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Le capitaine Fort-Épice à Avallon

Quand : 1432 - 1433

Tour Beurdelaine | ©Chabe01 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA
Fortification Guerre de Cent Ans Remparts d'Avallon

Les remparts d'Avallon sont un bon moyen de remonter le temps, au Moyen Âge, et d'évoquer un capitaine haut en couleur !

Une cité et ses remparts

Les remparts d’Avallon ! Ils sont fiers, ils sont rudes, ils dominent la belle vallée du Cousin de toute leur stature…

Tours, murailles, portes, éperons : les fortifications se construisent dès le 9e siècle, après des raids sanglants.

Ensuite, entre le 10e et le 14e siècle, plusieurs phases d’aménagement se succèdent.

On compte alors une vingtaine de tours... seules 5 sont encore debout : la tour Beurdelaine (1404), la tour Gaujard (1438), la tour du Chapitre (1450), la tour des Vaudois et la tour de l’Escharguet (1520).

Hééé ! C’est qu’assiéger des cités, cela vous abime des remparts entiers ! Comme les raids qu'Avallon connaît, pendant la guerre de Cent Ans…

Allez, retour au Moyen Âge avec un militaire fort en gueule, j’ai nommé le capitaine Fort-Épice !

Bastion de la Petite Porte

Bastion de la Petite Porte | ©Christophe.Finot / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

Fort-Épice arrive...

Au début du 15e siècle, les remparts d’Avallon sont en piteux état. Des siècles d’envahisseurs de tous poils et de guerres de tous horizons, que voulez-vous…

Une aide financière des ducs de Bourgogne Jean sans Peur et Philippe le Bon, permet de les reconstruire.

Cela tombe bien, je vois la date de 1433 se profiler à l’horizon… vous savez ?

La guerre de Cent Ans, ses ravages, ses morts, sa désolation… et là, dans la poussière, arrive au loin un cavalier…

Son nom… oh, oublié depuis longtemps… mais c’est un gars haut en couleurs…

Je l’imagine bien le poil rêche, la barbe de trois jours grisonnante, la sueur lui collant aux basques comme de la flotte sur une peau de chèvre, le cuir épais et buriné comme une vieille carne.

Il porte le surnom pittoresque de Fort-Épice, de son vrai nom Jean d’Espailly.

Voilà son histoire, à Avallon, au cœur de ces remparts médiévaux.

Tour de l'Escharguet‎

Tour de l'Escharguet‎ | ©Chabe01 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

Brave jusqu'à la témérité

Fort-Épice, mercenaire de son état, est au service du roi de France.

Des hommes de la trempe de ce Perrinet Gressart, que l’on a vu tenir la cité de La Charité-sur-Loire, en Bourgogne.

Fort-Épice est l'un de ces Écorcheurs qui, entre deux batailles de la guerre de Cent Ans, se retrouvent oisifs et en profitent pour battre la campagne à la recherche de châteaux à prendre et de villageois à rançonner.

Leurs ennemis, les Bourguignons (alliés des Anglais), sont leurs cibles favorites. Chouette époque !

Était-il originaire d’Espailly, près du Puy-en-Velay, ça, on ne sait pas. Des origines sombres comme la nuit et la désolation des guerres médiévales…

Bah ! En tous cas, tout mercenaire qu’il était, monsieur est aussi bailli de Melun et porte le titre ronflant « d’écuyer d’écurie du roi. »

« C’était un homme comme on en voit surgir dans toutes les guerres de partisans, brave jusqu’à la témérité, ne connaissant aucun obstacle et toujours prêt à tenter un coup de main lorsqu’il en espérait quelque profit sérieux. »

Rien que son nom semait une panique monstre, partout où il allait...

Les remparts

Les remparts | ©Christophe.Finot / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

La prise d'Avallon

Le « mardi avant Noël » 1432, lui et ses hommes s’emparent d’Avallon, à l’aide d’échelles. Dans la stupeur générale !

Malgré la puissance des tous nouveaux remparts, et la vigilance du guetteur de nuit. Incroyable !

Ils restent là malgré les protestations des habitants. D’Avallon, ils partent faire leurs raids sanglants dans la région.

Sauf que le bruit qu’une de ces cités a été assiégée arrive aux oreilles du duc Philippe : on le supplie d’aller bouter Fort-Épice, hors de son duché…

Il quitte sa Flandre pour venir en personne à Avallon. Le siège d’Avallon par Philippe le Bon commence en septembre 1433.

La bombarde à la rescousse !

Fort-Épice a près de 200 hommes sous ses ordres, « la fleur des gens d’armes, roides et instruits de la guerre, qui moult vaillamment se défendirent » contre les armées de Philippe, qui met le siège pour 6 longues semaines.

D’abord, c’est la victoire : Espailly parvient à les repousser. Mais bientôt, les puissantes machines de guerre bourguignonnes déboulent.

On fait carrément venir « la grosse et fameuse bombarde de Bourgogne, qui lançait des boulets de pierre de huit à neuf cents livres. »

Il a fallu, par des routes défoncées, amener la bête : elle met 15 jours pour venir de Dijon, voyage de jour et de nuit ! Il faut 4 jours entiers pour la monter.

Fuir !

Les soldats, eux n’arrivent pas à entrer dans Avallon, malgré les échelles.

La bombarde finit par crever un pan de muraille. Les soldats du duc hurlent « Aux armes » et entrent dans la brèche.

Le carnage est colossal, du côté des assiégeants, en tous cas. Dans Avallon, on se défend sans peine.

Le duc finit par sonner la retraite. Aaaah, l’échec cuisant !

Néanmoins, la bombarde avait impressionné Fort-Épice, qui au petit matin se tire en douce avec ses hommes, par la Petite-Porte.

Le bruit des sabots des montures réveille l’ennemi, qui empêche les fuyards de filer.

On se bat, on compte les morts dans les deux camps. On fait des prisonniers, parmi lesquels l’épouse de Fort-Épice. On les libère contre la remise de villes bourguignonnes.

Le dernier bal

Mais le capitaine avait de la fuite dans les idées, on vient de le voir.

Il a filé à l’anglaise une fois, vous croyez qu’il n’allait pas remettre le couvert ?

Si ! Il sent le vent tourner, et la situation sentir le roussi ! Alors, il donne un bal, un soir.

Il se montre goujat avec les dames, insolent avec les hommes, avant de quitter la fête en douce, passant par une porte dérobée.

Il ne quitte pas que la fête : il laisse Avallon derrière lui, ce qui permet, le lendemain, aux Bourguignons de donner l’ultime assaut, la nuit du 16 au 17 octobre 1433...

Quant à notre Fort-Épice, il disparait de la circulation, pour de bon.

Source

  • Ernest Petit. Avallon et l'Avallonnais, étude historique. 1867.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !