Une pieuse fondation
Nous voilà maintenant devant l'église de l'ancienne abbaye de Lesterps.
De style roman, elle a été restaurée avec une pierre claire du Limousin, et garde toujours fière allure, avec son clocher-porche massif (plus de 40 mètres de haut) !
On mentionne déjà au 10e siècle une petite chapelle cédée par le comte de Chabanais Jourdain Ier, pour y installer des moines.
L'abbé de Charroux, l'épouse Dia et les fils du seigneur Jourdain approuvent la fondation.
Une dizaine d'années après la création de l'abbaye, Gautier, fils d'un chevalier de Confolens et chanoine au Dorat (Auvergne), devient abbé de Lesterps et y instaure la règle de saint Augustin.
Deux hommes se font la guerre
Mais quelques années plus tard, le fils de Jourdain, Jourdain II, assiège l'abbaye.
Il s'y enferme autour de grandes murailles et rançonne la région.
Le comte de la Marche Adalbert finit par le chasser manu militari en 1040 : le monastère est alors saccagé et brûlé, l’église détruite.
Seule la base du clocher actuel reste debout !
Excédé, Gautier, qui avait trouvé refuge en Terre Sainte lors de l'assaut, revient et demande au Pape que les deux hommes restaurent l'abbaye et payent tous les frais.
Marché conclus ! Celui-ci oblige alors les deux belligérants à payer les restaurations.
La nouvelle église est enfin consacrée et le très saint Gautier meurt en 1070...
On l'ensevelit entre ces murs et l'église ne tarde pas à prendre le nom de Saint-Pierre-Saint-Gautier.
Après lui, l’abbé Rannulfe fait reconstruire l'abside, entre 1110 et 1140.
Le calme revenu, en somme ? Pas tout à fait...
Massacres et chaos
Pendant les guerres de Religion, des troupes protestantes faisant partie de l'armée d'un certain Campagnac, capitaine de l'amiral de Coligny, se dirigent au siège de Poitiers.
Le chemin est long ! Ils s'arrêtent à Lesterps en 1569.
Un acte de l'époque nous dit qu'
« une compagnie de la religion réformée, appelés Huguenots, étant au nombre de 800 à 1000 hommes environ, entrèrent dans la ville de Lesterps, logèrent et séjournèrent par 10 jours et cependant pillèrent et brûlèrent tout ce qu'ils trouvèrent. »
La ville et l'abbaye sont ravagées, les moines massacrés et torturés. Mais l'église résiste...
On rapporte qu'au moment de la restauration au 19e siècle, on retrouve de la cendre en couche épaisse sur ses voûtes ! Bref.
Au 17e siècle, l’abbaye tombe déjà en ruine.
Il faut dire que les dégâts des guerres de Religion n'ont toujours pas pu être réparés, à cause du manque d'argent !
Le chantier ne commence qu'en 1669.
L'abbé commendataire Charles-François de La Vieuville, évêque de Rennes et abbé de Saint-Laumer de Blois, y installe les chanoines réguliers de Sainte-Geneviève et fait restaurer les bâtiments conventuels.
Un siècle après pourtant, l'église tombe en ruine ; en 1815, le chœur tient encore debout ; les ruines vont être exploitées comme carrière de pierres...
Sources
- Société française d'archéologie. Congrès archéologique de France : Angoulême. 1913.
- Jean Hippolyte Michon. Statistique monumentale de la Charente. 1844.