Le fort Saint-André en 8 anecdotes

De 1292 à 1943

Le fortLe fort | ©Luu / CC-BY-SA

1 - Une ville neuve !

Philippe le Bel fonde la ville de Villeneuve-lès-Avignon en 1292 pour 3 raisons :

  • affirmer la puissance du royaume de France ;
  • concurrencer la puissante Avignon, de l’autre côté du fleuve ;
  • protéger la frontière avec le Saint-Empire Germanique.

C’est tout naturellement qu’on l’appelle Ville-Neuve.

Quid du « lès » ? C'est un mot de l’ancien français qui veut dire « près de ».

Pour encourager les gens à venir peupler ces rives du Rhône, le roi leur accorde des privilèges : exemption de péages et d’impôts !

L'entrée du fortL'entrée du fort | ©K.Weise / CC-BY-SA

2 - La princesse sur la montagne

Le fort se construit au 14e siècle sur le mythique mont Andaon, rocher dont l’histoire commence avec une pierre funéraire, celle de sainte Casarie, morte en 586.

Cette femme que la légende dit princesse wisigothe aurait tout abandonné pour vivre en ermite sur le mont...

3 - La tour Philippe-le-Bel

Cette tour est en fait un vestige du pont Saint-Benezet, le mythique pont d’Avignon !

En effet, il fut un temps où le pont reliait Avignon à Villeneuve-lès-Avignon, aboutissant au pied de la tour de Philippe le Bel.

Tour Philippe le BelTour Philippe le Bel | ©JChevall / CC-BY-SA

4 - Surveiller le Rhône

Le fort Saint-André sert de sentinelle pour surveiller le Rhône.

Oui, mais cette utilité va se perdre, pour deux raisons.

Et d’une en 1481, quand la Provence se fait rattacher à la France, et surtout en 1770, quand le Rhône déplace son lit à 900 mètres du mont !

5 - Des sorciers dans la tour ?

Une des tours porte le nom de tour des Masques, masco en provençal, qui signifie « sorcier ».

On enfermait ici non pas les sorcières, mais les protestants et les hérétiques pendant les guerres de Religion…

Le nom de sorcier fait plutôt référence au fait que le mauvais sort était attiré ici, pour protéger le reste du fort !

À remarquer le jeu de mérelle gravé au sol par un prisonnier : un jeu de pions à deux joueurs du 14e siècle, le but étant d’aligner des séries de 3 pions sur 24 points définis.

Tour des MasquesTour des Masques | ©Ben Bender / CC-BY-SA

6 - Les papes déménagent

Pour échapper à Avignon, devenue « le triste foyer de tous les vices, de toutes les calamités et de toutes les misères », « l’enfer des vivants, l’égout de la terre, la plus puante des villes » selon le poète Pétrarque, les papes alors résidant à Avignon décident de déménager à Villeneuve, entre 1305 et 1376.

Ils y ont de grandes et luxueuses propriétés avec jardins : celle d’Innocent VI, la chartreuse du Val-de-Bénédiction, se visite !

7 - Le viguier a sa salle

La salle du Viguier servait autrefois de siège de la cour de justice.

Elle tient son nom du viguier, nom de l’officier royal de justice dans le sud de la France.

Salle du ViguierSalle du Viguier | ©Velvet / CC-BY-SA

8 - Elsa Triolet, Aragon et les graffitis des amants

Elle, Elsa Triolet, la petite Russe déracinée, amoureuse de la culture française. Lui, l’amour de sa vie, Louis Aragon, le poète surréaliste.

Elsa, sa muse. Elsa la créatrice, l'intellectuelle, voyage à travers le monde. Et pose ses valises à Paris.

À Montparnasse, coup de foudre avec Aragon. Mariés en 1939, en plein chaos. Ils sont communistes, résistants. Il faut fuir Paris, aller vers le Sud.

Ils découvrent la belle Avignon, et Villeneuve aussi. Là, en visitant le fort Saint-André, Elsa découvre sur le mur de l'escalier à vis d’une des tours une inscription. Énigmatique. Courte.

« Elle est venue. Ils sont revenus, son cœur est toujours tremblant devant elle. »

Oh, des amants... ils sont venus ici, là même où Elsa, le souffle court, se tient.

En montant un peu plus, cette fois dans la salle du four à pain, elle découvre une nouvelle phrase, celle-là datée de 1937 :

« Il est vieux. Elle est belle. Ils sont venus. Reviendront-ils ? »

Elsa se sent chavirer par tant de mystère. Fascinée, elle va s’en inspirer pour écrire sa nouvelle Les Amants d’Avignon, publiée en 1943...

On dit qu’après la parution, un couple s’est manifesté, disant être l'auteur des graffitis. Mais Elsa ne les contactera jamais.

Sources

  • Bernard Sournia. Villeneuve-les-Avignon. Éditions du patrimoine, 2001.
  • Le document de visite délivré par le monument, édité par le Centre des Monuments Nationaux.