dont son corps repose avec ceux des rois à Saint-Denis en France. »

En 1809, au moment de démolir l’église des Jacobins, on tombe sur le fameux cœur !

Le sous-préfet de Dinan, M. Néel, le fait transporter dans la basilique de Saint-Sauveur, en grande pompe, le 9 juillet 1810.

Ce sont la dalle et le coffret d’origine qui ont été transférés à Saint-Sauveur, et que l’on voit encore aujourd’hui !

Sources

  • Christophe de Freminville. Antiquités de la Bretagne. 1837.
  • Paul Deschamps. Le tombeau des entrailles de du Guesclin à l'église Saint-Laurent du Puy. In Monuments et mémoires de la Fondation Eugène Piot (tome 41). 1946.
  • Frédéric Morvan. Du Guesclin. Fayard, 2021.
  • Murielle Gaude-Ferragu. D’or et de cendres : la mort et les funérailles des princes dans le royaume de France au bas Moyen Âge. Septentrion, 2020.
  • Élie Deydier. Histoire de la cité de Saint-Flour. 1966.