Un pont...
6 arches, 500 m de long : l'un des plus beaux ponts de France, car très ancien et très bien conservé !
Ce pont gothique sur le Tarn, c'est le pape Urbain V qui a la bonne idée de le construire. Pourquoi faire ?
À la base, il sert aux pèlerins pour accéder au sanctuaire dédié à la Vierge, à Quézac, « pour éviter aux fidèles le passage à gué de la rivière », nous dit Édouard-Alfred Martel dans Les Cévennes et la région des Causses.
Mais que faisait un pape à Quézac ?
Disons qu'Urbain V, de son vrai nom Guillaume de Grimoard, vient d'un petit village de Lozère, Grizac, où il est né en 1309.
Élu pape en 1362, il est aussi comte et seigneur du Gévaudan ! Autant dire que la région lui tient à cœur...
Il fait construire ce pont mais aussi commencer la cathédrale de Mende, construire la collégiale de Saint-Flour...
Le pont se fait ruiner pendant les guerres de Religion : l'évêque de Mende monseigneur de Marcillac le fait reconstruire à l'identique au début du 17e siècle.
... et son église
On découvre une statue de la Vierge à Quézac en 1050. Les pèlerins arrivent nombreux !
Une église se construit alors à l'endroit où l'on a trouvé la statue, dès 1052, sur ordre de l'évêque de Mende.
Pourtant l'église actuelle n'a été consacrée qu'au tout début du 14e siècle...
Urbain V l'érige en collégiale avec 8 chanoines, en 1365 : un pape qui, on l'a vu, fait aussi construire le pont à la même époque, pour faciliter la venue des pèlerins...
Tenez : à l'intérieur de l'église, on peut voir des clefs de voûtes et des chapiteaux portant les armes du pape Urbain !
Pendant les guerres de Religion, les massacres et les pillages se succèdent dans la région.
À Quézac, on invoque la Vierge pour se protéger.
Mieux, on la porte en pèlerinage jusqu'à Ispagnac, la nuit tombée.
Quelle surprise, en allant la chercher le lendemain : elle n'est plus là !
On la retrouve bien à sa place dans l'église de Quézac...
Martel rapporte d'ailleurs à ce sujet dans Les Cévennes et la région des Causses :
« Selon la croyance populaire, la Vierge noire de Quézac ne veut pas quitter son village. Et chaque année, le jour de sa fête, quand on la conduit en procession, elle se fait si lourde, une fois parvenue au pont, que ses quatre ou six robustes porteurs renoncent à avancer et rebroussent chemin vers l'église. »
Bon, ce n'est pas ce pèlerinage qui va protéger de quoi que ce soit : en 1562, les troupes du baron d'Alais saccagent Quézac, son pont, son église, son château.
En 1580, voilà les hommes du capitaine Merle qui déferlent.
Même saccage... La Vierge est détruite.
On en refait une. En 1630, on vient prier pour la peste qui ravage la région.
Rebelote en 1721 : du coup, les habitants font le vœu de faire une procession chaque année, en l’honneur de la Vierge...
Un pèlerinage qui a encore lieu tous les ans, en septembre !
Source
- Édouard-Alfred Martel. Les Cévennes et la région des Causses. 1893.