Le pari de D’Artois et de Marie-Antoinette
Le frère de Louis XVI, le comte d’Artois, achète Bagatelle en 1775 et y fait construire le château actuel.
On raconte qu'il s'agit d’un pari de 100 000 livres, entre sa belle-sœur Marie-Antoinette et lui, ce monsieur ayant affirmé que le chantier ne durerait qu’un mois !
La reine et son beau-frère venaient souvent galoper, dans les allées du bois de Boulogne.
Ils avaient déjà remarqué le petit terrain tout joli, caché par les feuillages, près de la Seine, avec son petit château... parfait pour s’éloigner de l’étiquette de Versailles.
L’architecte Galland fait détruire le château et relève le défi en 64 jours, avec 900 ouvriers sur le pied de guerre, nuit et jours !
Le tout coûte tout de même la somme astronomique de 3 millions de livres ; on baptise alors le nouveau château « folie d’Artois. »
On réaménage aussitôt les intérieurs : le peintre Dugourre décore la salle-à-manger, le cabinet de bain reçoit des toiles d’Hubert Robert, le « peintre des ruines. »
Le paysagiste Blackie s’occupe de façonner les extérieurs : grandes pelouses, petits bosquets, lacs, rivières, ponts rustiques, statues antiques et pagodes chinoises...
Chevaux, turbots, perdreaux
D’Artois avait gagné son pari... Pendant la fête d’inauguration, on joue une pièce de théâtre.
La reine joue bien sûr une soubrette, quand soudain, un sifflement retentit : le roi a sifflé, il n’aime pas.
Vexée, Antoinette lui dit que s’il n’est pas content, il peut partir, on lui remboursera sa place.
Honteux, Louis s’excuse...
Le comte d'Artois vient très souvent chasser à Bagatelle, il y fait aussi des courses de chevaux, car il adore cette mode venue d’Angleterre (on se rappelle qu’il achète ses chevaux au château de La Lorie).
Pendant les fêtes qu’il donne, il y a tant de monde qu’après cela, pelouses et arbustes se retrouvent arrachés, comme après le passage d’une tempête !
On dépense, on dépense... Les caves sont toujours remplies de champagne ! 1500 bouteilles en 1782, dit un inventaire.
Les mêmes inventaires qui font état par exemple de ce dîner, en 1781 : 5 tables de 24 couverts, où l'on déguste :
- 1 poulet de Caux
- 6 perdreaux rouges
- 48 mauviettes de Chartres
- 3 poulets à la Reine
- 8 bécassines
- 1 caneton de Rouen
- 3 bécasses
- 2 poulets gras et 3 sarcelles.
Plus fruits, légumes, pain, beurre, potages et 8 bouteilles de champagne.
Une autre fois, on ne sert que des poissons : aloses, esturgeons, turbots, morues.
Sources
- Juliette Benzoni. Le roman des châteaux de France. Perrin, 2012.
- Jacques Barozzi. Bagatelle. Éditions Ouest-France, 1997.
- Henri Duchesne. Le château de Bagatelle (1715-1908) : d'après les documents inédits des Archives nationales.