Louis XV ? Seul roi de France né et mort à Versailles à mourir de la petite vérole, à 64 ans.
Le 10 mai 1774, à 15h15, sur le balcon de la chambre nichée au cœur des petits appartements, la flamme fragile de la bougie symbolisant la santé de Louis XV vient de s’éteindre...
Au fait, saviez-vous que Louis est mort étouffé ?
1 - On tombe malade et on meurt à Versailles, point !
28 avril 1774. Le roi se repose dans l’intimité feutrée du Petit Trianon, à Versailles, quand il tombe malade. Mal partout. Mal à la gorge et à la tête...
C'est la variole !
Mais l’étiquette veut que l’on ne tombe pas patraque hors du château de Versailles... « Sire, c’est à Versailles qu’il faut être malade », lui dit-on.
Louis refuse qu’on le bouge du Trianon.
Sauf que, roi ou pas, vous avez entendu, l’étiquette est formelle : on le met dans une voiture qui file au château...
2 - Comment le roi attrape la vérole (la légende s'en mêle)
Étrange ! En 1774, aucune épidémie de variole n’est signalée à Versailles et Paris. Alors, comment Louis attrape-t-il la maladie ?
La légende raconte que le roi, en pleine partie de chasse, tombe sur le convoi funèbre d'une femme morte de variole. Contagion ? Peu probable, quand on sait qu'un roi ne devait jamais approcher un cadavre.
On parle aussi du côté coureur de jupons de Louis, qui passe une nuit de débauche avec une jeune fille de 14 ans, atteinte de variole.
Une nuit et 36 galipettes plus tard, la petite avait refilé ses miasmes au roi...
3 - Louis XV meurt étouffé
29 avril 1774. Voilà un jour que le roi s’est couché.
Le lendemain au soir, on aperçoit les premières rougeurs sur son corps. Mince... la variole. La petite vérole.
Attention, maladie très contagieuse ! Il suffit de sécrétions respiratoires ou de contact avec les lésions cutanées, pour contracter la chose.
Cela commence par de terribles maux de tête, de dos. Une fièvre violente. Puis des plaques rouges sur tout le corps.
D’ignobles taches pleines de pus qui donnent des croûtes contagieuses. À la fin, la mort, inévitable...
Oui, mais avant : l'agonie. Et autant vous dire que les derniers moments de Louis sont un cauchemar.
Imaginez une peau boursouflée, couverte de pustules rouges qui colonisent tout. Oui, tout. Les muqueuses des yeux, les poumons, le fondement, et pour finir, la gorge et la bouche, empêchant toute déglutition.
Votre corps, à la fin, n’est plus qu’une grosse croûte suintante et douloureuse.
Vous êtes monstrueusement défiguré.
Et surtout, vous allez mourir suffoqué.
Avec une salive âcre. Une haleine fétide. Des muqueuses purulentes et puantes. Votre gorge est en feu, un désert où l'air et l'eau ne passent plus. La mort, vous l'attendez impatiemment...
Ajoutez à ce cauchemar des médecins qui ne font que badigeonner vos pustules à vif de vinaigre et d’alcool !
Voilà : vous savez maintenant comment Louis XV est mort étouffé...
4 - Les derniers mots du roi
On lui demande : « Votre majesté souffre-t-elle encore beaucoup ? »
Louis répond dans un râle : « Ah... oui... beaucoup... »
5 - Louis XV, seul roi de France à ne pas se faire embaumer
D’habitude, on embaume les rois de France.
Louis XV est le seul à ne pas avoir reçu cet honneur ! À cause de la variole et des risques de contagions post-mortem. Pas d'autopsie non plus.
Son corps a seulement été enveloppé de linges aromatisés et enfermé dans deux cercueils de plomb, remplis de son.
Le corps se décompose si vite que l’on ne peut faire le partage des organes, la Dilaceratio corporis.
Une vieille tradition royale née avec la mort de Philippe le Hardi, où l'on sépare os, cœur et entrailles, que l'on inhume aux 4 coins de la France.
Le corps du roi ne reste pas longtemps exposé dans sa chambre, à Versailles. À 20 heures, il quitte le château pour la nécropole royale de Saint-Denis...
Sur quoi il faut vite désinfecter les lieux pour chasser les miasmes de la variole.
6 - 1793, où l'on apprend que Louis XV a des fesses rouges
Nous voilà arrivés en 1793, pendant les profanations révolutionnaires de Saint-Denis : figurez-vous que l'on ouvre le tombeau de Louis XV.
Oui. Et on trouve un corps nageant dans une eau immonde.
Eurk ! Le corps, non embaumé, avait été couvert de beaucoup de sel de mer, pour retarder la putréfaction : l’eau venait de la dissolution du sel !
Les écrits mentionnent une peau blanche, un nez violet, des fesses rouges comme celles d’un nouveau-né ! Bizarre, d’autres disent que le corps, marinant dans la saumure, est informe...
Ça cocotte sec, vous imaginez. À tel point que l'on doit brûler de la poudre à canon et tirer des coups de fusil, pour purifier l’air...
7 - Pourquoi les Parisiens se font une fête de la mort du roi
À l’annonce de la mort de Louis, tout Paris fait la fête ! L’impopularité de Louis est si grande...
Louis le Bien-Aimé finit en Mal-Aimé. Les gens en ont ras la perruque des rois, de leurs histoires de fesses avec leurs favorites vulgaires, de leurs réformes, de leurs taxes monstrueuses.
En tous cas, il faut éviter les débordements : le cortège funèbre (en petit comité) est obligé de faire la route vers la basilique Saint-Denis de nuit, en contournant Paris !
8 - La phrase mythique du dauphin, futur Louis XVI
Immédiatement après l’annonce de la mort de Louis XV, une flopée de courtisans se rue dans les appartements du dauphin et de sa moitié, Marie-Antoinette.
Ça y est, petit dauphin devient Louis XVI !
C’est là que celui-ci soupire le célèbre : « Mon Dieu, protégez-nous, nous régnons trop jeune ! »
Sources
- Stanis Perez. La mort des rois. Éditions Millon, 2006.
- Patrick Pelloux. On ne meurt qu'une fois et c'est pour si longtemps. Robert Laffont, 2013.
- Jean-Jacques Aillagon. Versailles en 50 dates. Albin Michel, 2012.
- Pierre Darmon. La variole, les nobles et les princes : la petite vérole mortelle de Louis XV. Ed. Complexe, 1989.
- Collectif. Les tombes royales de Saint-Denis. 1872.