Trois générations de femmes au château de Saint-Saturnin, entre Médicis et Valois
Trois générations. Mère, fille, petite-fille. Trois grandes familles, entre Histoire de France et d'Italie : Médicis, La Tour d'Auvergne, Valois.
Saviez-vous que Saint-Saturnin a été le château de la famille de Catherine de Médicis ?
Oui : celle-ci est florentine par son père Laurent de Médicis, mais française par sa mère, Madeleine de La Tour d’Auvergne !
Madeleine de La Tour d’Auvergne
Un fabuleux et prestigieux Médicis sur le point d’épouser une Française ? Oui, en mai 1518, à Amboise !
L'épouse d'un Médicis
Le pape Léon X organise le mariage de son neveu Laurent II de Médicis, 26 ans, petit-fils du célèbre Laurent le Magnifique, avec une Française de 20 ans, Madeleine de La Tour d'Auvergne.
Par sa mère, Jeanne de Bourbon-Vendôme, cette jeune princesse descend du roi saint Louis.
Voilà une union hautement diplomatique, entre France et Rome : le roi de France François Ier pourra notamment se rapprocher de la papauté, précieux lien contre son grand ennemi, le Saint-Empire germanique de Charles Quint.
Le couple laisse une orpheline
Le couple franco-italien ne devait pas vivre très longtemps...
La syphilis, qui faisait des ravages en Europe dès la fin du 15e siècle, a rapidement raison de Laurent, qui meurt le 4 mai 1519 ; Madeleine était morte le 28 avril, des suites de l'accouchement de leur fille unique, Catarina.
Catherine, qui à trois semaines, se retrouve orpheline.
La future Catherine de Médicis, régente de France et mère de trois rois de France, en plein sang des guerres de Religion !
Catherine de Médicis et Saint-Saturnin
À la mort de leur père, Jean de La Tour d'Auvergne, Madeleine et sa sœur Anne avaient reçu leurs héritages, au château de Saint-Saturnin, le 22 avril 1518.
Madeleine et son fiancé italien, Laurent de Médicis, reçoivent ainsi les villes et châteaux de La Tour d'Auvergne et de Saint-Saturnin, parmi d’autres fiefs auvergnats.
La voilà, entre autres titres, qui devenait comtesse de La Tour d'Auvergne ! Titre dont héritera sa fille Catherine.
Car Madeleine morte en 1519, sa sœur Anne et son mari disparus à leur tour en 1524, il n'y avait que la petite Catarina, pour unique héritière des terres auvergnates des La Tour d'Auvergne : notamment celle de Saint-Saturnin.
La reine Margot hérite (tant bien que mal) de Saint-Saturnin
À son tour, la fille de Catherine, Marguerite de Valois (dite Margot), recevait le château de Saint-Saturnin.
Catherine le lui avait légué sur son testament. Enfin… au départ !
Catherine le modifie finalement, cédant Saint-Saturnin à son petit-fils Charles : le fils naturel de son fils Charles IX et de sa maîtresse Marie Touchet.
Catherine meurt en 1589 : en 1606, un arrêt du Parlement de Paris rendra son bien à Margot. Celle-ci fait finalement don de Saint-Saturnin au dauphin, le futur Louis XIII, en 1609.
Petit détail : lorsque le cardinal de Richelieu décide de faire démolir toutes les vieilles forteresses du royaume de France, devenues inutiles, le château de Saint-Saturnin se fait épargner…
L'exil auvergnat de la reine Margot
La dernière grande propriétaire du château de Saint-Saturnin, c’est donc Marguerite de Valois, la reine Margot. Petite-fille de Madeleine de La Tour d’Auvergne !
Elle séjourne à Saint-Saturnin du 7 au 13 novembre 1587, avant de partir à 30 km de là, à Usson, pour un exil de presque 20 ans.
Car Margot s’est retrouvée exilée en Auvergne. Exilée par qui ? Par sa mère, de mèche avec le frère de Margot, le roi Henri III. Un frangin qui la hait tout autant qu’il maudit son mari, le futur Henri IV.
Elle a comploté, la vilaine ! Pour mettre son jeune frère, d’Alençon, sur le trône, à la place d’Henri III !
Elle est insupportable, Margot, il faut le dire : sa conduite déplacée affole la cour...
Alors voilà : Margot doit partir 20 ans en exil, aux quatre coins de l’Auvergne : Besse, Issoire, Saint-Saturnin, Usson...
En 1596, c’est au château de Saint-Saturnin que la tradition dit que Margot apprend la mort de son amant, le beau Gabriel d’Aubiac. Dans des conditions terribles : Henri III fait arrêter l’amant de Margot qui se trouve à Aigueperse. Par vengeance ?
Et sur une potence que ses hommes ont dressée sur la place de la ville, on le pend par les pieds. La tête en bas, la mort arrive... et sous son crâne, une fosse fraîchement creusée… pour l’y enterrer encore vivant.
Brantôme écrit dans ses Mémoires :
« Avant son exécution, au lieu de se souvenir de son âme, il baisait un manchon de velours, le seul gage qui lui restait des bienfaits de sa dame. »
Margot, terrassée, composera un poème à Usson, qui se termine par :
« Cet amant de mon cœur, qu’une éternelle absence Éloigne de mes yeux, non de ma souvenance, A tiré quant et soi, sans espoir de retour, Ce que j’avais d’amour. »
Sources
- Annette Pourrat. Guide de l'Auvergne mystérieuse. Éditions Tchou, 1969.
- J.-B. Bouillet. Tablettes historiques de l'Auvergne (tome 5). 1844.
- Alain et Élisabeth Tourreau. Le pays de Saint-Saturnin. Éditions Créer, 2000.