11 anecdotes sur la jeunesse de Robespierre à Arras

De 1758 à 1789

RobespierreRobespierre | ©Rijksmuseum / CC0

Une enfance marquée par la mort de sa mère et le départ de son père, une jeunesse studieuse et solitaire dans les rues d’Arras...

1 - Il est né… hors mariage !

Allez, on vous présente les parents du futur homme de la Terreur !

  • Son père s’appelle Maximilien Barthélémy de Robespierre. C’est un avocat au conseil d’Artois, issu d’une longue lignée de gens de robe originaire de l’Artois.
  • Sa mère se nomme Jacqueline Marguerite Carraut : la fille d’un marchand brasseur du faubourg de Rouville, à Arras.

Maximilien Marie Isidore naît le 6 mai 1758.

Son parrain ? Il s’agit de son grand-père paternel, Maximilien de Robespierre !

Oh, mais, que je vous dise ! Le petit naît… hors mariage ! Impensable, à l’époque, un vrai scandale.

Vite, il faut remédier à cela ! Le couple se marie en urgence le 3 janvier 1758, Jacqueline alors enceinte de 5 mois.

Le livre Robespierre, portraits croisés de Philippe Bourdin et Michel Biard (2020) rapporte que les grands-parents paternels désapprouvent totalement ce mariage précipité : ils refusent d’assister à la cérémonie !

Brouille vite dissipée, puisque le grand-père acceptera d’être le parrain du bébé.

2 - Ses frères et sœurs

Maximilien est l’aîné d’une fratrie de cinq enfants. Les deux plus connus sont :

  • Augustin (né en 1763), qui lui aussi siégera à la Convention comme député de Paris, avant de monter à l’échafaud avec son célèbre frère, en 1794.
  • Charlotte (née en 1760), qui survit 40 ans à ses frères, puisqu’elle meurt... à 74 ans, en 1834.
Portrait présumé d'Augustin de Robespierre (Anonyme, 1790)Portrait présumé d'Augustin de Robespierre (Anonyme, 1790) | Portrait d'Augustin de Robespierre (Anonyme, 1790) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

3 - Sa maison à Arras existe toujours

Maximilien y vit entre 1787 et 1789, avec sa sœur Charlotte, avant son départ définitif pour la capitale.

Cette maison, construite en 1731, occupe à l’époque le n°5 de la rue des Rapporteurs, rebaptisée depuis rue Robespierre.

Le livre Danton et Robespierre de Loris Chavanette (2021) rapporte qu’il faut, pour y accéder, monter quelques marches, « car le sol est surélevé par rapport au niveau de la rue », sans doute à cause de l’humidité stagnante ou des inondations fréquentes.

A noter aussi, continue le livre, que la porte d’entrée, aujourd’hui sur le côté de la façade, se trouvait autrefois au milieu : hormis ce détail, la maison n’a pas bougé d’un poil !

La maisonLa maison | ©Patrick - Morio60 / Flickr / CC-BY-SA

4 - Premier choc : la mort de sa mère

Maximilien perd sa mère alors qu’il a 6 ans, des suites de l’accouchement de son 5e enfant, un bébé mort-né.

Il écrira :

« Ce souvenir est resté gravé dans mon cœur. Ma jeune intelligence avait déjà compris tout l’amour que ma mère nous avait voué et ce qui dévorait sa frêle existence. Je pleurai beaucoup. Je devinai ce que c’était que la mort. »

Sa sœur Charlotte ajoute :

« On ne peut se faire une idée de l’impression que produisit sur Maximilien la mort de nos parents. Un changement total s’opéra en lui. Auparavant il était, comme tous les enfants de son âge, étourdi, turbulent, léger ; mais dès qu’il se vit, pour ainsi dire, chef de la famille, il devint posé, raisonnable, laborieux. »

Puis :

« Maximilien ne pouvait, 20 ans plus tard, se rappeler sans émotion cette excellente mère. Et toutes les fois que, dans nos entretiens intimes, nous parlions d’elle, j’entendais sa voix s’altérer et je voyais ses yeux se mouiller. »

Charlotte RobespierreCharlotte Robespierre | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

5 - Second choc : son père quitte le foyer

Nouveau drame. Nouvelle disparition... le père quitte le foyer après la mort de sa femme !

Augustin et Maximilien sont pris en charge par le grand-père maternel, ses deux sœurs par une tante.

Inconsolable, rapporte Charlotte dans ses Mémoires, le père n’allait plus plaider, « tout entier au chagrin qui le consumait. »

L’argent ne rentrait plus : il emprunte à sa sœur et sa mère. Il finit par quitter la France, Charlotte dit qu’ils ne le revoient jamais.

Est-il en Amérique, dans les Antilles, comme l’a dit la rumeur ? On sait qu’en 1770, il est en Allemagne : il revient ensuite à Arras, puis repart.

La dernière fois qu’on le voit, c’est en 1772 : il est « maître des langues ». Il est enterré à Munich en 1777.

La maison : la façadeLa maison : la façade | ©Patrick - Morio60 / Flickr / CC-BY-SA

6 - Non, Robespierre n’est pas de la famille du régicide Damiens !

Des historiens, par le passé, ont prétendu que Maximilien était le neveu de celui qui a tenté d’assassiner Louis XV à Versailles, en 1757, François Damiens.

Selon eux, Damiens avait deux frères, Robert et Pierre. Un arrêt de la Cour les oblige, après l’attentat, à changer de nom.

Alors, ils unissent leurs deux prénoms, pour n’en former qu’un seul, Robertpierre. Qui, pour plus de facilité, devient Roberspierre, puis Robespierre.

C’est une légende ! On a bien dit, aussi, que l’arrière-grand-père de Robespierre était irlandais, de son vrai nom Robert’s Peter (Pierre fils de Robert)...

Portrait de Robespierre (Anonyme, 1790)Portrait de Robespierre (Anonyme, 1790) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

7 - Sa passion des oiseaux

Le petit Maximilien adore les oiseaux. Il passe sa jeunesse à Arras, quand il n’étudie pas, à en élever.

Ses préférés ? Les moineaux et les pigeons !

Sa sœur Charlotte racontera que, quand il quitte Arras pour Paris en 1770, il lui confie, le cœur gros, son pigeon chéri, avec de longues recommandations.

Mais un soir, elle oublie la cage dans le jardin : un orage éclate et le petit protégé succombe.

Ravagé de chagrin, l’enfant fait d’amers reproches à sa sœur. Et encore des années après, une fois adulte !

ArrasArras | ©Tama66 / Pixabay

8 - Ses études entre Arras et Paris

Robespierre fait des études au collège d’Arras, où il excelle, pris sous l’aile d’un ami de la famille, l’évêque d’Arras Mgr de Conzié.

Celui-ci le place d’abord comme enfant de chœur à la cathédrale, puis lui fait apprendre les bases du latin au collège de la ville. Un chanoine le décrit comme « un bon enfant ».

Ensuite, Maximilien ira à Paris en 1770 rejoindre le collège Louis-le-Grand, pour étudier le droit. Il y avait obtenu une bourse, grâce à l’évêque.

« Je quittai pour la première fois cette ville d’Arras si pleine pour moi de cruels souvenirs. J’arrivai à Paris. J’entrai au collège, non pas avec cette tristesse d’enfant gâté, qui pleure l’absence de sa mère, les contes de sa nourrice, et les jouets dont on a amusé ses premiers ans, mais avec une résolution d’homme que n’altèrent ni le regret du passé, ni la crainte de l’avenir. Qu’aurais-je regretté, moi, pauvre orphelin jeté à la pitié publique, arrivant au milieu d’enfants qui là au moins, étaient mes égaux, malgré les richesses, les honneurs, les charges qui les attendaient ? Qu’aurais-je craint, moi qui n’espérais d’avenir que dans l’éducation que j’allais recevoir ? »

Là-bas, l'adolescent est décrit par ses professeurs comme un « garçon méchant et sournois », avec « un caractère détestable et une envie démesurée de dominer » ! Ça promet...

Il y reste jusqu’en 1781. Hop ! Retour à Arras où, licencié en croit, il se fait inscrire au barreau de la ville et obtient un siège de juge à la Salle épiscopale.

Cathédrale d'ArrasCathédrale d'Arras | ©Chatsam / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

9 - Sa vie quotidienne à Arras

C’est Charlotte qui nous décrit, dans ses Mémoires, comment son frère aîné passe ses journées à Arras.

Levé à 6 ou 7 heures, il travaille jusqu’à 8 heures. Son perruquier vient le coiffer.

Sur quoi il déjeune sur le pouce (un laitage) et se remet au travail jusqu’à 10 heures. Il s’habille et se rend au palais pour plaider.

En fin d‘après-midi, il rentre dîner : « de l’eau rougie », un fruit dont il raffole (les oranges) et une tasse de café, dont il ne peut se passer.

Puis il se promène une heure, seul, avant de rentrer à la maison retrouver Augustin et Charlotte.

Il discute rarement avec les deux jeunes gens. Et si la conversation a le malheur de tourner autour de futilités :

« Il se retirait dans un coin de l’appartement, s’enfonçait dans un fauteuil et se livrait à ses réflexions comme s’il avait été seul. »

Puis il retourne travailler dans son cabinet, au premier étage de la maison, au coin de la rue des Rapporteurs.

RobespierreRobespierre | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

10 - L’affaire du paratonnerre de Saint-Omer

En 1783, « l’affaire du paratonnerre » éclate. Tous les bourgeois de Saint-Omer s’étaient soulevés contre le sieur de Vissery, un riche magistrat qui avait osé surmonter son toit d’un paratonnerre.

Un paratonnerre ? Et puis quoi encore ?! Oh, un bidule inventé il y a peu par Benjamin Franklin, donc peu fiable, dangereux même ! Il est forcé de le démonter, mais n’a pas dit son dernier mot !

Robespierre est chargé de défendre le paratonnerre. Qu’il sauve, en montrant son utilité contre la foudre !

Une plaidoirie qu’il publiera par la suite sous le titre de Plaidoyer pour un paratonnerre. Il en enverra même un exemplaire à Benjamin Franklin !

11 - Un surnom très... local !

On connaît tous le surnom d’Incorruptible donné à Robespierre. Mais connaissez-vous celui, plus improbable, de « Chandelle d’Arras » ?

Robespierre doit ce surnom peu flatteur et moqueur à un poème de 1765, signé l’abbé Dulaurens, intitulé La Chandelle d’Arras.

Il met en scène des moines et des bonnes sœurs ridicules et peu sympathiques...

Conclusion

« Cet homme ira loin, car il croit tout ce qu'il dit », dira Mirabeau de Maximilien.

En 1789, Robespierre quitte Arras. Définitivement.

Cap sur Paris : il devient député du tiers état pour l’Artois, aux États-Généraux de Versailles. Ce n’est que le début de son irrésistible ascension...

Sources

  • Maurice Graterolle. Robespierre. 1894.
  • Gustave Gautherot. La démocratie révolutionnaire. 1912.
  • Joël Schmidt. Robespierre. Éditions Gallimard, 2013.