Une des tours des remparts s’appelle tour Perrinet Gressart.
Du nom d’un terrible homme de guerre, qui fait régner la terreur à La Charité et ses environs, pendant la guerre de Cent Ans...
Courageux, violent, sans scrupules, c’est lui qui met une raclée à Jeanne d’Arc, quand elle débarque pour libérer La Charité, le 24 novembre 1429 !
La Charité, point stratégique !
Perrinet Gressart s’installe à La Charité-sur-Loire, en 1423.
La Charité, pendant la guerre de Cent Ans, c’est un point stratégique : la frontière entre le Berry fidèle à Charles VII, et la Bourgogne du duc Philippe le Bon, alliée aux Anglais.
La voilà maintenant place forte militaire, aux mains d’une bande de mercenaires patibulaires enrichis grâce aux pillages et aux rançons.
Des hommes cruels, assoiffés d'or facilement gagné, qu'ils obtiennent en violant et en tuant...
Qui est Perrinet Gressart ?
Gressart vient d'un milieu très modeste : on dit cet apprenti maçon originaire du Poitou ou de Picardie.
Mais la truelle, Perrinet la laisse tomber, pour intégrer une bande d'aventuriers à la solde du duc de Bourgogne, allié des Anglais.
Après son installation à La Charité en 1423, il épouse moins d'un an après Huguette de Corvol : chouette mariage, avec une dame de la bonne noblesse de la Nièvre !
Il profite même de cette jolie ascension sociale pour marier sa nièce Étiennette à François de Surienne (un aventurier comme Perrinet), auteur du terrible siège de Fougères.
Gressart pille tout le Berry et la Nièvre... non pas au nom du duc de Bourgogne ou du roi anglais, non, pour son propre compte !
Gressart, le roi de La Charité !
À La Charité, Perrinet fait fortifier et agrandir la cité. Comme un roi sur ses terres, il fait ce qu’il veut !
Censé diriger la ville pour le duc de Bourgogne et recevoir un salaire en conséquence, Perrinet ne perçoit que des paiements tous les 36 du mois...
Le voilà donc obligé de trouver de l’argent par ses propres moyens.
Autrement dit, par la violence et la peur !
Il ose prendre en otage le conseiller du dauphin Charles, La Trémoille : il le libère contre 14 000 livres ! Humilié, La Trémoille a peut-être fait le siège de La Charité pour se venger, qui sait...
Le siège de La Charité
Vous voyez, il faut absolument reprendre La Charité, question de vie ou de mort !
Ce 24 novembre 1429, quand Jeanne d'Arc débarque, il n’y a pas un chat, dans les ruelles brumeuses de la cité bourguignonne. Un automne glacial comme il n'y en a pas eu depuis longtemps !
Les soldats, dans leur campement de fortune au pied des remparts, grelottent sous le crachin gelé.
Le siège s’annonce compliqué. Il flotte, on a de la boue jusqu'aux chevilles. Impossible de bien utiliser les grandes machines de guerre.
Un mois plus tard, pour Noël, on lève le siège : les puissants remparts de La Charité ont eu raison de La Pucelle...
Il faut attendre 1435 pour voir l’évacuation de Gressart de la ville, quand elle se fait reprendre par le roi de France, contre une rançon colossale.
Hop, retournement de veste : Perrinet passera alors dans le camp français !
Et Jeanne, dans tout ça ?
Après le délire de la libération d’Orléans, en mai 1429, Jeanne n'avait cessé de remporter des victoires face aux Anglais.
Victoires qui ouvraient la voie vers Reims pour le sacre de Charles VII, le 17 juillet 1429.
Sauf que là, la Pucelle se fait complètement écarter, après l'échec cuisant de La Charité.
D’autres combats et victoires suivent : restent à prendre Paris et le Nord, infestés d’Anglais.
Jeanne a envie de les mettre dehors, mais Charles VII, lui, veut la paix. Elle le gêne. Jeanne se retrouve seule, avec des armées amoindries.
Le début de ses malheurs : 5 mois plus tard, les Anglais la capturaient à Compiègne...
Sources
- Régine Pernoud. Jeanne d'Arc. Fayard, 2011.
- Joseph de Fréminville. Les écorcheurs en Bourgogne (1435-1445). 1888.
- Alain-Gilles Minella. Jeanne d'Arc pour les Nuls. Éditions First, 2012.