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Qui a dit... « Pourvu que ça dure » ?

Quand : 1810

Madame Mère (François Gérard, 1805) | ©Grégory Lejeune / Flickr / CC0
Maison Expression française Napoléon Ier Maison Bonaparte

Elle s'appelle Laetitia Bonaparte, née Ramolino.

Et cette phrase, devenue expression célèbre, c'est à elle qu'on la doit !

Késaco ?

La phrase date de 1810. On la doit à l’unique, la seule, j’ai nommé la mère de Napoléon Bonaparte : Laetizia Ramolino.

Elle la prononce en parlant des victoires et des succès de son fils.

Oui, pourvu que durent victoires, succès politiques, et tout l’argent qui va avec !

Car pour comprendre l’expression, il faut se mettre trois secondes dans la peau de la mère inquiète et radine de l’empereur...

Le contexte

Le fils reproche à sa mère « son économie passionnée. »

Toute la famille, les amis l’accusent « d’une parcimonie voisine de l’avarice » !

Hé, que voulez-vous : huit enfants, une maison à gérer, cela coûte des sous.

En 1787, Napoléon, venu passer des vacances à Ajaccio dans la maison familiale, croise une jeune villageoise dans l’escalier, qui lui offre un fromage frais.

Il lui donne un écu de six livres, pour la remercier. Oooh, malheur : Laetizia fulmine, tempête !

Napoléon « saisit sa chère maman par la taille et lui fit faire, malgré elle, un tour de valse, qu’elle eut peine à lui pardonner. »

Après la mort du père Bonaparte, Charles, le grand-oncle Lucien est chargé de gérer la très petite « fortune » de la famille.

Lui aussi est radin, autant que Laetizia ! Napoléon dit qu’il cachait son or dans un sac de peau, sous ses matelas...

Un jour, Pauline, l'une des sœurs de l’empereur, réussit à piquer le sac, qui s’ouvre en répandant toutes les pièces par terre. Lucien en est ma-lade, pendant que Laetizia fonce pour ramasser la moindre petite pièce !

C'est bien simple :

« Plus on gaspillait l’or autour d’elle, plus elle restreignait ses propres dépenses. »

Tenez : un jour, on lui propose l’achat d’une terre coûtant 30 000 francs. Hors de question !

Elle dit :

« Je suis obligée de coumouler pour l’avenir ; que sait-on ce qui peut arriver ? »

Aaaah, ça, elle avait beaucoup pensé à l’avenir, Laetizia.

Pensé à ce que la chance tourne toujours, aux revers de médaille, aux bonheurs fugaces déjà évanouis à peine empochés… et quoiqu’elle reconnaissait le talent et le génie de son fils, elle savait que rien ne durerait.

Elle disait :

« Tout cela peut finir, et que deviendront des enfants dont la générosité imprudente ne regarde ni en avant, ni en arrière ? Alors ils me trouveront. »

Car même en 1804, son Nabulio (surnom de Napoléon) devenu empereur et elle nommée Madame mère, son esprit n’était toujours pas tranquille.

À en croire l’archiduc Charles-Louis d’Autriche, elle disait vers 1812 :

« Pourvu que cela doure ! »

Et à une dame qui lui reprochait ses économies trop importantes :

« Qui sait si un jour je ne serai obligé de donner du pain à tous ces rois ? »

Et quand Napoléon devenu empereur exprimera sa volonté de voir ses proches dépenser les grosses sommes qu’il leur avait offertes, il prend sa mère à part et lui dit gravement :

« Signora Laetizia, il convient que vous dépensiez un million par an. »

La Corse répond :

« Je le veux bien, à condition que vous m’en donniez deux » !

Sources

  • Louis Marie Prudhomme. Biographie universelle et historique des femmes célèbres. 1830.
  • Hippolyte Larrey. Madame Mère, Napoléonis mater. 1892.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !