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Petite histoire de l'abbaye de Chaalis

Quand : janvier 1136 - 1998

Ruines de l'abbaye | Anecdotrip.com / CC-BY-NC-SA
Abbaye Cistercien Musée Abbaye de Chaalis

La fondation de l'abbaye

Le roi Louis VI Le Gros est bien amer, en ce jour glacé de janvier 1136 : il vient juste de fonder l'abbaye cistercienne de Chaalis, mais dans quelle circonstance !

Car cette fondation, il la dédie à son cousin le comte de Flandre Charles le Bon, assassiné à Bruges presque 10 ans auparavant…

Il lui faut un lieu, pour prier et perpétuer sa mémoire : ce sera Chaalis !

Chaalis, entre Île-de-France et Picardie, tout près du palais royal de Ver-sur-Launette, dans la profonde forêt d'Ermenonville…

Le terrain lui a été cédé par l'abbaye de Vézelay, en 1127, mais ce sont 12 moines de l'abbaye de Pontigny qui s'y installent en 1136.

Immédiatement, les rois donnent sans compter, richesses comme privilèges : saint Louis y séjourne même plusieurs fois ! Grâce à cette haute protection, l'abbaye peut se développer.

Le parc de l'abbaye

Le parc de l'abbaye | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

Un paradis sur terre

Chaalis devient au Moyen Age une très grande abbaye, avec son propre système hydraulique, ses ruches, sans oublier ses nombreux étangs et ses vignes, ses granges et ses moulins.

Des terres qui courent jusqu’à une centaine de kilomètres de distance !

Jean de Montreuil, secrétaire des Finances du roi Charles VI, a décrit les richesses de l’abbaye :

« Chaalis est une espèce de paradis terrestre habité par des saints. On y voit dix grands étangs remplis d’un nombre infini de poissons d’un goût si exquis, que je ne crois pas en avoir jamais mangé de pareils. Que dirai-je de ces belles forêts qui nourrissent une si grande quantité de sangliers, cerfs, lièvres et lapins ? Les prunes de Chaalis sont égales à celles de Damas. Si je ne disais la même chose du pain, du bœuf, du mouton, des pois, fèves, choux et autres légumes, on aurait raison de m’accuser de taire la vérité. »
Ruines de l'abbatiale

Ruines de l'abbatiale | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

Les ruines de l'église abbatiale

Voici un des vestiges de l’abbaye : son église abbatiale.

Consacrée en 1219, elle était grandiose !

Il ne reste aujourd'hui qu'un pan de mur et quelques ruines, mais essayez de vous imaginer un colosse gothique de près de 80 m de long sur 30 de large…

Elle a longtemps été l’une des plus grandes abbatiales cisterciennes jamais construites !

La chapelle de l'Abbé

La chapelle de l'Abbé | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

La chapelle de l'Abbé

Voici la chapelle de l'Abbé, construite entre 1245 et 1255. Il s’agit du sosie de la Sainte-Chapelle, à Paris !

La façade date de sa reconstruction dans le style néogothique, dans les années 1860.

C’est aussi à cette époque que sont dégagées les fenêtres, anciennement bouchées avec du plâtre, et rétablis les vitraux.

Les fresques de Primatice

On la surnomme la chapelle Sixtine de l’Oise, car on peut y voir de superbes peintures murales sur les voûtes, réalisées par le grand Primatice.

Il s'agit d'une commande du cardinal et abbé de Chaalis Hippolyte d’Este (fils de la sulfureuse Lucrèce Borgia), au début du 16e siècle.

Les murales ont été restaurées par un proche collègue de Viollet-le-Duc : Paul Balze.

Les fresques Renaissance

Les peintures Renaissance | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

Le portail Renaissance

Vous voyez ce mur crénelé ? Il protégeait l’ancien cimetière des moines !

Au 16e siècle, le cardinal et abbé de Chaalis Hippolyte d’Este transforme celui-ci en jardin italien : aujourd’hui, il s’agit de la roseraie.

Ce mur, commandé par Hippolyte d’Este, est le second vestige de la Renaissance visible à Chaalis, après les peintures de la chapelle.

On le doit au grand architecte Sebastiano Serlio.

Le portail Renaissance

Le portail Renaissance | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

Le logis du 18e siècle

L’un des abbés de Chaalis, Louis de Bourbon, fait reconstruire les bâtiments conventuels, au milieu du 18e siècle.

Le logis de style classique que l'on visite aujourd'hui est l’œuvre de l'architecte Jean Aubert. Il réalise les écuries du château de Chantilly ou le Palais-Bourbon, à Paris !

Sauf qu'à l'époque, le projet consistait en la construction de 4 corps de logis... un seul sera réalisé !

En attendant, l'abbé trop gourmand a englouti les revenus de l'abbaye. Plus d'argent ! En 1785, il faut la fermer...

Quand arrive la Révolution, Chaalis est vendue bien national, les derniers moines chassés.

C'est à cette époque que son propriétaire détruit la majeure partie des bâtiments, ne laissant que la chapelle de l'Abbé et le logis debout.

Le logis du XVIIIe s

Le logis du 18e s | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

L'arrivée de Nélie Jacquemart-André

En 1902, la veuve du richissime banquier Édouard André, Nélie Jacquemart, acquiert Chaalis.

On connaît ce couple pour sa superbe collection d'objets d'arts, réunie dans l'hôtel parisien qui porte leur nom !

Ici, Nélie installe ses plus belles pièces ! 4000 objets glanés auprès d’antiquaires, venus de tous les continents, forgés, peints, sculptés à toutes les époques.

Nélie installe l’électricité, la téléphone, le chauffage central.

Elle n’est pas là par hasard… elle connaissait l’ancienne propriétaire de l’abbaye entre 1850 et 1882, Mme de Vatry !

Nélie Jacquemart (H. Regnault)

Nélie Jacquemart (H. Regnault) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

Un couple de collectionneur

Issue d’un milieu modeste, son talent pour la peinture et le soutien d’une riche protectrice qui l’avait remarquée, Mme de Vatry, propriétaire de Chaalis, ouvrent à Nélie les portes de l’atelier du peintre Léon Coignet.

Elle se spécialise dans les portraits des grands personnages de l’époque, qu’ils soient politiques ou artistes.

C’est ainsi que la « peintresse » (comme la presse l’appelait) fait la connaissance d’Édouard André, très riche homme politique, mais surtout amoureux des arts, grand collectionneur.

Il a 50 ans, éternel célibataire : la rencontre avec Nélie, qui a les mêmes goûts, puis le mariage, sont des évidences !

Elle abandonne sa carrière de peintre et le couple se met à parcourir l’Europe, jusqu’en Égypte, pour en rapporter d’incroyables œuvres d’art.

C’est elle qui négocie les prix, et fait authentifier chaque objet avant achat, par experts et conservateurs de musées !

Le salon indien

Le salon indien | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

Le salon indien

Puisqu’on parle de voyages… En 1902, Nélie part 4 mois en Inde : Ceylan, Calcutta, Rangoon...

Elle pousse même jusqu’au pied de l’Himalaya, puis, c’est Delhi et Peshawar.

Elle y achète quantité d’objets, que l’on retrouve dans le « salon indien » : mobiliers de temples, statues dorées de Bouddha, armes et tapis précieux…

C’est là qu’elle reçoit le grand maharajah de Kapurthala et ses fils, qu’elle avait rencontrés lors de son voyage au Penjab !

Une cellule reconvertie

Une cellule reconvertie | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

Les anciennes cellules monacales

Nélie Jacquemart transforme les anciennes cellules des moines en chambres d’amis.

Chacune dispose de sa propre décoration, sa propre petite pièce de toilettes.

Elles sont meublées dans le style Empire ou celui du 18e siècle.

La galerie du rez-de-chaussée

La galerie du rez-de-chaussée | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

La galerie du rez-de-chaussée

La grande galerie du rez-de-chaussée foisonne d’œuvres d’art !

À ses deux extrémités, deux beaux bustes et des tapisseries.

La galerie du premier

La galerie du premier | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

La galerie du premier étage

La galerie du premier étage est consacrée à la peinture de la Renaissance, qu’elle soit italienne ou hollandaise, flanquée de lourds bahuts du 17e siècle.

À chaque bout, une statue sur fond de tapisserie de Bruxelles.

La salle-à-manger

La salle-à-manger | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

La salle-à-manger

La salle-à-manger de Nélie Jacquemart est décorée de tableaux animaliers signés François Desportes et Oudry, avec un lustre en bronze signé Boulle, ainsi que des consoles à gibier.

C’est là qu’elle reçoit ses convives, pour les repas.

La bibliothèque

La bibliothèque | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

La bibliothèque

La bibliothèque de Nélie, ancienne salle de réception de sa prédécesseure Mme de Vatry.

Nélie fait installer des étagères pour ses livres d’art et ouvrages de voyages.

Là aussi, le mobilier est signé Boulle, acquis en 1907 chez un antiquaire londonien.

Vestibule Médicis

Vestibule Médicis | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

Le vestibule

Le vestibule Médicis est un ancien passage permettant de relier le cloître au parc de l’abbaye.

Il porte ce nom en référence aux objets exposés.

Ils portent le blason de la grande famille florentine !

Tombe de Nélie Jacquemart-André

Tombe de Nélie Jacquemart-André | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

Ici repose Nélie Jacquemart !

Nélie Jacquemart lègue l'abbaye à l'Institut de France en 1912, peu avant de mourir, avec le souhait que rien ne bouge et que sa maison ouvre au public.

Son testament précise, entre autres, que le domaine soit

« pour tous les Français un lieu de visite, de repos, et qu’il reste ainsi le charme des promeneurs à l’abri de la prétendue civilisation qui envahit, étreint et brise tout. »

Elle repose au cœur de son domaine de Chaalis, dans la chapelle, avec sa sépulture et son gisant la représentant allongée, une palette et des pinceaux à la main.

Le parc de l'abbaye

Le parc de l'abbaye | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

Le parc de l'abbaye

On doit au cardinal Hippolyte d’Este la conception des pièces d’eau du parc.

C’est notamment lui qui, à Tivoli en Italie, a conçu les jardins de la villa d’Este.

Les statues et les vases ont été installés par la propriétaire qui acquiert l’abbaye en 1851, Mme de Vatry, prédécesseure de Nélie.

C’est aussi elle qui reconstitue l’ancien domaine de l’abbaye, morcelé à la Révolution, terre par terre, bois par bois !

La roseraie

La roseraie | ©Anecdotrip / CC-BY-NC-SA

La roseraie

Nélie Jacquemart aménage la première roseraie de 3 500 m², mais l’actuelle date de 1998.

Sources

  • Collectif. Chaalis : l’abbaye, les collections. Hors série Beaux-Arts Magazine, 2004.
  • Encyclopédie Châteaux Passion. Éditions Atlas, 2001.
  • Fascicule remis lors de notre visite de l’abbaye.
  • Anselme Dimier. L’abbaye de Chaalis. Oise Tourisme (n°23). 1973.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !