L'origine de La Chapelle
L'histoire commence au 11e siècle, lorsque Gilon de Sully fait construire un donjon carré de 5 étages.
Au rez-de-chaussée de cette tour se trouvait le « Trésor », là où les seigneurs frappaient la monnaie.
Il s'agit de la tour la plus ancienne du département du Cher !
Boisbelle, Monaco du Berry
Au siècle suivant, les Sully créent la principauté de Boisbelle, dont le seigneur dira en 1442 tenir « ses terres et seigneuries que de Dieu et de son épée » !
Connaissez-vous cet étonnant petit état de Boisbelle ?
La Chapelle-d'Angillon était autrefois une terre minuscule et Boisbelle une principauté à elle toute seule, comme peuvent l'être Monaco ou Andorre.
Elle se maintient jusqu’au milieu du 18e siècle.
Les seigneurs y faisaient même battre la monnaie et les habitants ne payaient pas d'impôts, pas de gabelle, rien !
Privilèges confirmés par Henri IV en 1598, par Louis XIII en 1635 et Louis XIV en 1664...
Les Sully... un lapin
Revenons à nos moutons, les Sully. C'est au château que naît Eudes de Sully, vous savez ?
Le célèbre évêque de Paris qui fait construire la cathédrale de Bourges (18) et achever celle de Paris.
Au 15e siècle, Marie la dernière des Sully se marie avec Charles d'Albret, et lui apporte le château.
Ce sont eux qui font remanier la vieille forteresse médiévale en un logis en briques égayé par des fenêtres à meneaux.
Ils font aussi aménager la salle des gardes et une chapelle au rez-de-chaussée, plus des appartements à l'étage.
Ce sont encore eux qui font sculpter, sous une fenêtre, deux moines avec des oreilles de lapin, tirant la langue, la robe largement ouverte !
On peut être grand seigneur et avoir de l'humour, non ?
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Le roman de la princesse allemande
En 1504, Marie II d'Albret, duchesse de Nevers, apporte le château à son mari Charles duc de Clèves.
Ils font construire la galerie à arcades, à droite de la cour.
En 1528, leur fils François de Clèves épouse Marguerite de Bourbon, la tante du futur Henri IV.
Le fils de ces deux-là, Jacques, se marie avec Diane de La Marck.
Les Clèves, grande famille originaire d'Allemagne, comptent parmi leur membre Anne de Clèves, épouse du roi anglais Henri VIII.
Mme de La Fayette s'inspire de Diane de La Marck pour écrire sa Princesse de Clèves en 1678, roman qui évoque largement le château berrichon !
Le Grand Sully à la Chapelle
Les Clèves vendent le château 56 000 livres en 1605 à un certain Maximilien de Béthune. Le grand ministre Sully d’Henri IV !
De son château, Sully peut surveiller le bon déroulé de son projet : la création d'une ville parfaite nommée Henrichemont, la capitale de la principauté de Boisbelle.
Henri IV viendra donc souvent voir son ministre à La Chapelle !
Sully fait aussi aménager au château la grande terrasse et l’étang par Salomon de Brosse.
Henri IV lui écrit en 1607 :
« Mon ami, j'ai su que vous faites bâtir à La Chapelle. Comme ami des bâtisseurs et votre bon maître, je vous donne 6 000 écus pour vous aider à faire quelque chose de beau, à prendre sur les deniers extraordinaires de l'année prochaine d'où votre soin et travail me font profiter. »
Sully parle des travaux dans ses Mémoires :
« Le duc de Sully répara et augmenta le château de La Chapelle. Il l'embellit de jardins en terrasses et d'un parc de près de 230 arpents, entouré de murailles de pierres qui, quoique très solides, sont aujourd'hui ruinées par la négligence de ses successeurs. En face de la prairie est une terrasse superbe par sa longueur et son élévation, toute revêtue de pierre de taille et ayant de distance en distance des pilastres plus élevés, de pierres et de briques, qui servent tout à la fois à la solidité et à la décoration de cet ouvrage. »
Une fondation albanaise
Les descendants de Sully gardent La Chapelle jusqu'en 1766.
Puis, les terres sont rattachées à la couronne : finie, la principauté de Boisbelle !
Autres temps, autres mœurs : on n'attaque plus les châteaux avec des couleuvrines, voilà le temps des bombardements de la Seconde Guerre Mondiale...
Un diplomate rachète La Chapelle ensuite : Henri Coursier. Il le restaure pour qu'ensuite sa fille, la comtesse d'Ogny, l'ouvre au public.
On a aussi les souvenirs de la monarchie d'Albanie, liée au château car les d'Ogny sont amis proches avec le prétendant au trône, le roi Léka Ier : yatagans, costumes traditionnels... une collection unique !
Depuis 1983, le château abrite la Fondation royale albanaise.