Colpo, le village breton fondé par la nièce de Napoléon Ier

De 1853 à 1869

Buste de la princesse Baciocchi sur sa fontaine, ColpoBuste de la princesse Baciocchi sur sa fontaine, Colpo | ©Fab5669 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

Napoléone Élisa Baciocchi, nièce de Napoléon Ier, fonde ce village agricole modèle !

Qui est-elle ?

Napoléone Élisa, princesse Baciocchi, naît le 3 juin 1806.

Son père ? Félix Baciocchi, prince de Lucques et général d’Empire d’origine corse.

Sa mère ? Élisa Bonaparte... l'une des sœurs de Napoléon Ier !

La petite princesse Napoléone est aussi cousine germaine de Napoléon III.

Son caractère solide, presque masculin, elle le tient sûrement d’une tradition familiale : son oncle, le célèbre empereur, choisissait les prénoms de ses neveux.

Tous écopaient du patronyme de Napoléone !

Elisa Baciocchi et sa fille Elisa Napoléone (Pietro Nocchi, 1809)Elisa Baciocchi et sa fille Elisa Napoléone (Pietro Nocchi, 1809) | Élisa Baciocchi et sa fille Élisa Napoléone (Pietro Nocchi, 1809) | ©Sailko / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

Élisa et la Bretagne

C’est un drame qui l’amène en Bretagne. Le suicide de son fils unique, à cause d’un chagrin amoureux, en 1853.

Alors qu’elle vit en Île-de-France non loin de la cour de son cousin, Élisa pose ses lourdes valises en Bretagne, dans le Morbihan, pour ne plus jamais en repartir.

Mais pourquoi la Bretagne ?

Tout commence quand elle se lie d’amitié avec la veuve d’un général originaire de Pontivy (alors Napoléonville), Mme de Lourmel.

Grâce à elle, elle rencontre le couple Rosnyvinen de Piré, qui vit à Rennes à l’hôtel de Chateaugiron.

Elle fait alors la connaissance du conseiller général du canton de Grand-Champ, dans le Morbihan.

La découverte de ce département loin de tout, inculte et miséreux, la secoue profondément...

Elisa Baciocchi par DisdériElisa Baciocchi par Disdéri | Élisa Baciocchi par Disdéri | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

Landes incultes et bicoques lugubres !

Le Morbihan. L'un des départements les plus pauvres de Bretagne, alors.

Les vents d’ouest qui amènent un climat plein de brumes et d’humidité, des landes noyées par la bruyère, et près des rares maisons, des vaches « chétives » et des moutons « abâtardis », décrit un rapport d'époque.

Lugubre !

C’est pourtant là que la princesse a posé ses valises.

Elle a vu ces terres pour la première fois lors d’un voyage en 1857.

Colpo n'existe pas encore. L'endroit s'appelle encore Korn-er-Houët (« le coin du bois »), à une vingtaine de kilomètres de Vannes, au cœur des landes de Lanvaux.

Ce n’est alors qu’un hameau misérable où se battent en duel quelques bicoques où s'entassent « 80 familles de bohémiens. »

La commune de Grand-Champ, propriétaire de la terre, leur accorde une indemnité, moyennant leur départ.

La princesse peut alors acheter les 245 hectares.

Elisa Baciocchi par DisdériElisa Baciocchi par Disdéri | Élisa Baciocchi par Disdéri | ©Paris Musées - Musée Carnavalet / CC0

La naissance de Colpo

C’était un vrai désert ! Il faut tout faire.

Alors, on se met à l’œuvre : on défriche, des prairies voient le jour, les marécages sont drainés, des étables construites et une forêt plantée.

La princesse fait construire son propre chalet, avec des matériaux venus de la capitale. Mais assez pensé à elle ! Aux autres, maintenant.

Viennent alors ensuite la mairie, l'église et son presbytère, l'école, un hôpital et même une belle allée de tilleuls qui fait office d’allée principale.

En bref, une petite cité modèle ! Colpo devient ville officielle en 1864.

« Ma venue en Bretagne n’a eu qu’un seul but : rendre à la culture des terres stériles, et augmenter ainsi le bien-être des populations rurales, trop oubliées jusqu’à présent », écrira Élisa.

Elle assure un meilleur salaire aux ouvriers, de quoi vivre pour les plus âgés, apporte un soutien aux malades et aux plus faibles.

Mairie de Colpo, de style second EmpireMairie de Colpo, de style second Empire | ©Fab5669 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

Élisa l’agronome passionnée

Son domaine de Korn-er-Houët est une ferme-modèle révolutionnaire.

De nouvelles techniques y voient le jour ou sont expérimentées. Tout pour le progrès de l’agriculture et de l’élevage !

On sème seigle, sarrasin, rutabagas, navets ou encore topinambours.

La fromagerie produit du « fromage de Gooda », gérée par une personne venue exprès de la ferme impériale de Vincennes !

La princesse est à l’origine des premiers parcs à huîtres de la rivière d’Auray, nous dit le Guide Gallimard du Morbihan...

Ce n’est pas un coup d’essai : dans son domaine du Vivier, près de Melun, Élisa avait appris la pisciculture et l’élevage.

Elle reçoit même la médaille d’argent à l’exposition Universelle de 1855, pour une vache pie noire !

Sa mort à Colpo

Élisa Baciocchi meurt au château de Korn-Er-Houët, le 3 février 1869, à l’âge de 63 ans, après s’être fracturée le fémur à la suite d’une chute de cheval.

Plus de 15 000 personnes assistent aux funérailles de celle que l'on peut appeler la « bonne dame de Colpo. »

Sa tombe

N’hésitez pas à aller faire un tour du côté de l’église Notre-Dame de Colpo !

On y voit le tombeau en granit gris de la princesse, flanqué de l’aigle impérial et des abeilles.

Il a la forme... du mausolée de Napoléon Ier aux Invalides !

Prenez aussi le temps de passer voir la fontaine surmontée du buste de la princesse, dans le centre-ville.

Sources

  • Journal de l’agriculture (année 1866, tome 1).
  • Annales de l’Agriculture française (5e série, tome 35). 1870.
  • Jean-Étienne Picaut. Son Altesse la princesse Napoléon Baciocchi (PDF en ligne sur le site de la Société d'Archéologie et d'Histoire du Pays de Lorient).