De mystérieuses mosaïques se cachent dans la cathédrale de Lescar, dont un étonnant chasseur maure à jambe de bois !
La cathédrale de Gui
La cathédrale romane a été construite au 12e siècle par l’évêque Gui de Lons.
C’est lui qui fait paver le chœur de son église, avec une mosaïque représentant ses armoiries figurant deux cerfs.
On le sait grâce à une inscription latine, en bordure du pavement :
Dominus Guido episcopus Lascurensis hoc fieri fecit pavimentum, « Seigneur Gui, évêque de Lescar, fit faire ce pavement. »
En 1837, en nivelant le carrelage du chœur, on fait malheureusement disparaître le milieu de cette mosaïque (les cerfs) à tout jamais...
Une belle découverte
Ces mosaïques de scènes de chasse ont été découvertes en avril 1838, au cours de travaux dans l’église.
Un an plus tôt, les ouvriers avaient fait disparaître la fameuse rosace, vue plus haut.
Ces mosaïques ont été restaurées en 1885-86.
Médiévales ?
Les mosaïques dateraient du 12e siècle, bien qu’autrefois, on les pensait de l’époque gallo-romaine.
Le Béarn de M. Le Coeur (1877) dit :
« Gui n’aurait pas évidemment choisi un sujet profane, une chasse, pour orner le chœur de son église. Archéologue par intuition en comprenant combien était précieux ces restes d’une époque ancienne, il les aura réunis et fait reconstituer là où ils pouvaient être le plus religieusement conservés. »
Que racontent les mosaïques ?
Le chasseur au cor
Une scène représente un chasseur coiffé d’un bonnet d’étoffe, muni d’un cor, couvert d’un vêtement à larges manches.
Il perce de sa lance la hure d’un sanglier, attaqué derrière la tête par un oiseau.
Sous la hure, un autre oiseau.
Regardez ce détail : sous la violence du choc, le cor du chasseur est projeté en avant !
Les fauves
Un fauve terrasse un bouc et lui mord le cou.
Derrière le bouc, un autre fauve lève la patte droite, pour se saisir de cette proie.
Au-dessus et dessous, des oiseaux… des corbeaux, des rapaces, attirés par l'herbivore mis à mort ?
Le maure unijambiste
Ah ! Voilà ce fameux Maure ! Un chasseur, dont la jambe droite, repliée, s’appuie sur un genre de pilon de bois.
Tête nue, cheveux longs plaqués en arrière, rasés sur le dessus, il tend son arc pour jeter une flèche. Son cor pend par une courroie, dans son dos.
Il n’est finalement pas très étrange de trouver ce Maure, dans l’église : l’évêque de Lescar Gui de Lons est « un grand croisé de la Reconquista espagnole. »
Ce Maure serait justement un « rescapé de la Reconquista », fait prisonnier en 1118 lors de la prise de Saragosse : or, Gui de Lons s’y trouvait avec le vicomte de Béarn et le roi d'Aragon...
On voit aussi un mulet et une bête sauvage, une sorte de loup, à moins que ce ne soit un chien, attaché par le cou à la queue du quadrupède : la langue pendante, il semble refuser d’avancer !
À noter l’inscription mystérieuse AVFIO, au-dessus de la bête qui suit l’âne…
Sources
- M. Lanore. La cathédrale de Lescar. In Bulletin Monumental (tome 68, année 1904).
- Yves Lefèvre. La mosaïque de la cathédrale de Lescar et la littérature médiévale. In Bulletin de la Société nationale des Antiquaires de France. 1980.
- Bernard Duhourcau. Guide des Pyrénées mystérieuses. Éditions Tchou, 2001.