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Une petite histoire de l'abbaye Saint-Jean-des-Vignes : la négociation de la Paix de Crépy

Quand : 13 septembre 1544 - 18 septembre 1544

Saint-Jean-des-Vignes | ©Morio60 - Patrick / Flickr / CC-BY-SA
Abbaye Augustinien Charles Quint François Ier Abbaye Saint-Jean-des-Vignes de Soissons

L'abbaye picarde a été le lieu où se sont négociés les préparatifs de la paix de Crépy, entre Charles Quint et les émissaires de François Ier.

Deux éternels rivaux !

Tout commence avec une mort : celle de Maximilien d’Autriche. Qui, pour lui succéder, sur le trône impérial ?

François Ier avait posé sa candidature. Le futur Charles Quint, le petit-fils du mort, itou !

Charles est le fils d’un Habsbourg par son père, maître de l’Autriche, des Pays-Bas, descendant du Bourguignon Charles le Téméraire, héritier par sa mère des rois espagnols.

C’est lui qui l’emporte, et devient empereur du Saint Empire Germanique, à 19 ans.

Le nouvel ennemi héréditaire de la France ! À partir de ce moment, François et Charles vont s'affronter, 25 ans durant.

L’Autrichien rêve de récupérer la Bourgogne de ses ancêtres et dominer la riche Italie, sur laquelle la France a des prétentions, l'empereur convoitant le Milanais que les Français possèdent encore...

Charles Quint (d'après Rubens et Titien)

Charles Quint (d'après Rubens et Titien) | ©Rijksmuseum / CC0

Charles Quint attaque la France

En 1544, nouveau chapitre dans la guerre qui oppose le Valois et le Habsbourg !

Cette fois, Charles Quint et Henry VIII d’Angleterre se sont alliés contre la France.

Quint pénètre en Champagne, Henry VIII en Picardie. Avec pour but de prendre Paris !

Quint attaque Saint-Dizier, Épernay, Château-Thierry.

L’empereur arrive à Soissons le 12 septembre 1544 : il s’installe le 13 dans l’abbaye Saint-Jean-des-Vignes, où il séjourne du 13 au 16 septembre.

Saint-Jean-des-Vignes : le réfectoire

Saint-Jean-des-Vignes : le réfectoire | ©Morio60 - Patrick / Flickr / CC-BY-SA

Négociation à Saint-Jean-des-Vignes

François Ier sent que c’est là le bon moment, pour négocier la paix. Il envoie donc l’amiral d’Annebault, entamer des négociations de paix !

Le but ? Que les plénipotentiaires français, au cours de conférences dans la grande salle de l’abbaye, arrivent à négocier la paix avec Charles Quint.

Ce qui arrive le 16 septembre : à cette date, la paix est considérée comme conclue !

On apprendra plus tard que pendant le séjour de l’empereur à Soissons, un soldat a volé un ciboire dans une église, un autre une relique à Saint-Médard : Quint les fait pendre aux créneaux de la ville !

Saint-Jean-des-Vignes : le cloître

Saint-Jean-des-Vignes : le cloître | ©Morio60 - Patrick / Flickr / CC-BY-SA

La paix est signée à Crépy !

Le 17 septembre 1544, Charles Quint quitte Soissons pour Crépy-en-Laonnois.

C’est dans cette petite cité picarde que la paix est définitivement conclue, le 18 septembre 1544, en l’église Notre-Dame.

Quint assiste à la messe le 19, dans cette même église, où il jure de respecter le traité.

L’amiral d’Annebault prend congé de Quint, en lui laissant en otage son fils, le seigneur de La Hunaudaye, mais aussi le duc de Guise.

Tout ce petit monde accompagne l’empereur chez lui, à Bruxelles !

Notre-Dame, Crépy-en-Laonnois

Notre-Dame, Crépy-en-Laonnois | ©Havang(nl) / Wikimedia Commons / CC0

Les mains de l'empereur tremblent...

C’est dans la cité belge que Charles Quint ratifie la paix de Crépy, en présence des seigneurs (otages) français.

Charles souffre de la goutte. La maladie handicape ses mains, qui tremblent. À tel point, qu’il peut à peine signer le traité !

Il soupire alors à l’amiral d’Annebault :

« Cette paix vous est bien rassurante, et vous ne devez guère craindre que je la rompe. La main qui ne peut plus tenir la plume ne peut plus aussi manier la lance... »
François Ier (T. de Leu, 1576-1614)

François Ier (T. de Leu, 1576-1614) | ©Rijksmuseum / CC0

Les clauses du traité

Que disent les clauses de la paix de Crépy ?

François Ier renonce à la suzeraineté sur la Flandre et l’Artois et abandonne Piémont et Savoie.

Charles Quint, lui, renonce à la Bourgogne.

Il est aussi question de mariage, puisqu’on doit unir le duc d’Orléans Charles (un des fils de François Ier) à la fille de Charles Quint. Elle aurait apporté en dot la Franche-Comté et les Pays-Bas...

Mais la paix de Crépy est rendue caduque en 1545... lorsque meurt le duc d’Orléans !

Deux mots sur l'histoire de l'abbaye Saint-Jean-des-Vignes

  • On ne dirait pas comme ça, mais vous voilà devant l'une des abbayes les plus riches du Moyen Age... Fondée en 1076 par Hugues Le Blanc, seigneur de Château-Thierry, cette abbaye possédait de grands domaines. Elle fut la maison-mère de l'ordre des Joannistes, qui suivent la règle de saint Augustin.
  • La renommée de l'abbaye est telle à l'époque médiévale, que le cardinal Jean de Dormans confie aux abbés la direction du collège de Beauvais à Paris... actuellement dans le 5e arr., rue Jean-de-Beauvais !
  • Rois de France et évêques de Soissons multiplient les dons auprès de l'abbaye, du XIIIe au XIVe siècle : l'église abbatiale et les bâtiments conventuels peuvent être entièrement reconstruits. Merci messieurs ! La nef a été commencée vers 1336 et voûtée vers 1470.
  • Lorsqu'on consacre l'édifice en 1478, les tours ne sont pas achevées : on monte la flèche sud de 1488 à 1495, la tour nord s’achève en 1520.
  • Mais n'allez pas croire que l'Histoire l'a épargnée : ruinée pendant la guerre de Cent Ans, dévastée par les protestants en 1567... Napoléon Ier la donne en 1804 à l’évêque de Soissons, qui vend ses matériaux pour 3000 francs... pour restaurer la cathédrale voisine Saint-Gervais-Saint-Protais !
  • Oui, il faut s'y faire : malgré la protestation des habitants de la ville, l'abbaye sera belle et bien détruite, ne laissant intactes que les deux tours de la façade...

Sources

  • H. Joffroy. Dissertation sur le traité de Paix de Crépy. Bulletin archéologique, historique et scientifique de Soissons (tome 11, 2e série, 1880).
  • William Robertson. Histoire de Charles Quint. 1840.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !