Couëron, et plus particulièrement le manoir de La Gerbetière, est la patrie du naturaliste, aventurier, peintre d’oiseaux et de mammifères John James (Jean-Jacques) Audubon, très célèbre aux États-Unis, trop peu en France !
Il a vécu dans ce manoir du 18e siècle jusqu’à ses 20 ans.
D'Haïti au Couëron
Audubon naît à Haïti en 1785, d’un père capitaine breton et protestant et d’une mère de Loire-Atlantique.
Il est élevé par sa belle-mère dans la région de Nantes, à La Gerbetière : un domaine du 17e siècle acheté par son père, en 1781.
Il en dira plus tard (citation vue sur le site officiel de la commune de Couëron) :
« La belle propriété de mon père était située en vue de la Loire... Je la trouvais délicieuse... Tout ce qui en faisait partie me semblait d'une classe supérieure. [...] Je suis profondément attaché à la France et j’attends avec impatience le jour où je vais entrer dans mon vieux jardin sur les bords de Loire, et d'un pas vif rejoindre ma mère. »
Dans les marais
Le jeune homme va très tôt se promener dans les marais voisins, renommés depuis marais Audubon, en son honneur.
« C'est à peu près à cette époque que je me lançais dans une série de dessins des oiseaux de France, que je poursuivis jusqu'à en réunir plus de deux cents. » (Citation vue sur le site officiel de la commune de Couëron)
Il décrit son enfance passée dans ces lieux, où déjà, sa curiosité pointe le bout de son nez :
« Avant d'avoir des amis, les objets de la nature matérielle frappèrent mon attention et émurent mon cœur. Avant de comprendre les rapports de l'homme avec son semblable, je connus, je sentis les rapports de l'homme avec la nature. On me montrait la fleur, l'arbre, le gazon, et non seulement je m'en amusais comme le font les autres enfants, mais je m'attachais à eux ; ils devenaient mes camarades. Mon père m'accompagnait souvent ; il aimait à me procurer des fleurs et des oiseaux ; il me faisait admirer leurs formes, leurs couleurs, leur beauté. Mon excellent précepteur me parlait de leurs habitudes, de leurs mœurs, me faisait admirer la variété de leur aspect, selon les saisons ; il m'encourageait ainsi, non seulement à les étudier, mais à admirer en elles l'œuvre du Créateur. »
Un pied en Amérique
En 1803, Audubon a 18 ans. Il s’embarque pour l’Amérique. Pour éviter la conscription sous l’Empire !
Son père lui achète une plantation, en Louisiane. Mais le naturaliste n’est pas doué pour le business…
En plus, il était tombé gravement malade lors de la traversée de l’Atlantique.
Il est débarqué chez des quakers, qui le soignent et lui apprennent l’anglais.
Une grande première !
À Philadelphie, Audubon commence à étudier l’histoire naturelle et entreprend la première opération de baguage de tout le pays, en attachant à la patte d’un oiseau un fil d’argent : il note que les oiseaux reviennent nicher aux mêmes endroits.
Il commence à les dessiner.
Pour vivre, il peint des portraits tandis que son épouse, Lucy, devient préceptrice.
L'anecdote...
De retour d’un séjour dans le Kentucky en 1812, Audubon s’aperçoit qu’une famille de rats a élu domicile dans sa malle contenant une centaine de ses dessins : ils les ont rongés et mis en petits morceaux…
Sa raison vacille : il tombe malade de la fièvre pendant plusieurs semaines !
Une anecdote qui a traversé le Pacifique jusqu’au Japon, où un artiste anonyme du 19e siècle a immortalisé la scène sur une estampe, regardez :
Du Nord au Sud
À partir de 1810, Audubon se met à descendre le Mississippi avec sa boîte de peinture, dans le but de peindre tous les oiseaux d’Amérique du Nord.
Une vie de chasseur, solitaire, errante.
Dans les sombres forêts du Nord, les zones désertiques, les bayous émeraude de Louisiane...
Il descend l’Ohio et le Mississippi, allant jusqu’en Floride, au Texas et même jusqu’au Labrador, côtoyant les Indiens Osages, dont il apprend la langue en chassant le gibier...
Du fil de fer...
La force des aquarelles d’Audubon ? Représenter pour la première fois des oiseaux vivants, et non empaillés sur un socle.
Bien que les oiseaux qu’il représente soient vivants, il doit d’abord les tuer avec du tout petit plomb, pour ne pas les abimer, et leur mettre du fil de fer, pour leur faire prendre des poses naturelles.
Un best seller
Son livre Birds of America, imprimé à Londres en 1827, comprend 435 planches en couleurs, représentant 1065 aquarelles et 489 espèces.
Les oiseaux sont dessinés grandeur nature.
En 2010, un exemplaire a été adjugé pour la somme de 7,3 millions de livres (8,5 millions d’euros), lors d’une vente aux enchères de la maison anglaise Sotheby’s !
Une publication réalisée en Angleterre, car il n’arrive pas à le faire en Amérique.
C'est un large succès en Europe. Alors qu’aujourd’hui, c’est l’inverse, succès aux États-Unis et oubli total en Europe !
Hommage aux quadrupèdes
À la fin de sa vie, Audubon se consacre aux quadrupèdes américains, partant de New-York en 1843 avec ses deux fils, explorant les coins les plus reculés des États-Unis.
En 1846, il publie Quadrupeds of America, cinq ans avant sa mort.
Audubon, devenu John James après sa naturalisation américaine, s’éteint le 27 janvier 1851 à Minnie’s Land, sa propriété aujourd’hui disparue dans les environs de New-York, au bord de l’Hudson.
Conclusion
Aux États-Unis, sept villes portent son nom et quatre des maisons qu’il a habitées sont des musées.
En France, c’est un grand inconnu, dont il nous reste pourtant ce beau petit manoir.
Pour revenir aux sources du grand Jean-Jacques Audubon !
Sources
- Lucy Green Bakewell Audubon. The life of John James Audubon, the naturalist. 1875.
- Grand dictionnaire universel du 19e siècle (A-AZ). 1865.
- Paul Antoine Gratacap. Audubon, naturaliste américain : étude biographique.1862.