Après l'Auvergne, Paris !
5 avril 1606. Vous l’avez vue, cette grosse dondon qui trottine vers l’hôtel de Sens, plus large que haute ?
Vous ne la reconnaîtrez pas... c’est la reine Margot.
Et dire qu’il n’y a pas si longtemps de cela, les hommes se retournaient sur le passage de la belle déesse callipyge...
Bon, voilà : Marguerite de Valois loge dans l’hôtel de Sens, exilée par son ex mari Henri IV, depuis leur « divorce » en 1599.
L’ex-reine Margot...
Après avoir passé 20 ans à s’encroûter en exil en Auvergne, elle a été autorisée à revenir et à occuper provisoirement l’hôtel.
Et c'est le drame
Là, ce jour d’avril, elle revient de la messe aux Célestins (un couvent tout proche, entre Le Marais et la Bastille).
Sa voiture s’arrête devant la porte de l’hôtel.
Une voiture où caracole fièrement son amant, en tête. Un gamin... il a 18 ans, elle 52 !
Il s’appelle Gabriel Dat de Saint-Julien.
Mais alors qu’il la fait descendre, un type surgit de l’ombre : le comte de Vermont, 20 ans... ancien gigolo de Margot.
Il lui faut quelques secondes pour tuer Gabriel d’un coup de feu en pleine tête.
Les jeunots de Margot la chauve
Aah, elle fait la collection des petits jeunots, Margot.
Incompréhensible, elle, l'énorme Margot, la libidineuse qui fait de l’hôtel de Sens un lieu de débauches...
Elle est chauve et porte une perruque « d’un blond filasse blanchi sur l’herbe », dit Tallémant des Réaux.
« Pour cela, elle avait de grands valets de pieds blonds que l’on tondait de temps en temps. Elle avait toujours de ces cheveux-là dans sa poche, de peur d’en manquer. »
On dit même qu’elle gardait près d’elle une boîte, où elle mettait les cœurs embaumés de ses amants morts...
Oui, ses amants passaient tous l'arme à gauche : Gabriel Dat ici, Gabriel d'Aubiac en Auvergne, La Môle...
Aux premières loges
On arrête Vermont un peu plus tard.
Sitôt la nouvelle arrivée à ses esgourdes, Margot braille : « Qu’on le tue, ce vilain, tenez, voilà mes jarretières, qu’on l’étrangle !! »
La bougresse s’étouffe, puis se calme.
Remet sa moumoute droite sur sa tête et prend place sur le petit balcon de l’hôtel, qui domine la rue.
Pour assister à l’exécution de son ex, tranquillement, à l’endroit même où Gabriel est mort.
Le chroniqueur de l'époque, L'Estoile, rapporte qu'il fait le malin jusqu'au bout.
Il ne regrettait rien, puisqu'il a eu ce qu'il voulait, la mort de son rival !
Le lendemain, Margot quitte l’hôtel maudit et taché par le sang pour de bon.
Elle n’y était restée que 8 mois. Jurant de ne jamais y remettre les pieds...
Source
- François Caradec. Guide de Paris mystérieux. Éditions Tchou, 2011.