La découverte du premier squelette quasi complet d'un homme de Néandertal, et de sa sépulture, ont fait entrer cette petite commune corrézienne dans l'Histoire.
Un squelette devenu l’exemplaire de référence du type néandertalien !
Trois hommes, deux découvertes
3 août 1908. Les trois frères Bouyssonie, Amédée, Jean et Paul, découvrent le premier squelette quasi complet d’un homme de Néandertal, ainsi qu’une de ses premières sépultures… le tout daté de 50 000 ans.
Ces précieuses trouvailles ont été découvertes dans la petite grotte dite bouffia Bonneval, près de la Chapelle-aux-Saints, en Corrèze.
Pour rappel, le premier Néandertal a été mis au jour en Allemagne dans la vallée qui lui a donné son nom, en 1856.
Suit un squelette 30 ans plus tard, à Spy en Belgique, puis en 1908 avec celui de la Chapelle-aux-Saints.
Chainon manquant ?
Les restes sont confiés à Marcellin Boulle, professeur de paléontologie (à l’origine géologue) au Muséum d’Histoire naturel de Paris.
Pour lui, l’homme de la Chapelle-aux-Saints ne peut être que le chaînon manquant, un intermédiaire mal dégrossi entre l’homme et le singe.
Il le décrit dans la toute première publication sur l’homme de Néandertal, en 1911, comme un genre de gorille, dos voûté, jambes fléchies.
On sait aujourd’hui que l’homme de Néandertal ressemble à tout, sauf à cela !
À l'image de l'homme...
Deux des trois découvreurs de l'homme, Jean et Amédée Bouyssonie, sont abbés, imaginez le scandale parmi l’Église catholique !
Car, en ce début de 20e siècle, on est encore attaché à la vision de la Bible, qui dit que l’Homme a été créé à l’image de Dieu.
Telles sont les origines de l’Homme. Point, pas de singe hirsute là-dedans !
Alors, deux religieux évolutionnistes qui publient des articles dans la presse catholique pour parler de préhistoire, ça fait causer !
« N'est-il pas infiniment plus honorable de descendre d'un singe perfectionné que d'un ange déchu ? » clame d’ailleurs Marcellin Boulle, à la une du Matin du 26 décembre 1908.
L'homme de la Chapelle-aux-Saints
L’homme de la Chapelle-aux-Saints est surnommé « le vieillard. »
En effet, des analyses réalisées dans les années 80 mettent en évidence un sujet relativement âgé (une cinquantaine d’années, un âge canonique pour l’époque), avec une hanche déformée (qui le faisait boiter) et une arthrite dans les vertèbres cervicales.
Il a perdu la plupart de ses dents, en particulier les molaires.
Il devait probablement donc compter sur les siens pour se déplacer et croquer un bout.
La sépulture : Néandertal enterre ses morts !
Le squelette est retrouvé en position fœtale, dans une fosse de 1,40 sur 0,85 mètres et environ 30 cm de profondeur.
Une fosse. Oui. Une tombe ! Et c’est ce qui est incroyable !
Il semble que Néandertal, que l’on prend alors pour un homme-singe plus bête qu’humain, enterre les siens !
La découverte de cette sépulture remet sur le tapis le débat sur l’humanité des Néandertaliens : Homo sapiens n’était pas le seul à inhumer ses morts.
Des études réalisées plus tard dans la grotte corrézienne permettront de dire que l’inhumation a été volontaire.
Aaaah... le débat fait rage, depuis la découverte de la tombe de la Chapelle-aux-Saints : des dizaines de squelettes de Néandertaliens ont été également mis au jour en Eurasie, au 20e siècle.
Mais ces découvertes, comme celle de la Chapelle-aux-Saints, ont longtemps laissé sceptiques les experts.
La raison ? Les fouilles sont trop anciennes, réalisées dans des conditions peu optimales, avec des méthodes inadaptées.
Jusqu’à d’autres découvertes plus récentes :
- en 1973, on retrouve les restes d’un enfant néandertalien de 2 ans, mort il y a 41 000 ans, inhumé par les siens sur le site de la Ferrassie, en Dordogne.
- En 2019, un homme vieux de 70 000 ans est retrouvé dans une tombe « fleurie », dans la grotte de Shanidar, en Irak. Fleurie, car ses proches ont pratiqué des rites funéraires à l’aide de fleurs...
Après toutes ces découvertes et recherches, les scientifiques pouvaient enfin affirmer que l’homme de Néandertal inhumait ses morts.
Quid de la Chapelle-aux-Saints ? De nouveaux examens plus récents (étude de 2013, Evidence supporting an intentional Neandertal burial at La Chapelle-aux-Saints) permettent d’affirmer la présence d’une sépulture néandertalienne.
Débat clos ! La preuve la plus flagrante ? Les os ont été épargnés par les intempéries (lissés avec le temps) et par les charognards (pas de fissures dues à des coups de crocs), grâce à un enfouissement rapide.
Le musée de la Chapelle-aux-Saints
La réplique exacte du squelette de l’homme de la bouffia Bonneval est exposée au musée de la Chapelle-aux-Saints, mais l’original se trouve conservé au musée de l’Homme, à Paris.
Ouvert en 1996, le musée corrézien vous permettra de tout découvrir de la vie quotidienne de Néandertal !
La bouffia Bonneval, elle, ne se visite qu'à de rares occasions (journées du Patrimoine).
Vous pouvez aussi en savoir plus sur Néandertal, avec Anecdotrip, ça se passe ici.