Coup de foudre !
Les Sabran forment une puissante famille provençale originaire du Languedoc.
Le premier Sabran mentionné se trouve être Raimon, qui se marie avec la fille de Guillaume IV comte de Forcalquier : Garsende.
Plus tard, Hermengaud de Sabran et sa femme Laudune d'Aube de Roquemartine ont un fils, Elzéar.
Celui-ci naît en 1285 au château de Robians, non loin d'Ansouis. Son oncle Guillaume de Sabran, abbé à Saint-Victor de Marseille, l'élève.
On marie le jeune Elzéar avec la non moins jeune Delphine de Signes.
C'est le coup de foudre ! Mais la belle lui demande de faire avec elle vœu de chasteté...
Des saints absolus
Chose faite, ils vivent presque 7 ans à Ansouis. Ici, Elzéar établit un règlement pour les gens du château, afin que tout le monde respecte la prière et le travail de chacun.
Là, dans la « chambre des saints », les deux amoureux passent leur journée et leur nuit à prier ou à laver et peigner leurs cheveux qu'ils ont... fort longs.
Pas très catholiques ! se disent les parents d'Elzéar. Il vaudrait mieux qu'ils se consacrent à fabriquer un héritier !
Alors, ils postent des servantes un peu partout à l'extérieur de la chambre, à épier leurs moindres faits et gestes.
Mais que diable font-ils de leur vie conjugale ?! Ils prient, voilà tout ! Toute la sainte journée...
Ça me suffit !
Alors les domestiques vont jusqu'à dormir au pied du lit.
Mais là encore, les deux époux trompent la surveillance en faisant semblant de ronfler, pour ensuite se lever et retourner à leurs prières...
Les plus fidèles de leurs domestiques ont toujours attesté que les deux époux sont toujours restés habillés, même au lit.
Du jamais vu ! Et quand on lui reprochait le fait de ne pas avoir d'enfant et de ne pas consommer son union, Elzéar répondait : « J'ai une épouse aimable et belle et cela me suffit ! »
Et en 1316, Elzear prononce au château son vœu de chasteté dans la petite chapelle...
Le miracle du puits
Saviez-vous que dans la cour d'Ansouis se trouve un puits, où l'on dit que Delphine a fait un miracle, celui représenté sur l'un des panneaux peints de son reliquaire ?
L'histoire veut qu'au fond de ce puits les villageois aient jeté un pillard, membre de la terrible bande des Grandes Compagnies.
Ces Compagnies regroupent des guerriers engagés pour la guerre de Cent Ans, qui en temps de paix, n'avaient pas grand chose d'autre à faire que terroriser et piller les villes où ils passent.
Un de leur chef en Provence s'appelle Arnaud de Cervole. Un prêtre défroqué !
L'homme du puits faisant partie de sa bande a sûrement été pris en flagrant-délit...
Mais la longue chute qu'il a faite lui a brisé le cou. Les gens jettent par-dessus un gros amas de pierres...
C'est sans compter la châtelaine, Delphine de Sabran : en ce beau jour de 1351, elle fait ressusciter le prisonnier...
Source
- Jean-Paul Clébert. Guide de la Provence mystérieuse. Éditions Tchou, 1968.