Les ravages de la peste noire et l'aître Saint-Maclou

Le cloîtreLe cloître | ©Giogo / CC-BY-SA

Au Moyen Âge, l'aître (du latin atrium) désigne le cimetière.

Partons à la découverte de celui de Saint-Maclou de Rouen, qui garde en son sein les restes des victimes de la grande peste de 1348 !

L'aître Saint-Maclou

C'est à cause de la peste noire, qui ravage l'Europe au 16e siècle et tue plus de la moitié de la population rouennaise, qu'il devient urgent d'agrandir le petit charnier déjà existant à Rouen.

Les cimetières débordent !

Ainsi, en 1432, Nicolas Roussel, vicaire de Saint-Maclou, donne une maison et un jardin attenant, pour agrandir le lieu funéraire.

Voilà la naissance de l’aître.

Les victimes étaient enterrées dans de grandes fosses communes au milieu de l’aître, avant qu’on ne déménage les os dans les galeries du cloître.

En 1526, on ajoute les 3 galeries, suivies d'une 4e en 1640.

Regardez ces détails... plutôt macabres ! Ils datent du 16e siècle. Mais ils sont à propos : les poutres sont décorées de motifs d'os et de têtes de mort !

DétailDétail | ©Selbymay / CC-BY-SA

La peste noire

Le Moyen Âge a une peur terrible de la mort. La faute des ravages de la guerre et des épidémies.

La pire de toute ? La peste noire, en 1348 !

L'Europe ravagée

Née en Asie Centrale, la peste se rue sur la France et la décime.

Elle était apparue en premier à Marseille, à l’automne 1347.

C’est toute l’Europe qui sera touchée : 20 millions de morts en 5 ans, de 1347 à 1352, soit 50% de la population européenne. Énorme !

Bubons et septicémie

Les premiers signes du mal se font vite sentir. Incubation de quelques jours, puis brutalement fièvre, douleurs, maux de tête et fatigue.

Viennent ensuite des ganglions gros et douloureux, près de là où la puce a piqué.

Ensuite, la confusion, les convulsions, la septicémie généralisée... et la mort.

Aucun remède, bien sûr, à l’époque : les médecins conseillent de brûler des pelures de coings pour assainir l'air !

L'aître Saint-MaclouL'aître Saint-Maclou | ©Nikater / Public domain

De la puce au rat... jusqu'à Rouen !

Du rat aux bateaux...

La peste ? On la devait à une cochonnerie de bacille transmise à l’homme par la piqûre de la puce du rat noir.

Un rat infecté qui grouillait partout, mais qui affectionnait particulièrement bateaux et maisons en bois.

Les puces se trimballant sur lui pondent leurs œufs partout, œufs qui éclosent bientôt si les conditions climatiques (doux et humide) étaient favorables...

Or, à Rouen, il fait ce temps-là !

La peste arrive dans la cité normande à l’hiver 1348 par voie fluviale et maritime, par les bateaux de commerce.

La peste à Rouen

L'épidémie dure une année.

Un vent de mort et de désolation balaie la cité, qui de populeuse, passe à déserte.

Les anciennes chroniques latines parlent de 100 000 morts, sur une population estimée grosso modo à 30 000 habitants !

Alors, avec tous ces gens entassés dans des dédales de petites rues puantes et sales, la maladie est sûre de faire des ravages...

Sans oublier la population des campagnes voisines qui venait chercher refuge en ville.

Pierre Cochon rapporte dans sa Chronique normande :

« La mortalité fut si grande que l’on fit, en plusieurs lieux, cimetières nouveaux, pour ce que les vieux ne pouvaient soutenir les corps morts, et par especial à Rouen en Normandie : à Saint-Vivien et à Saint-Maclou, qui bien en ont eu métier, pour les mortalités, qui depuis celle grande, sont venues. »

Sources

  • C. Ouin-Lacroix. Histoire de l'église et de la paroisse de Saint-Maclou de Rouen. 1846.
  • Peste noire. Encyclopédie Wikipédia, wikipedia.org.
  • Nicétas Periaux. Histoire sommaire et chronologique de la ville de Rouen jusqu'à la fin du 18e siècle. 1874.
  • Chronique normande de Pierre Cochon.
  • Abbé Bunel. Géographie du département de la Seine-Inférieure. 1879.
  • J. P. Papon. De la peste (tome 2). 1799.