Gaston d'Orléans exilé au château de Blois : ses jardins extraordinaires, son chantier laborieux

De 1634 à 1660

Aile G. d'OrléansAile G. d'Orléans | ©MFSG / CC-BY-SA

Pour résumer...

En exil au château de Blois, dès 1634, pour avoir fomenté complot sur complot contre son frère Louis XIII, Gaston d’Orléans, 26 ans, fait appel au célèbre François Mansart, pour y construire une aile de pur style classique.

Le prince rebelle y tient une cour magnifique, réunissant les meilleurs artistes, constituant d’extraordinaires collections d’œuvres d'arts (vélins, livres rares, médailles).

Sans oublier son fabuleux jardin botanique, aussi réputé que le jardin des Plantes de Paris, célèbre dans toute l’Europe !

Aile Gaston d'Orléans : détailAile Gaston d'Orléans : détail | ©Xorge / Flickr / CC-BY-SA

Gaston d'Orléans, en deux mots !

  • Né à Fontainebleau en 1608, il est le 3e fils d'Henri IV et de Marie de Médicis. Le frère benjamin de Louis XIII !
  • Il tient son prénom de Gaston de Foix, l'ancêtre de son père Henri IV.
  • « Un beau prince, né pour les plaisirs, qui avait l’esprit agréable, savait mille choses et parlait le mieux du monde en public », écrit Bussy-Rabutin à propos de Gaston.
  • Jusqu’à la naissance du futur Louis XIV, en 1638, son neveu, Gaston est l’héritier présomptif du trône !
  • Quand on pense à Gaston d’Orléans, on imagine un rebelle complotant contre son frère Louis XIII et le cardinal de Richelieu, puis contre sa belle-sœur Anne d'Autriche et le cardinal Mazarin ! Conspirations qui échouent à chaque fois... Gaston écope d’un exil au château de Blois.
  • Après les complots, vient la Fronde, révolte des nobles contre le jeune Louis XIV, à laquelle il participe. De retour au pouvoir, Louis XIV l’exile une nouvelle fois, en 1652.
  • Gaston est le père de la célèbre et rebelle Anne-Marie-Louise d'Orléans, plus connue sous son nom de Grande Mademoiselle.
Gaston d'Orléans (d'après A. van Dyck)Gaston d'Orléans (d'après A. van Dyck) | ©Rijksmuseum / CC0

Gaston d'Orléans en exil à Blois

Blois, donc, accueille en exil Gaston d’Orléans, dès 1634, après des années à comploter contre Richelieu et Louis XIII.

Le château devient le centre d’une intense vie culturelle, au milieu de ses fabuleuses collections.

Pourquoi Blois ? Il en avait reçu l’apanage, grâce à son mariage avec Mlle de Montpensier.

C’est son second mariage avec Marguerite de Lorraine, qui le brouille définitivement avec la famille royale (alliance avec une famille ennemie), et lui vaut d’être mis à l’écart.

Aile Gaston d'OrléansAile Gaston d'Orléans | ©Zairon / WIkimedia Commons / CC-BY-SA

Gaston d’Orléans et le chantier (laborieux) du château de Blois

Gaston arrive à Blois, à la fin de l’année 1634. « On lui avait mis en tête d’abattre le château et d’en faire un tout neuf », écrit son secrétaire Nicolas Goulas.

L’architecte alors bien en vue à la cour (surtout pour Richelieu) s’appelle Lemercier : on lui doit le Palais-Royal, la chapelle de la Sorbonne.

Mais que nenni, pour Gaston le rebelle ! Qui fait donc appel… à François Mansart, qui venait de faire construire le couvent parisien de la Visitation, dans le Marais.

Le chantier blésien commence en 1635 : les travaux avancent très rapidement. Au début ! Fin 1638, les entrepreneurs quittent brusquement le chantier : on leur doit des sommes astronomiques, les crédits s’accumulent !

Alors les toits manquent un peu partout, idem pour des pans entiers de planchers, les échafaudages n’ont pas été démontés…

La nouvelle aile est inhabitable, et le restera du vivant de Gaston, le forçant à vivre dans la vieille aile François Ier.

Escalier de l'aile Gaston d'OrléansEscalier de l'aile Gaston d'Orléans | ©Shadowgate / Flickr / CC-BY

Les incroyables jardins du château

Sur des terrains attenants au château, à l’emplacement des jardins de Louis XII, Gaston fait aménager un fabuleux jardin botanique.

Son idée ? En créer un à l'image de celui de Paris, fondé 10 ans plus tôt !

Des espèces du Centre de la France côtoient des essences rares, exotiques :

  • prune de la Reine Claude et « prune de Monsieur » ;
  • pomme de terre, tabac, tomate, coton, piment, aloès, pistache, 7 espèces de poivre ;
  • céréales (seigle, riz, millet) ;
  • plantes potagères (melon, citrouille, laitue romaine) ;
  • plantes médicinales, que Gaston faisait distribuer aux malades de la ville.

Bientôt, le succès du jardin de Blois dépasse celui de Paris !

Antoine de Jussieu raconte que l'on était obligé « pour exciter le zèle des directeurs du jardin de Paris, de leur proposer comme exemple l'état de prospérité du jardin de Gaston » !

Jardins actuels du château de BloisJardins actuels du château de Blois | ©Chabe01 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

1732 variétés de plantes !

En 1636, Gaston nomme son médecin et botaniste Abel Brunyer au poste de jardinier-en-chef des jardins de Blois.

En 1653, Brunyer publie le premier recueil compilant toutes les plantes cultivées dans ces jardin, le Hortus regius Blesensis : on y compte pas moins de 1732 variétés !

Mais malgré le nombre incroyable de plantes présentes, cela « parut peu aux yeux de son Altesse royale », écrit Brunyer.

Gaston envoie donc d'autres botanistes collecter de nouvelles espèces, à l'étranger.

Abel Brunyer (M. Lasne, 17e s)Abel Brunyer (M. Lasne, 17e s) | ©Rijksmuseum / CC0

Les vélins du Muséum

En 1635, Gaston d’Orléans fait venir de Langres un peintre naturaliste, Nicolas Robert, qu'il charge d'immortaliser ses collections.

C'est à Blois que voient le jour les Vélins du Muséum, comme on les appelle aujourd’hui.

Une incroyable collection de 7000 magnifiques peintures sur vélins, représentant les plantes et les animaux des jardins de Gaston.

Ils sont conservés au Muséum d’histoire naturelle de Paris.

Deux vélins de Nicolas RobertDeux vélins de Nicolas Robert | ©Plaqueminier / WIkimedia Commons / CC-BY-SA

Un Écossais deuxième jardinier-en-chef

Gaston fait bientôt appel, pour seconder le jardinier-en-chef Brunyer, à l’Écossais Robert Morison.

Né à Aberdeen en 1620, ce médecin et botaniste débarque en France après avoir été grièvement blessé à la tête, pendant la première Révolution anglaise.

Vespasien Robin, l'introducteur du faux acacia en France, le présente à Gaston d'Orléans. Le prince l'associe à Brunyer, pour diriger les jardins de Blois. Une charge que Morison occupe jusqu'à la mort de Gaston.

L’Écossais publie une édition du Hortus regius Blesensis améliorée, portant à 2492 le nombre de plantes cultivées à Blois !

Quelle est la suite ?

  • Gaston meurt au château de Blois le 2 février 1660, à l'âge de 52 ans. Il pousse son dernier souffle dans ses appartements de l’aile François Ier, au milieu d’un château resté inachevé.
  • Brunyer s’installe au palais du Luxembourg à Paris, où il a suivi la veuve de Gaston, en qualité de médecin. Il y meurt en 1665, à l’âge de 92 ans.
  • Morison, appelé par Fouquet pour entrer à son service, retourne finalement en Angleterre, pour se mettre au service du roi Charles II. Nommé premier médecin du souverain, surintendant de ses jardins, professeur royal de botanique, puis professeur à l'université d'Oxford, il meurt accidentellement en 1683.
  • Le jardin botanique de Blois, lui, reste longtemps oublié, finissant par disparaître, faute d'entretien...

Sources

  • Collectif. Blois. Hors-série de Connaissances des Arts (n°39). 1993.
  • Adrien Franchet. Flore de Loir-et-Cher. 1885.
  • A. Séjourné. Les anciens jardins du château de Blois. In Le Loir-et-Cher historique et archéologique (février 1890).