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Petite histoire du pont Notre-Dame en 7 anecdotes

Quand : 1406 - 1912

Le pont | Anecdotrip.com / CC-BY-NC-SA
Pont Pont Notre-Dame de Paris

1 - A l'origine...

A l'origine, le pont s'appelle pont de la planche de Mibrai (« pont du milieu du fleuve »).

Ce modeste passage en bois flanqué de moulins se fait emporter par une crue en 1406, puis remplacé en 1413 et 1499.

Le Journal de Paris rapporte que :

« Ce dit jour, le 31 mai 1413, le pont des Planches de Mibrai fut nommé le pont Notre-Dame ; et le nomma le roi de France Charles VI, et frappa de la trie sur le premier pieu et le duc de Guyenne, son fils, après lui, et le duc de Berry et de Bourgogne, et le sire de La Trémoille. Etait heure de 10 heures au matin. »

Hélas, pas de chance ! Les moulins s'écroulent peu après... Le nouveau pont de pierre date de 1500.

Pont Notre-Dame (N. Raguenet, 1751)

Pont Notre-Dame (N. Raguenet, 1751) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

2 - Le pont a eu sa pompe à eau

On installe sur le pont une pompe à eau dès 1676, pour alimenter les fontaines de la ville : elle y reste jusqu'en 1853.

Il s’agit de la célèbre pompe Notre-Dame, dont voici l’histoire !

La pompe Notre-Dame (L.-A. Melle, 1889)

La pompe Notre-Dame (L.-A. Melle, 1889) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

3 - Des maisons encombraient le pont

Oui, encombré !

Imaginez... Retour au Moyen-Age. De jolies petites maisons en briques et en pierres surmontent le pont Notre-Dame : on en compte une trentaine de chaque côté, toutes décorées de portraits de rois en médaillons...

C'est sur ces maisons qu'on procède aux premiers essais de numérotation des rues de la capitale !

Mais voilà : on finit enfin un jour par se rendre compte qu’asseoir des maisons sur un pont, c’est dangereux, qu'elles le déstabilisaient plus qu'autre chose... Du coup, hop, démolition, après un décret signé par le roi, en 1786…

La première numérotation des rues a eu lieu ici

Mais quid de ces numéros de rues ?

Le premier essai de numérotation a donc lieu ici, en 1512, pour les maisons construites sur le Petit-Pont ou le pont Notre-Dame :

« Chaque maison a une écriture sur son huis, faite en or et en azur, là où est écrit le nombre de icelle maison, c’est à savoir en comptant une, ij, iij, jusqu’à lxviij. »

Pourtant, cette numérotation reste provisoire : il faut attendre février 1805 pour voir l’apparition de la numérotation actuelle.

4 - L'enseigne de Gersaint, vous connaissez ?

Le pont Notre-Dame a toujours attiré les m’as-tu-vu et le gratin, du temps où les jolies boutiques s’alignaient sur les arches.

Avant leur démolition en 1786, en tous cas. Gersaint, un marchand d’art, y installe sa galerie de tableaux.

Il avait sa boutique d’art sur le Petit-Pont, mais ce pont brûle entièrement une nuit d’avril 1718… bref !

Il commande son enseigne à son ami le peintre Watteau, en 1720.

Le tableau, peint d’après nature, représente la galerie remplie de clients élégants : hé ! C’est la foule de l’époque, comme si on y était !

Vous sentez, cette odeur de parfum ? Du musc... et là, ces froissements de robes, les messes-basses de ce monsieur qui demandent le prix d’un tableau...

Dès que l’enseigne a été accrochée, le tout Paris se rue rien que pour la voir. On dit que pendant plusieurs jours, la foule bouche complètement le pont et empêche la circulation !...

Jusqu’à ce que le tableau se fasse décrocher, passe entre plusieurs mains, pour atterrir au milieu du 18e siècle au château de Charlottenburg à Berlin, chez Frédéric le Grand. Où il se trouve encore.

L'Enseigne de Gersaint (Watteau, 1720)

L'Enseigne de Gersaint (Watteau, 1720) | ©Art Gallery ErgsArt / Public domain

5 - Le pont de tous les grands évènements

Le pont Notre-Dame a vu passer du gratin !

Comme Charles IX, le 29 mars 1570, avec sa moitié fraîchement épousée, Elizabeth l’Autrichienne.

Ils reviennent de la basilique Saint-Denis où on les a sacrés roi et reine de France (youpi).

Le pont est tout tendu d’une draperie bleu sombre, irisée, toute piquée d’étoiles.

Ensuite, on a Henri IV qui entre dans Paris après la paix de Vervins, entre France et Espagne, pendant les guerres de Religion.

La foule se rue sur le pont. Le cheval d’Henri peut à peine bouger !

Son chroniqueur L’Estoile raconte dans son Journal :

« A l’entrée du Pont de Notre-Dame, il y avait un magnifique portail embelli de diverses figures, et des deux côtés de la rue régnaient 60 grandes figures d’hommes et de femmes, ayant les bras étendus l’un à l’autre et soutenant chacun deux armes de France, et sur leur tête un panier d’osier plein de toute sorte de fleurs et de fruits d’une excellente beauté. »

Alors, quand l’ambassadeur d’Espagne s’inquiète de la foule grandissante, Henri rigole et dit :

« Bah, ce n'est rien, ça. Vous verriez la foule le jour d’une bataille, il me presse bien davantage ! »
Démolition du pont Notre-Dame (E. Béjot)

Démolition du pont Notre-Dame (E. Béjot) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

6 - Ici, Javert s'est suicidé

C’est de ce pont que Javert, le célèbre inspecteur des Misérables de Victor Hugo, se suicide, en sautant dans la Seine :

« Ce pont de la Seine est redouté des mariniers. Rien n’est plus dangereux que ce rapide resserré à cette époque et irrité par les pilotis du moulin du pont aujourd’hui démoli. Les deux ponts si voisins l’un de l’autre augmentent le péril, l’eau se hâte formidablement sous les arches.
« Elle y roule de larges plis terribles, elle s’y accumule et s’y entasse, le flot fait effort aux piles des ponts comme pour les arracher avec de grosses cordes liquides.
« Les hommes qui tombent là ne reparaissent pas, les meilleurs nageurs s’y noient. »
Le pont en 1662

Le pont en 1662 | ©Rijksmuseum / CC0

7 - Le pont du Diable

On lui donne le surnom de pont du Diable. Pourquoi ? C’est un danger pour les bateaux, qui multiplient ici les accidents graves !

Le site des collections Paris Musées indique que « la pompe Notre-Dame obstrue 2 des 5 arches du pont : un déversoir pour la pêche barre la troisième, n'en laissant que deux pour la navigation. »

On a alors baptisé l’une d’elle l'arche du Diable...

La Cité : bulletin de la Société historique et archéologique du IVe arrondissement de Paris (7e année, n°26, avril 1908) rapporte qu’entre 1891 et avril 1906, une trentaine de bateaux, péniches et barques, avaient sombré sous le pont !

Sources

  • Ferdinand Heuzey. Curiosités de la Cité de Paris. 1864.
  • Blavignac. Histoire des enseignes d'hôtelleries, d'auberges et de cabarets. 1878.
  • Guillaume Glorieux. A l'enseigne de Gersaint, marchand d'art sur le pont Notre-Dame. Ed. Champ Vallon, 2016.
  • Le Roux de Lincy. Recherches historiques sur la chute et la reconstruction du pont Notre-Dame à Paris. 1845.
  • Tableau historique et pittoresque de Paris (tome 2). 1809.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !