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La place de Grève : une célèbre expression, un rafiot insubmersible et des marchands d’eau

L'Hôtel de Ville et la place de Grève (J-B Raguenet, 1753) | O.Taris / Public domain
Hôtel de ville Hôtel de ville de Paris

Une grève et son port marchand

Paris, un jour d’automne médiéval...

L’ombre des maisons flotte dans une brume humide. Une barque fend l’eau sombre ; deux hommes rament, s’apprêtant à retrouver la terre ferme. Ils doivent bien sentir qu’un grain approche...

Car on est au plus profond de l’automne. Les averses se succèdent, diminuent, reprennent de plus belle.

Le vent apporte des odeurs animales. Sauvages. La Seine couleur d’huître a une haleine aux relents de terre et de poiscailles.

Et puis...

Les tanneurs étendent leurs peaux puantes le long de l’eau.

Des gars ivres morts se battent dans la boue laissée par la dernière crue.

Et les « marchands d’eau », les Nautes, s’activent. Déchargent en gueulant les tonneaux de vin...

Voilà le portrait des abords de la place de Grève, actuelle place de l’Hôtel-de-Ville.

Une grève, c’est un banc de sable pierreux au bord d’un cours d’eau ou de la mer.

Et c’est ce que l’on trouvait à cet endroit, au début ! Rien d'autre.

Mais elle abritera le port marchand le plus important de Paris et le futur hôtel-de-ville... avec à sa tête les puissants prévôts des marchands issus de ce port.

La grève pour attendre du boulot

Donc, pour l’instant, la place porte le nom de Grève (qu’elle garde jusqu’en 1803).

En 1141, Louis VII y fait aménager un port marchand : le plus grand de tout Paris. C’est là que se concentre toute l’animation !

C’est l’empire où règnent les « marchands d’eau », futurs prévôts des marchands. Les maires de Paris de l’époque, si vous voulez.

C’est là aussi que les gens sans travail « font la grève. »

Au début, l’expression veut dire que les gens s’agglutinent sur la place en attendant l’embauche pour aider au déchargement des bateaux.

L'expression se transforme au fil du temps pour devenir la grève que l’on connaît bien...

Fluctuat nec mergitur et marchands d'eau

Les prévôts tout-puissants

En 1246, saint Louis confie la gestion de Paris au chef des « marchands d’eau », qui règnent sur le port de la ville et son commerce fluvial : le prévôt des marchands, l’équivalent du maire actuel.

Des marchands d’eau ? Les « descendants » des Nautes, la confrérie commerçant sur la Seine à l’époque gallo-romaine.

D’où le blason et la devise latine adoptés par la ville de Paris. Vous savez ?

Celui avec le bateau (on dit une « nef ») : Fluctuat nec mergitur, « il flotte mais ne sombre pas » !

Le plus célèbre de ces prévôts ? Vous le connaissez, il a sa station de métro près des Halles... Étienne Marcel !

Et le dernier prévôt de l’Histoire ? Ah oui, tristement célèbre, puisque l'une des premières victimes de la Révolution française : Jacques de Flesselles.

Avant de se faire remplacer par le tout premier maire de l’histoire de la ville, Jean-Sylvain Bailly. Lui aussi connaît un destin tragique.

Mais ça, c’est une autre histoire !

Des Bourgeois aux Piliers

On appelle la première maison municipale « Parloir aux Bourgeois. »

Elle se trouvait à côté de l’église Saint-Leufroy : celle-ci a disparu depuis longtemps, mais elle se situait près de l’actuelle place du Châtelet.

À partir de 1357, le prévôt Étienne Marcel établit la maison place de Grève : c’est la Maison-aux-Piliers... l’hôtel-de-ville actuel.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !