Louis XV (1715-1774) : anecdotes et histoires sur sa table, ses filles, ses maîtresses, les parfums qu'on s'arrache à la Cour de Versailles... C'est le mystérieux comte de Saint-Germain qui répond à nos petites questions !
SOMMAIRE
1 - Petit aperçu de la vie de Louis
2 - Le château de Versailles
3 - Parfums et hygiène à la cour
4 - A la table de Louis
5 - La mode sous Louis XV
6 - Ameublement et style Louis XV
7 - Louis XV et les femmes
Petit aperçu de la vie de Louis
Anecdotrip : Alors ? Entre soupers fins et petits plaisirs, comment se passe ce règne ?
Comte de Saint-Germain : Vous le dites bien, le règne de Louis, c'est celui des Lumières, du plaisir, des fêtes galantes, du progrès des techniques, de la science, de l'amélioration de l'hygiène, l'ouverture des esprits. Même si, on est d'accord, ces grands progrès ne touchent qu'une infime partie du peuple ! Tout ça avec un affaiblissement de la monarchie, pourtant...
Au début de son règne, Louis jouit d'une très grande popularité : c'est le Bien-Aimé. Entre 1740 et 1748 a lieu la guerre de Succession d'Autriche. Avec une première campagne qui se termine par un succès : le roi revient à Paris en 1744 en paradant à travers les rues, la foule l'acclamant ! On murmure que Louis s'est comporté en vrai héros, qu'il a fait preuve d'un sang-froid sans faille.
Et Louis devient le Mal-Aimé...
Dès 1748, rien ne va plus. Le traité d'Aix-la-Chapelle (1748), à la suite de la guerre avec l'Autriche, se solde par un échec : les troupes françaises ont gagné, oui, mais rien n'est fait pour la paix et on court à la catastrophe (la guerre de Sept Ans en découlera) ! Le peuple est très remonté contre son roi, qui se met à jaser : « Bête comme la paix » ! dit-on.
En plus, les aventures du roi avec ses différentes maîtresses font plus que jamais jaser ! Le pire, c'est lorsque les gens apprennent les sommes monstrueuses que La Pompadour engloutit dans ses toilettes, ses objets d'art, ses châteaux, ses nombreux hôtels particuliers (l'actuel palais de l'Elysée, entre autre). Et c'est le roi qui lui donne, cet argent ! Pendant que le peuple meurt de faim, tiens...
Les choses ne s’arrangent pas, avec ce fait divers très étrange : en 1750, des enfants et adolescents disparaissent subitement ! Les rumeurs les plus folles commencent à circuler, comme le bruit qu'un noble lépreux les enlève pour prendre des bains avec leur sang, pour se soigner ! Et qui devient le bouc émissaire, le coupable idéal ? Le roi !
C'est même peut-être lui, ce lépreux... L’imagination s'emballe, les esprits s’échauffent, et voilà Louis devenu le Mal-Aimé... En plus, la France ne fait que céder des terres, des terres, encore des terres ! Avec le traité de Paris, entre autre, en 1763 : l'Angleterre obtient une partie du Mississippi, les îles Grenadines, le Canada et toutes les colonies américaines...
L’Espagne obtient une partie de la Louisiane.C'est du propre ! A ça s'ajoute la décision, en 1763, d'instaurer la libre circulation des grains et des farines : un décret royal très mal accueilli par le peuple, qui se sent lésé encore une fois, et qui parle de « pacte de la famine ».
Surtout lorsqu'en 1767 le mauvais temps entraîne de très mauvaises récoltes et une hausse des prix du grain... Quand je vous disais que le pouvoir du roi se faisait de plus en plus contester, et bien voilà ! Dès 1768, les grandes villes de province et Paris rétablissent leurs propres règles concernant la vente des grains. Et tant pis pour le roi et son gouvernement !
Alors, le bilan de ce règne ?
On a souvent reproché à Louis son incapacité à prendre des décisions, sa maladresse, sa trop grande sensibilité... et le peu de décisions qu'il prend, il les prend mal ! Un des plus mauvais rois de France ? A vous de juger. En tout cas, il meurt oublié de tous, haï, même, en avril 1774...
Le château de Versailles
Louis XV, c'est le seul roi à être né et mort au château de Versailles, non ?
Oui ! Il y a vécu 57 ans. Et le chantier du château se poursuit tout le long de son règne, avec la construction du Petit Trianon et de l'Opéra.
Commençons par le Trianon, alors !
Louis XIV fait construire le Grand Trianon : pour Louis XV, ce sera le Petit. Avant la construction de ce joli pavillon, on trouve des serres et un jardin botanique. Passionné d'agronomie, Louis charge Jussieu, dès 1751, de l'aménagement de ce jardin. La Marine de Louis rapporte des espèces rares du monde entier, des ananas, des micocouliers... que Louis cultive lui-même !
Et voilà qu'en 1762 se construit le Trianon, par Gabriel. Mme de Pompadour, pour qui Louis a fait aménager ce petit château, n'en profitera pas : elle meurt 4 ans avant son achèvement ! Le roi remplace sa favorite et hop ! Le voilà dans l'intimité de son Trianon avec Mme du Barry !
C'est aussi ici que Louis tombe gravement malade, en 1774. Son médecin le force à regagner le château... ne pouvant pas le laisser mourir dans un cadre aussi peu officiel.Bref ! Voilà l'Opéra, maintenant, commencé par Gabriel entre 1768 et 1770. Une grande première, ce théâtre !
Parce que sous Louis XIV, on n'a pas de théâtre à proprement parlé : on joue les pièces dans un genre de théâtre éphémère, soit dans les jardins, soit dans les Grandes Ecuries. A peine achevé, l'Opéra sert de cadre au mariage du futur Louis XVI et de Marie-Antoinette ! On y donne un spectacle sur une musique de Lully pour l'occasion.
Louis fait aussi des modifications dans le château, je crois ?
Mais oui ! Il transforme les grandes pièces pompeuses de son arrière-grand-père en petits appartements et en boudoirs très intimes ! Il y aménage par exemple le Cabinet de la Pendule, autrefois un petit salon de jeu : la pièce s’appelle comme ça parce qu’on y trouvait un mur composé de plusieurs cadrans astronomiques.
C'est là qu'il fait installer en 1754 la pendule de Passemant, une pièce rare et unique qui affiche le jour, le mois, l'année ! On dit que Louis adore regarder le passage à la nouvelle année, chaque 31 décembre... Il fait aménager aussi les « Salles neuves » à l'emplacement des appartements de Mme de Montespan. Au second étage, il fait aménager les petits Appartements : là même où ont vécu Mme du Barry et la Pompadour !
De vraies petites pièces, à taille humaine, très intimes, quoi ! Et vous savez quoi ? C'est dans ces appartements que le petit Mozart, alors âgé de 7 ans, joue pour Louis et sa femme, la reine Marie en janvier 1764 ! Dans le Salon du Grand Couvert, plus exactement... Le jeune Wolfgang est accompagné de son père et de sa sœur... et il séduit Marie et ses filles ! Elle lui sert d'interprète auprès du roi, et le prodige compose des sonates pour les demoiselles.
Parfums et hygiène à la cour
Ah ! Alors, cette hygiène ? Les choses ont pas mal bougé, depuis le règne du roi Soleil !
Effectivement, au 17e siècle, on privilégie la « toilette sèche », mais le 18e siècle signe le grand retour du bain ! A la cour de Louis, on aime les parfums doux. L'eau de Cologne date de cette époque, d'ailleurs : il devient le parfum préféré du roi ! La cour des Lumières s'appellera désormais la « cour parfumée »... Tous les courtisans ont chez eux leur propre « cave à parfums », qui leur permet de faire eux-mêmes leurs mélanges.
Pour le bain, on le prend dans une baignoire le plus souvent en cuivre, recouvert d'un drap pour filtrer l'eau : en effet, plusieurs personnes utilisent souvent la même eau d'affilée. Et puis, on y passe beaucoup de temps, dans ce bain, car grâce à différents accessoires, on peut y lire ou y écrire ! Le bidet, les tables de toilettes avec leurs boîtes à mouches et les nécessaires de toilette comprenant savons et huiles parfumées voient aussi le jour...
Vous pouvez nous en dire plus, sur l'eau de Cologne ?
Bien sûr ! Aah... l'eau de Cologne ! Vous en utilisez encore de vos jours, pas vrai ? C'est un Italien du nom de Jean-François Farina, installé à Cologne, qui met au point cette eau en 1708 (appelée « eau admirable ») dans sa parfumerie, la Farina gegenüber. Il écrit même un petit manuel, Vertus de l'eau admirable, appelée eau de Cologne !
Dès fois qu'on ne saurait pas quoi en faire ?
Mais, c'est que la chose n’est pas forcément évidente, parce qu'elle parfume, notre eau, mais elle soigne, surtout ! Dans ce manuel, donc, Farina rapporte comment son élixir a la propriété de « rétablir les parties du corps attaqués de quelque mal, de les fortifier en leur insinuant une chaleur modérée et vivifiante. »
A l'époque, on peut même en mettre quelques gouttes dans du vin ou du bouillon ! Ou simplement s'en frotter « les parties affligées » ou les tempes. « C'est un remède souverain contre « l'apoplexie, la paralysie, les tremblements, et généralement toutes les maladies du cerveau... » Mais elle guérit aussi la migraine, la colique, les brûlures, les contusions, les palpitations, la « puanteur d'haleine »... Un médicament plus qu'un parfum, donc, vous voyez !
Mais au fait, de quoi est-elle faite, cette eau miraculeuse ?
De beaucoup de choses ! Voilà pour ceux qui voudraient refaire la recette originale chez eux... On a besoin de mélisse ou de marjolaine, de thym, de romarin, d'absinthe, de fleurs de lavande, de racines d'angélique, de cardamome, de baies de genièvre, d'anis, de carvi, de fenouil, de cannelle, de muscade, de girofle, d'écorces de citrons, d’huile de bergamote.
A la table de Louis
Comment se passent les repas de Louis ?
L'heure n'est plus aux grands soupers cérémonieux : on préfère les soupers fins, plus intimes. Louis aime prendre ses repas en famille. Famille qui mange comme des ogres ! On rapporte qu'un jour, la reine engloutit quinze douzaines d’huîtres avec 4 chopes de bières !
Mais bon, la palme dans ce domaine revient à Louis : il ne passe pas beaucoup de temps à table mais il mange beaucoup ! Allez, disons-le franchement, il adore manger : on raconte qu'une fois, en 1726, il fait un copieux repas dans un de ses châteaux franciliens, de retour de chasse.
Il rentre à Versailles quelques heures plus tard et se remet à table... ce qui lui vaut une belle indigestion le matin même : résultat, des saignées ! Il adore les poissons d'eau douce. Il mange les œufs à la coque et les gens, parait-il, admirent la dextérité avec laquelle il enlève d'un seul coup de cuillère le haut de la coque ! Avec Mme de Pompadour, Louis mange des plats inventés par elle et son cuisinier : les poulets de Lurlubie, les tourtereaux à l'impromptu... surprenants et délicieux, dites donc !
La cuisine du 18e siècle est globalement plus fine, plus savoureuse !
Hé, on est au siècle des Lumières, oui ou non ? La cuisine sous Louis XV est totalement différente de celle du Moyen Age ou du 17e siècle : finies les sauces grasses, les épices !
On en vient à quelque chose de fin et de raffiné, moins lourd, bien sûr ! Le cuisinier Marin met en avant les fonds de sauce ; on cuit moins longtemps les viandes ; on fait revenir de plus petits morceaux de viande dans de la matière grasse et on les déglace avec du vin ou de la liqueur.
Tenez, à propos, saviez-vous que Marin, cuisinier du prince de Soubise, a inventé une omelette royale aux crêtes de coq et aux laitances de carpe exprès pour Louis XV ? Elle coûte alors 100 écus... Mouthier, le cuisinier de Mme de Pompadour, compose des plats qui garantissent une vie longue et saine !
Et les livres de cuisines sont toujours aussi populaires ! Sous le règne de Louis XV, on voit paraître Le Cuisinier moderne, écrit en 1735 par Vincent La Chapelle. En 1739, François Martin publie Les Délices de la Table. Un livre en particulier, Eléments de Politesse et de bienséance ou la civilité qui se pratique parmi les honnêtes gens, paru en 1766, dicte les règles de bonne conduite :
« Ne poussez pas du coude ceux qui vous sont proches. Ne témoignez par aucun geste que vous avez faim et ne regardez pas les viandes avec une espèce d'avidité, comme si vous deviez tout dévorer. Ne mangez pas goulûment. Ne faites pas de bruit en vous servant, n'en faites pas non plus en mâchant les viandes. Ne sucez pas les os pour en tirer la moelle. Ne mordez pas dans votre pain. Il est incivil de se nettoyer les dents avec un couteau ou une fourchette... Quand on a les doigts gras, il faut les essuyer à la serviette et jamais à la nappe ni à son pain. »
Allez, donnez-nous faim avec un exemple de menu tel que le mange Louis XV !
Et bien, voilà par exemple le menu pour les jours gras (sans poissons) : deux potages de chapons vieux et de perdrix aux choux ; deux moyens potages à la bisque de pigeonneaux et de crêtes de coq, 4 petits potages hors-d’œuvre faits de chapons haché, de perdrix aux lentilles, de poulets farcis et de chapon au blanc.
en entrée, quartier de veau et pigeonneaux en tourte ; deux moyennes entrées : poulet fricassé et perdrix en hachis ; 6 petites entrées hors-d’œuvres : perdrix au jus, tourtes à la braise, dindons grillés, poulet gras aux truffes, poularde dépecées aux truffes ; rôts : deux plats avec chapons gras, poulets, pigeons de volière, perdrix et tourtes ; deux plats de rôts avec bécasses, sarcelles, perdrix. Plus légumes, salades, crèmes, rissoles, beignets...
Appétissant, dites donc... Et les nouveautés ?
Ah, beaucoup de choses ! Saviez-vous que la reine Marie Leszczyńska passe pour avoir inventé les bouchées à la Reine ? Et que Nicolas Stohrer, pâtissier de Marie, invente le baba au rhum ? Son père, le roi de Pologne Stanislas, adore ce gâteau arrosé de vin...
Sinon, le thé, le café, le chocolat ont enfin fait des adeptes : on utilise des cafetières, des théières, des sucriers... On adore aussi les glaces et surtout les sorbets, faits de glaces pilées et de fruits frais ou en coulis. La glace prélevée en hiver est conservée dans des glacières très profondes, et on peut manger ces sorbets en été..
Et puis, en 1733, on se met à cultiver un nouveau fruit, l'ananas, pour la première fois ! Jean de Léry l'avait pourtant rapporté du Brésil vers 1550, mais ce fruit trop exotique n'avait pas vraiment séduit les Français... On le met dans des serres, car ce fruit ne pousse bien sûr que dans un climat tropical...
Côté art de la table, on mange dans de magnifiques services de porcelaine de Sèvres ! Issus de la manufacture royale fondée en 1738 à Vincennes et transférée à Sèvres en 1756... Enfin, on avait vu que sous Louis XIV, on mettait les verres sur une desserte, « loin » des convives, mais là, on met enfin les verres à table ! Plus pratique, en effet !
Et les boissons ?
On boit depuis un moment déjà le vin de champagne, blanc ou rouge (le roi Soleil adore). Mais pas de champagne pétillant tel que vous le buvez maintenant ! Un moine du nom de Dom Pérignon avait déjà initié le mouvement, sous le règne de Louis XIV, en inventant le système de fabrication du champagne actuel. Malheureusement pour lui, le succès n'est pas au rendez-vous...
Il faut attendre le règne de Louis XV pour que le champagne gagne ses lettres de noblesse. On en met même dans les sauces ! Mme de Pompadour en raffole et le popularise auprès des courtisans. Une boisson légère comme les mœurs du temps... Sinon, Louis adore le café. Il le prépare lui-même pour ses courtisans. Le jardinier en chef de Versailles, Lenormand, cultive une dizaine de caféiers en serre, dont le roi se sert pour sa consommation personnelle.
La mode sous Louis XV
Alors, cette mode ? Toujours aussi extravagante ?
Ameublement et style Louis XV
Mais qu'est-ce qui caractérise vraiment ce style Louis XV ?
Louis XV et les femmes
Ah ! Voilà un chapitre intéressant... Quid de ses maîtresses ?
La Du Barry : c'est une fille du peuple ?