Le géant désintégré
Brr, sinistre !
L'atmosphère qui règne dans le Martelet est assez oppressante.
Sinistre à souhait ! Les plaintes des prisonniers, leurs soupirs, leurs cris de détresse, les tortures infinies...
Vous les entendez encore résonner, dans les profondeurs sinistres ?
On y trouve des cellules, auxquelles on accède en descendant un impressionnant escalier qui s'enfonce toujours de plus en plus profond dans les entrailles de la roche... jusqu'aux souterrains !
Anciennes carrières de tuffeau, en fait.
La légende du géant
Eh bien, puisqu’on en est là, les lieux se prêtent bien à cette légende, celle du gouverneur : en 1500, le gouverneur du château Pontbriant entreprend de fouiller les moindres recoins du donjon.
Il fait ouvrir toutes les portes, même celles qu'on croyait condamnées.
Il avance, progresse toujours plus profond par des souterrains et des boyaux bien sombres... jusqu'à arriver dans un cachot, lugubre, dans lequel se tient... un homme ?
Mais... oui, pas de doute ! Le sang du gouverneur ne fait qu'un tour.
Il y a un homme, un homme gigantesque, assis là la tête entre ses mains, à moins de 2 m de lui !
Mais de l'air était entré dans la petite salle, hermétiquement close depuis tant de siècles.
Alors, le corps de l'homme se désintègre sous les yeux médusés du gouverneur, ne laissant qu'un tas d'os et un petit tas de linges pliés...
On a longtemps conservé les restes dans l'église du château, parait-il.
Le cachot de Ludovico
Peintures sur pierre
Le cachot d'un V.I.P, mazette !
Celui de Ludovico Sforza, dit le Maure, duc de Milan, fait prisonnier à la bataille de Novare en Italie par le général La Trémouille, vers 1500.
Il va rester enfermé là 10 ans. D'où ces peintures sur les murs, réalisées avec ce qui lui tombait sous la main, comme du jaune d’œuf par exemple !
Il en a écrit, des choses, le Maure. On lit : « celui qui n'est pas contan » et « fortune je né pas », flanqués d'étoiles et de cordelières.
Au-dessus de la cheminée, on reconnaît le portrait de Sforza entouré de plumes, avec l’inscription :
« Je porte en prison, pour ma devise, que je m'arme de patience par force de peines que l'on me fait porter. »
On reconnaît bien le Maure, avec son nez aquilin, son menton avancé, son casque sur la tête !
On a aussi des cisailles, des « forces » peintes en bleu : rappel de son nom Sforza, Sforce en français...
Entre quatre murs
Vous imaginez la vie de Ludovico, à moisir ici pendant 10 ans ?
Le mur de son cachot fait presque 4 m d'épaisseur, une toute petite ouverture prodigue un jour bien maigre.
Impossible de savoir l'heure, de connaître le moment exact de la journée...
De quoi devenir fou ! Alors, en face de la fenêtre, il a gravé un cadran solaire.
Et en tant que prisonnier du roi, Ludovico a quand même le droit à ses latrines privées...
À la fin de sa captivité, Louis XII devient plus clément envers Ludovico, lui permettant de se dégourdir les jambes et le changeant même de cachot.
Sauf qu'à sa sortie en 1510, à peine a-t-il respiré l'air frais de la campagne lochoise, qu'il pousse son dernier soupir...
Source
- Jean-Robert Masson. Guide du Val de Loire mystérieux. Éditions Tchou, 1968.