La plaine de la Crau, des légendes mythologiques et un canal
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Des légendes
Hercule, Strabon et Cie
L’accumulation de galets sur la plaine a été expliquée par une légende : Hercule, qui allait en Espagne, tombe nez à nez avec des Ligures, au beau milieu de la plaine.
Le héros n'a plus de flèches pour les attaquer et il ne pensait pas faire de mauvaises rencontres...
Il se met à prier Zeus, qui fait pleuvoir une formidable pluie de pierres !
A tel point, que même des siècles plus tard, toute la région en est encore couverte...
Aristote, lui, disait que ces galets étaient dus à un grand tremblement de terre !
Posidonius, lui, avance l'idée qu'à cet endroit se trouvait un lac géant qui a gelé et qu'à cause des mouvements de la terre, cette glace a fini par se fragmenter et a formé de la caillasse.
Strabon, enfin, dit que ce sont des morceaux de grands rochers qui se sont désagrégés au fil des siècles...
On verra que Strabon avait presque tout bon !
Les Géants
Une autre légende, provençale celle-là (Mistral en parle dans Mireio), dit que des Géants (fils de Caïn) vivaient ici en maîtres.
Un jour, ils se mirent dans la caboche de détrôner Dieu !
Alors, pour ce faire, ils se mirent à empiler des montagnes, des collines, le mont Ventoux et la Sainte-Victoire et tout ce qui leur passèrent sous la main...
Mais Dieu s'aperçut de leur petit manège. Alors, pour les punir, il créa la Foudre, le Mistral et l'Ouragan, qui dans un fracas terrible, détruisirent tout...
Il ne resta qu'une immense plaine avec des cailloux partout... des cailloux sous lesquels nos géants mégalos étaient morts étouffés !
Et vous savez quoi ? On dit qu'ils y gisent encore, aujourd'hui...
Les galets
Bon, d'où viennent ces galets ? De la Durance, affluent du Rhône.
Mais avant d'être un affluent, elle se jetait dans la mer en passant par le pertuis de Lamanon, il y a 4 millions d'années.
Elle a accumulé des cailloux arrachés aux montagnes alpines (ah, on voit que Strabon avait raison), qui une fois qu'elle a changé son cours, se sont retrouvés à découvert... et ont créé le Crau !
Cette étendue de galets ronds porte le nom de coussoul, cursorium en latin voulant dire « parcours ».
Ce sont là qu'on met les moutons à paître de mars à mai : hé oui, on élève des ovins ici depuis l'époque gallo-romaine !
Le canal
On a construit le canal de Craponne en 1554 pour amener les eaux de la Durance à son ancien delta.
Un canal qui doit son nom à Adam de Craponne, ingénieur pisan originaire de Salon-de-Provence : il réalise ici le premier canal de dérivation des eaux vers la Crau !
Oh, déjà au milieu du XIIe siècle, le marquis de Provence Alphonse d'Aragon donnait à Raymond de Bolène, seigneur de Salon et archevêque d'Arles, « l'aqueduc et l'eau de la Durance pour la conduire depuis ce fleuve jusqu'à Salon, et de là à la mer ».
Mais l’œuvre de Craponne, c'est autre chose.
Commencé en 1550, il mesure 25 km à peine 10 ans plus tard !
Ce qu'on ne sait pas forcément, c'est que le sieur de Craponne s'est endetté pour construire le canal. Si, il a tout payé de sa poche : même qu'il a demandé des sous à une autre célébrité de Salon... Nostradamus !
Une plaine entre désert et cultures
Depuis, grâce aussi à de nombreux canaux d'irrigation, la plaine s'est transformée en une plaine cultivable !
Prairies, arbres fruitiers, culture maraîchère... on produit même du fourrage, le célèbre « foin du Crau ».
Mais ensuite, les plaines verdoyantes se transforment en un vrai désert, pelé, aride.
Un désert, oui, puisque les précipitations ne dépassent pas 500 mm d'eau par an en moyenne !
On le voit particulièrement bien le long de la N568 en quittant Saint-Martin-du-Crau, vers Fos-sur-Mer.
Source
- Jean-Paul Clébert. Guide de la Provence mystérieuse. Éditions Tchou, 1968.