La fontaine des Quatre-Saisons

De 1739 à 1746

La fontaineLa fontaine | ©Moonik / CC-BY-SA

La fontaine

De l'eau !

Paris, milieu du 18e siècle. Petit matin rose pâle de printemps.

Regardez ! Vous les avez vus ? Là, les porteurs de seaux qui trottent vers la fontaine des Quatre-Saisons, pour chercher un peu du précieux liquide.

Hé oui : à l'époque, point de robinet avec eau courante dans le petit confort de sa salle-de-bain, encore moins d'eau chaude !

Que nenni : se faire une bête toilette de chat ou boire un verre d'eau relèvent du parcours du combattant…

Alors, les fontaines, à Paris, c'est vital : on manque cruellement d'eau.

Une question de débit

Mais encore faut-il avoir du débit. Et pour celle-ci… il y a comme un os.

Oh, elle est jolie, celle qu'on connaît à l'époque sous le nom de fontaine de Grenelle. La plus monumentale et la plus belle de toute la capitale, peut-être !

Construite par Edme Bouchardon (élève du grand Guillaume Coustou, le créateur des Chevaux de Marly) entre 1739 et 1746, elle approvisionne tout le quartier en eau potable.

Voltaire critique !

Mais la fontaine ne fait pas du tout l'unanimité lors de son inauguration ! Non, elle se fait même critiquer.

Voltaire en dit à l'époque : « Beaucoup de pierres pour peu d'eau » ! On la surnomme même « trompeuse », à cause de son débit trop faible.

Petite critique de plus, Voltaire (encore lui, le râleur) a reproché d’avoir construit un trop gros machin dans une rue trop étroite, où on n'a pas le recul nécessaire pour bien la voir en entier.

Il l’écrit dans une lettre au comte de Caylus, qu’on lit dans ses Œuvres complètes :

« Je ne doute pas que Bouchardon ne fasse de cette fontaine un beau morceau d’architecture. Mais qu’est-ce qu’une fontaine adossée à un mur dans une rue, et cachée à moitié par une maison ? Qu’est-ce qu’une fontaine qui n’aura que deux robinets, où les porteurs d’eau viendront remplir leurs seaux ? »

Allégories et inscription latine

Les sculptures

Regardez : ici, la figure allégorique de Paris se tient majestueusement entre la Seine et la Marne : il s’agit de la nef, le bateau de la devise de la ville, Fluctuat nec mergitur, « il flotte mais ne coule pas » !

Sur les côtés, des bas-reliefs représentent les fameuses 4 saisons, avec des petits putti dans des situations différentes selon le temps : celui de l’hiver se gèle et fait du feu, celui de l’automne fait les vendanges...

Les statues également, représentent les génies des saisons.

Que dit l'inscription ?

Oh, ici, une inscription latine sur marbre noir !

Composée par le cardinal Fleury, précepteur du jeune Louis XV puis son principal premier ministre.

Ah oui, mais nous, le latin, ça ne nous dit pas grand-chose...

Pas de panique : Les Fontaines de Paris, anciennes et nouvelles d’Amaury Duval nous traduisent ceci :

« Sous le règne glorieux et pacifique de Louis XV, tandis que le prince, le père de ses peuples et l’objet de leur amour, assurait le repos de l’Europe ; que, sans effusion de sang, il étendait les limites de son empire, et que par son heureuse médiation, il procurait la paix à l’Allemagne à la Russie et à la Porte Ottomane, le Prévôt des marchands et les Échevins consacrèrent cette fontaine à l’utilité des citoyens et à l’embellissement de la ville. L’an de grâce 1739. »

Sources

  • Amaury Duval. Les fontaines de Paris, anciennes et nouvelles. 1828.
  • Jacques Hillairet. Connaissance du vieux Paris. Éditions Princesse, 1963.
  • Guides Bleus Paris. Hachette, 1994.