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Saint-Just, l'Archange de la Révolution : une jeunesse orageuse à Blérancourt

Quand : 25 août 1767 - 1788

Saint-Just (anonyme, 18e s) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0
Maison Révolution Française Maison de Saint-Just

La célèbre figure de la Révolution française, Saint-Just, a passé sa jeunesse dans une maison picarde de Blérancourt, qui existe toujours.

Saint-Just en deux mots, pour commencer !

  • « Glaive vivant de la Révolution » (Taine), « Archange de la Révolution » (Michelet), « Monstre peigné » (Mignet)... Saint-Just, malgré sa carrière éclair, a déchaîné clichés, haines et légende noire.
  • Ami et bras droit de Robespierre, la lettre que Saint-Just lui adresse, en août 1790, est restée célèbre : « Vous, que je ne connais, comme Dieu, que par des merveilles, je m'adresse à vous... »
  • En 1792, il est élu député de l'Aisne à la Convention, dont il est le plus jeune membre, rejoignant les Montagnards. Il se dédie corps et âme à la Révolution.
  • Lors du procès de Louis XVI, pour qui il vote la mort, il révèle des talents d'orateur hors-pair, avec des phrases tranchantes : « On ne peut régner innocemment : tout roi est un rebelle et un usurpateur. »
  • Entré au Comité de salut public en 1793, il est partisan d'une société plus égalitaire, faisant voter la confiscation des biens des « ennemis de la Révolution », au profit des plus pauvres.
  • Envoyé sur les champs de bataille de Landau et Fleurus en 1793-94, il participe à la victoire des armées républicaines sur les forces coalisées.
  • Saint-Just est guillotiné à l'âge de 26 ans le 28 juillet 1794, un jour après l'exécution de Robespierre et de ses partisans.
Saint-Just (D. d'Angers, 19e s)

Saint-Just (D. d'Angers, 19e s) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

Une naissance... en Bourgogne

S'il passe sa jeunesse à Blérancourt, en Picardie, Louis Antoine Léon de Saint-Just naît à Decize, en Bourgogne, le 25 août 1767.

Baptisé en l'église Saint-Aré de la ville nivernaise, on le prénomme Louis comme son père, Antoine comme son parrain (qui est également son oncle maternel).

Son nom de famille

Son père s’appelle, de son nom de famille complet, Saint-Just de Richebourg. Est-il noble ? Y a-t-il particule, ou non ?

De Saint-Just

Une particule, un « de » qui précède un nom de famille, n’implique pas une quelconque noblesse.

Il est commun, pour des roturiers, de prendre le nom de la localité d'où venaient leurs ancêtres ; ainsi ont fait les Saint-Just.

Richebourg

Richebourg, c’est le nom d'un hameau proche du lieu de naissance du père du futur révolutionnaire, en Picardie.

Son paternel l’a adopté pour se distinguer de ses 9 frères et sœurs… à moins que ce ne soit pour en imposer au père de sa future épouse, qui ne voulait pas d'un militaire roturier de 50 ans passés, comme gendre !

Maison de Saint-Just, Blérancourt

Maison de Saint-Just, Blérancourt | ©Patrick - Morio60 / Flickr / CC-BY

Les parents de Saint-Just

Son père

Louis Jean de Saint-Just de Richebourg est écuyer, chevalier de l'ordre royal de Saint-Louis, capitaine de cavalerie.

Il vient d’une famille originaire de la région de Compiègne, entre Oise et Aisne, installée depuis le 17e siècle.

Les Saint-Just sont des « fermiers receveurs » : des paysans aisés exploitant les terres nobles et ecclésiastiques et percevant les droits féodaux.

Sa mère

Marie-Anne Robinot vient d'une famille de commerçants très respectée et bien en vue de Decize, de la petite bourgeoisie.

Son père y occupe le poste de notaire royal.

Le père de Saint-Just (anonyme, 18e s)

Le père de Saint-Just (anonyme, 18e s) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

Ses parents ont failli ne jamais se marier !

Le père de Marie-Anne n’accepte pas le mariage de sa fille, avec le père du futur révolutionnaire !

Il faut dire que le fiancé a 50 ans passés, il est militaire, alors que chez les Robinot, on compte plutôt des ecclésiastiques et des hommes de lois… Marie-Anne, elle, a la trentaine bien entamée. Bien tard, pour se marier, à l’époque !

La jeune femme, majeure, a pourtant le droit de convoler sans l’autorisation de son père.

C'est ce que la loi appelait sommation respectueuse : un acte judiciaire qu'un enfant majeur adressait à son père, lorsque celui-ci n'avait pas donné son consentement au mariage. Si refus il y avait, l'enfant pouvait passer outre et se marier.

C'est ce qui arrive à Marie-Anne ! Le mariage des futurs parents de Saint-Just est célébré quasi clandestinement, en 1766.

En l’absence remarquée du père Robinot !

Maison de Saint-Just, Blérancourt

Maison de Saint-Just, Blérancourt | ©Patrick - Morio60 / Flickr / CC-BY

L'installation des Saint-Just à Blérancourt

C'est après la naissance de Saint-Just que son père prend sa retraite, après 30 ans de service. Il désire quitter Decize, pour déménager dans sa région natale, en Picardie.

Ce sera Blérancourt, dans l'Aisne ! La famille, qui compte 3 enfants en tout, s'installe, en décembre 1776, dans cette maison achetée à un épicier.

Elle se compose d’une « cuisine, deux chambres à côté, vestibule, trois chambres à la gauche d'icelui, grenier au-dessus, pavillons servant de grange, deux caves... » avec un jardin couvert d'arbres fruitiers.

C'est cette maison qui se dresse toujours, malgré les bombardements de la Première Guerre, sa transformation en garage, et l'incendie qui a détruit la charpente et le toit d'origine.

Saint-Just (anonyme, 1792)

Saint-Just (anonyme, 1792) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

Un jeune orphelin de père

Le père de Saint-Just, 63 ans, meurt début septembre 1777 : son fils venait seulement de fêter son 10e anniversaire !

Son épouse, 43 ans, reste dans la maison de Blérancourt avec ses 3 enfants.

Privée d’un père, d’un mari, la famille mène en tous cas, financièrement parlant, un train de vie tout à fait correct, bénéficiant des biens du défunt mari et de ceux hérités du père de Marie-Anne.

Le drame qui précipite le départ de Saint-Just de Blérancourt pour Paris

Saint-Just a le cœur brisé !

En 1779, Saint-Just a 12 ans. Sa mère l'envoie étudier au collège de Soissons.

Quand il revient à Blérancourt en juillet 1786, retrouver sa mère et ses deux sœurs, il n'a pas encore 19 ans. Il rentre... pour avoir le cœur brisé !

Saint-Just découvre que celle qu'il aime depuis toujours, qu’il courtise depuis plusieurs années, à Blérancourt, venait d'épouser... un jeune notaire du village.

Louise Thérèse Gellé, c'est son nom, fille d'un riche notable ! Peut-être le seul amour de sa courte vie ! Mais que voulez-vous ? Les deux seules familles de notables du village unies, quoi de plus logique ?

Saint-Just, de par ses origines roturières, n'avait aucune chance. Il est terriblement blessé...

Une dispute, dans la nuit noire...

Une violente dispute avec sa mère (à cause de cet amour déçu ?) le fait brusquement quitter Blérancourt pour Paris, la nuit du 8 au 9 septembre 1786.

Saint-Just emporte avec lui de l'argenterie, quelques bijoux et les pistolets de son père. Il compte bien les vendre, l'argent obtenu lui permettrait de vivre un temps, à la capitale...

Mais pendant ce temps, sa mère avait demandé, via le parrain d'une de ses filles (un militaire), de faire arrêter son fils, afin de « ne plus l'exposer à agir aussi mal et lui donner le temps de se repentir de sa faute. »

On envoie Saint-Just croupir 6 mois dans la « maison de force » de Picpus, à Paris.

La suite (avec un rebondissement inattendu pour la fin)

Devenu clerc de notaire auprès d’un procureur de Soissons, inscrit à la faculté de droit de Reims, Saint-Just retourne chez lui à Blérancourt en 1788, qu’il quittera définitivement en septembre 1792, pour Paris.

La suite ? Une ascension fulgurante, avant sa chute tragique en 1794, à l’âge de 26 ans.

Oh, mais attendez ! Vous vous rappelez Louise Thérèse Gellé, l’amour de toujours de Saint-Just ?

Mariée à un notable, un peu de force, la jeune femme finit par quitter le domicile conjugal de Blérancourt pour retrouver Saint-Just, à Paris, fin juillet 1793 !

Les mauvaises langues clameront que Saint-Just l’avait enlevée...

Sources

  • Bernard Vinot. Saint-Just. Fayard 2014.
  • Antoine Boulant. Saint-Just : l'archange de la Révolution. Passés Composés, 2020.
  • Claude Manceron. Dictionnaire bibliographique de la Révolution française. Renaudot, 1989.
  • Yves Michalon. La passion selon Saint-Just. Albin Michel, 1981.
  • Bernard Vinot. Les origines familiales de Saint Just et son environnement social. Annales historiques de la Révolution française (n°248, 1982).
  • Maurice Dommanget. Du nom et des prénoms de Saint-Just et de leurs modifications. Annales historiques de la Révolution française (n°173, 1963).
  • Marie Lenéru. Saint-Just. Grasset, 1922.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !