1 - La cloche qui déclenche le massacre
Saviez-vous que les cloches de l'église de Saint-Germain sonnent le début du massacre de la Saint-Barthélémy, dans la nuit du 23 au 24 août 1572 ?
Deux jours avant, l'amiral de Coligny avait joué au jeu de paume avec le roi, au Louvre.
Alors que le plus influent des chefs protestants rentrait chez lui rue de Béthisy... BAM ! On lui décoche un coup d'arquebuse. Un doigt coupé...
Deux jours après, donc, le 24 août tard dans la nuit noire, le tocsin de l'église résonnait. Bourdonnement sinistre. Monstrueux. Pour annoncer le début du massacre...
Coligny cette nuit-là se fait agresser et défenestrer chez lui.
Pendant qu’au cœur du Louvre, les huguenots venus en paix célébrer le mariage du futur Henri IV et de la belle Margot se faisaient saigner comme des bêtes.
À noter que c’est dans le clocher de l’église que le tocsin a été sonné, pas dans le beffroi du 19e siècle, coincé entre l’église et la mairie.
La cloche de 1527 existe encore : elle s’appelle la Marie !
2 - L'enterrement furtif de Concini !
Le corps de Concini, tué d’un coup de pistolet par le capitaine des gardes du roi Louis XIII, devant l’entrée du Louvre, est déposé furtivement dans l’église, sous les orgues.
Le soir, une foule excitée vient le sortir et promener ses restes dans les rues de la capitale !
3 - Le porche, unique à Paris
L’incroyable porche de la façade est unique à Paris, ou presque : il n’en reste que deux, avec celui de la Sainte-Chapelle !
Celui de Saint-Germain-l’Auxerrois, avec ses cinq baies en arc brisé, date de 1435.
Réalisé en pleine guerre de Cent Ans et occupation anglaise de Paris, on le doit au maître-maçon Jean Gaussel.
4 - La première communion de Mme Royale
C’est au sein de l’église que la petite Mme Royale, fille aînée de Louis XVI et Marie-Antoinette, fait sa première communion, le 8 avril 1790. Elle a 12 ans.
D’habitude, les filles du roi de France recevaient une parure de diamants, pour l’occasion.
Mais vu le climat social, Louis XVI décide de s’abstenir !
Il lui dit :
« Je vous sais trop raisonnable, ma fille, pour croire qu’au moment où vous devez être entièrement occupée du soin d’orner votre cœur et d’en faire un sanctuaire digne de la Divinité, vous attachiez un grand prix à des parures artificielles. D’ailleurs, mon enfant, la misère publique est extrême, les pauvres abondent, et assurément vous aimez mieux vous passer de pierreries, que de savoir qu’ils manquent de pain. »
Saint-Germain devait fermer peu de temps après
Interdite au culte, l’église devient une fabrique de salpêtre, puis un magasin à fourrage...
5 - L'enterrement... d'un allumeur de réverbère
L’enterrement d’un modeste allumeur de réverbères a lieu en grande pompe, dans l’église, vers 1848 !
Mort d’une indigestion de diamants, qu’il avait volés aux Tuileries, quelques jours avant, et avalés de peur d’être pris…
En fait, on est en pleine Révolution de 1848 ; cet homme avait participé à l’attaque du palais des Tuileries : c’est là qu’il vole les pierres.
Les Parisiens décident de lui faire de somptueuses funérailles !
D’abord, on embaume son corps :
« On le vêtit magnifiquement de la tête aux pieds, et on l’assit sur le trône de Louis-Philippe, drapé d’opulentes tentures noires. »
Tout Paris défile « devant cet enfant d’ouvriers, que la mort avait conduit au trône » !
Avant de transporter son cercueil à Saint-Germain-l’Auxerrois, dans un « char traîné par six chevaux avec aigrettes au fronteau. »
Dans l’église, « catafalque, flammes vertes, lamentos chantés par les meilleurs artistes, office de première classe, rien ne manqua. »
6 - Chateaubriand sauve l’église de la démolition
Si la Révolution de 1789 ne fait pas de mal à l’église, pour celle de 1831, c’est une autre histoire !
Début juillet 1831, tout Paris bruisse de la rumeur que le gouvernement va démolir l’église…
Chateaubriand, alors à Genève, en entend lui aussi causer. Il écrit une lettre indignée, qui paraît dans la Revue de Paris :
« Quoi ? Renouveler le vandalisme de 1793 ? Saint-Germain-l’Auxerrois est un des plus vieux monuments de Paris, il est d’une époque dont il ne reste presque rien. Que sont donc devenus vos romantiques ? On porte le marteau dans une église et ils se taisent ! Ô mes fils, combien sous êtes dégénérés… vous ferez une ode, mais durera-t-elle autant qu’une ogive de Saint-Germain-l’Auxerrois ? »
La ville entend heureusement le cri de Chateaubriand !
L’église devient mairie pendant 6 ans, jusqu’en 1837, avant que Viollet-le-Duc, Lassus et Baltard la fassent restaurer.
7 - Pourquoi certaines verrières sont blanches
Un article du Parisien (24/07/2009) mentionne un incendie cauchemardesque qui a ravagé l’atelier où les vitraux du 16e siècle étaient en cours de restauration.
Ce jour-là, à Crèvecoeur-le-Grand dans l’Oise, il ne faut que quelques minutes pour détruire ce trésor à jamais, qui pourtant avait résisté à tous les pires coups de l’Histoire.
Voilà pourquoi aujourd’hui, vous verrez, dans les bras du transept... de simples verrières blanches !
8 - La copie et l’originale de Marie l'Égyptienne
Cette magnifique statue médiévale au visage mystérieux et aux beaux yeux en amandes provient du porche de l’église.
On l’a remplacée par une, copie au 19e siècle !
Il s’agit de Marie l’Égyptienne, quasiment associée à sainte Marie-Madeleine, pour l’histoire de la pécheresse repentante.
Le Guide de Paris mystérieux nous dit qu’autrefois, un vitrail ornait l’église, mais que son sujet indécent a choqué le curé, qui l’a fait enlever.
La pécheresse était représentée
« belle, jeune, troussée jusqu’au-dessus des genoux devant un nautonier, sur le bord de la mer, avec ces paroles : "Comment la sainte offrit son corps au nautonier pour son passage" »...
9 - La Vierge au pilier et l’incendie de Notre-Dame
Cette belle statue du début du 14e siècle (Vierge à l’Enfant ou Vierge au pilier), se trouvait à Notre-Dame-de-Paris.
Or, les 15 et 16 avril 2019, un incendie ravage la charpente et la flèche de la cathédrale !
La statue est retrouvée intacte, tout près des gravats de la voûte, qui s’est écroulée à côté d’elle !
Saine et sauve, toutefois bien évidement victime des particules de plomb, qui ont pollué la cathédrale et ses environs.
Il a fallu la décontaminer et lui trouver un autre foyer, le temps que Notre-Dame se refasse une beauté...
10 - Le triptyque Renaissance
Ce beau triptyque peint et sculpté porte le nom de L'Histoire de la faute originelle ou Légende de la Vierge.
Il date du 16e siècle, il est français d’origine.
11 - Le mariage de Molière
Le 20 février 1662, Lundi gras, Jean-Baptiste Poquelin, fils de Jean Poquelin et de Marie Cresé, épousait Armande Gresinde Beiard, fille de feu Joseph Beiard et de Marie Hervé, « tous deux de la paroisse, vis-à-vis le Palais-Royal. »
Il a 40 ans, elle 20.
C’est la sœur de Madeleine, l’ancienne maîtresse de Molière : ce qui a fait dire aux langues de vipères qu’Armande... était leur fille !
Le mariage se fait dans la plus stricte intimité, seulement la famille, les comédiens de la troupe n’ayant pas été invités.
12 - Le mariage de Danton
Georges Danton rencontre sa future épouse dans le café parisien du Parnasse, dont son père est propriétaire.
Elle s’appelle Gabrielle Charpentier. Ils flirtent !
Le 14 juin 1787, elle épouse Danton dans l’église, en présence de la bourgeoisie parisienne, « avocats, notaires, banquiers, commerçants. »
Lui signe le registre « D’Anton », avec la particule qu’il n’a pas !
Danton perd sa Gabrielle en janvier 1793. Envoyé en Belgique en mission, elle meurt en couches en son absence.
Inconsolable, il fera déterrer son cadavre de nuit, afin que le sculpteur Deseine prenne son masque mortuaire, pour en faire un buste.
Sources
- Jacques Hillairet. Connaissance du vieux Paris. Éditions Princesse, 1963.
- François Caradec. Guide de Paris mystérieux. Éditions Tchou, 2011.
- Louis Moland. Molière. 1887.
- Gustave de Reiset. Modes et usages au temps de Marie-Antoinette. 1885.
- Catherine Axelrad. Molière les armes de l'esprit. Portaparole, 2005.
- Serge Bianchi. Danton. Ellipses, 2021.
- Loris Chavanette. Danton et Robespierre : le choc des deux France. Passés Composés, 2021.