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La naissance et l'enfance d'Alexandre Dumas, dans l’ombre de son père le grand général

Quand : 24 juillet 1802 - 1816

Alexandre Dumas (A. Devéria, 1831) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0
Maison Alexandre Dumas Maison natale d'Alexandre Dumas

Naissance à 5 heures du matin

Alexandre Dumas naît à Villers-Cotterêts, le 24 juillet 1802. Le petit est rudement matinal, il est 5 heures du matin !

Sa marraine, c’est sa sœur aînée, Aimée Alexandrine, 9 ans. Son parrain, il s’agit du célèbre futur maréchal d’Empire, Guillaume Brune !

Le paternel d’Alexandre, Thomas Dumas, annonce lui-même la nouvelle à son ami Brune :

« Je t’annonce avec joie que ma femme est accouchée hier matin d’un gros garçon, qui pèse 9 livres et qui a 18 pouces de long. Tu vois que s’il continue de grandir à l’extérieur comme à l’intérieur, il promet d’atteindre une assez belle taille. Ah, tu sauras une chose, c’est que je compte sur toi pour être parrain. [...] P.S. Je rouvre ma lettre pour te dire que le gaillard vient de pisser par-dessus sa tête. C’est de bon augure, hein ? »
La maison natale

La maison natale d'A. Dumas | ©Chatsam / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

Le père d'Alexandre Dumas, le grand général

Le futur écrivain est picard du côté de sa mère, d’origines normande et haïtienne par son père, le grand général Thomas Dumas.

Qui est un héros de romans à lui tout seul !

Moitié normand, moitié haïtien

Il s'appelle Thomas Alexandre.

Né esclave à Saint-Domingue (Haïti) en 1762, d'un père noble normand, le sieur Davy de La Pailleterie, et d'une esclave noire, Marie Cécette Dumas.

Un paternel qui, un beau jour, décide d’aller réclamer un héritage en Normandie. N’ayant pas d'argent pour le voyage... il vend ses quatre enfants, tous esclaves !

Mais le contrat de vente précise qu’il pourra racheter son fils préféré, Thomas Alexandre dit Rétoré.

Thomas Dumas (1798)

Thomas Dumas (1798) | ©Rijksmuseum / CC0

Un doux Hercule !

Revenu en France, son paternel lui donne l'éducation d'un fils de bonne famille.

Thomas fréquente les salons mondains, court les bals où sa haute taille, sa « structure herculéenne » (dixit son fils) ne laissent personne indifférent.

« C'était l'un des plus beaux hommes qu'on puisse voir : sa physionomie intéressante est accompagnée d'un air doux et gracieux », écrit un anonyme en 1797 !

Couper les ponts

Thomas coupe les ponts avec son père, après une dispute, puis s’engage dans le régiment des dragons de la Reine, en 1786.

Il s’inscrit sous le nom « d'Alexandre Dumas, fils d'Antoine et de Cécette Dumas », abandonnant les noms de « Rétoré », « Davy de la Pailleterie » ou « Davy-Dumas », pris successivement jusque là.

Un adieu définitif à son paternel !

La maison natale

La maison natale d'A. Dumas | ©Chatsam / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

Thomas Dumas rencontre la future mère d'Alexandre à Villers-Cotterêts

On envoie le régiment de Thomas à Laon, puis à Villers-Cotterêts.

Faute de caserne sur place, on loge les soldats chez l’habitant : pour Dumas, ce sera l'auberge de son futur beau-père, Claude Labouret, issu de la petite bourgeoisie du négoce, originaire de Villers-Cotterêts.

Coup de foudre, entre la fille du tenancier, Marie Louise Élisabeth Labouret, et Thomas !

Ils se fiancent en 1789. Le mariage (à la mairie) n’a lieu qu’en 1792 : il a 30 ans, elle 23.

Il faut dire que le beau-père Labouret exigeait que son gendre obtienne le grade de brigadier, avant de lui donner sa fille !

Le Diable noir au combat

1792. La carrière militaire de Dumas, fulgurante, commence !

Sa « force gigantesque » fait merveille, sur les champs de bataille de la Révolution.

Il devient lieutenant colonel au sein de la Légion noire : des troupes composées de milliers d’hommes de couleur.

Avant de devenir le premier général d’origine antillaise, au sein de l’armée française !

Dumas combat en 1792 contre les Autrichiens : il leur inspire le surnom de Diable noir !

En 1796, Thomas rejoint le général Bonaparte dans l’armée d’Italie, puis le suit dans sa campagne d’Égypte : le Corse lui donne le commandement de la cavalerie.

Les choses… allaient se gâter.

Le général Bonaparte (Dutertre, 1798)

Le général Bonaparte (Dutertre, 1798) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

Dumas face à la colère de Bonaparte

Thomas s’était disputé avec le futur empereur, dès les premiers jours en Égypte.

Le général Dumas critique ouvertement les ambitions personnelles de Bonaparte, au détriment des intérêts de la France, sa « dictature », qu’il n’admet pas.

Bonaparte lui donne sèchement son congé : à partir de ce moment, il ne sera plus que pour lui « le nègre Dumas. »

C’est pendant le voyage retour vers la France, que Dumas est fait prisonnier par les Italiens.

2 ans de détention dans des conditions terribles, le laissant, à sa libération en 1800, estropié, boiteux, à moitié sourd et aveugle, couvant un ulcère à l’estomac qui devait le tuer en 1806, à l’âge de 43 ans.

Courage héroïque de Dumas (18e s)

Courage héroïque de Dumas (18e s) | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

La disgrâce du général Dumas

En 1802, quand Dumas demande à reprendre du service, Bonaparte vient de rétablir l'esclavage dans les colonies, pourtant aboli à la Révolution.

Saint-Domingue s'est rebellée : Bonaparte ne trouve rien de mieux que d'envoyer Dumas, afin de mater la révolte.

Réponse de l’intéressé : « Je suis d’origine nègre. Je n'irai pas apporter la chaîne et le déshonneur à ma terre natale et à des hommes de ma race. »

C'est la disgrâce définitive, et la mise à la retraite anticipée !

Diminué, Thomas vit à Villers-Cotterêts auprès de son épouse et ses deux enfants de sa petite pension et ses économies.

Bonaparte refusera jusqu’au bout de lui verser ses indemnités de licenciement, ainsi que l'arriéré de sa solde.

Alexandre Dumas (19e s)

Alexandre Dumas (19e s) | ©Rijksmuseum / CC0

« Tuer le bon Dieu qui a tué papa »

Le petit Alexandre a 4 ans, à peine, en 1806, lorsque son père, le grand général Dumas, usé et éclopé, pousse son dernier soupir, à Villers-Cotterêts.

Sa mère lui apprend la nouvelle.

― Mon papa est mort ? Qu'est-ce que cela veut dire ?

― Cela veut dire que tu ne le verras plus. Le bon Dieu l'a pris.

Alexandre prend un fusil et grimpe au grenier.

― Où vas-tu ?

― Au ciel, tuer le bon Dieu qui a tué papa.

― Oh, ne dis pas ces choses-là, mon enfant, nous sommes bien assez malheureux !

Un peu de gêne

À compter de ce jour, la veuve de Thomas Dumas va avoir du mal à subvenir aux besoins de la famille.

On n’était pas dans une misère noire, car on pouvait compter sur la famille et les économies du défunt, mais on vivait dans une certaine gêne, tout de même.

La mère et les deux enfants doivent quitter la maison natale d’Alexandre, pour un petit logis voisin, avant qu'elle puisse ouvrir un bureau de tabac et s'installer place de la Fontaine, à Villers.

Alexandre Dumas (19e s)

Alexandre Dumas (19e s) | ©Paris Musées - Musée de la Vie romantique / CC0

Le départ pour Paris

Alexandre Dumas quitte Villers-Cotterêts et sa famille pour Paris, en 1816, après de modestes études auprès de l’abbé de Villers-Cotterêts : il a 14 ans.

Un proche de la famille l’a engagé dans son étude de notaire, en tant que coursier.

Jamais Dumas n’oubliera son Villers-Cotterêts natal, qu’il décrira plus tard avec émotion dans ses Mémoires :

« Il n’y a que les hommes qui sont nés dans un village ou une petite ville qui puissent se vanter d’avoir un pays. Dieu qui a été si bon pour moi a voulu être prodigue jusqu’au bout. Il m’a choisi, comme aux oiseaux créés pour chanter ses louanges, un nid dans la verdure et dans la mousse, sous les hauts et frais ombrages de la plus belle forêt de France. »

Sources

  • Claude Schopp. Alexandre Dumas. Éditions Alexandrines, 2012.
  • Alain Decaux. Dictionnaire amoureux de Alexandre Dumas. Plon, 2010.
  • Claude Schopp. Les Dumas : bâtards magnifiques. La Librairie Vuibert, 2018.
  • Sylvain Ledda. Alexandre Dumas. Folio Biographies, 2014.
  • André Maurel. Les trois Dumas : le général Dumas, Alexandre Dumas père, Alexandre Dumas fils. 1896.
  • Charles Grivel. Alexandre Dumas, l’homme 100 têtes. Septentrion, 2020.
  • Henri Troyat. Alexandre Dumas : le cinquième mousquetaire. Grasset, 2005.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !