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Sur les pas d'Aliénor d'Aquitaine

Chapelle Ste-Radegonde, Chinon | Chinpat / CC-BY-SA
Aliénor d'Aquitaine

Aliénor d'Aquitaine ? Le destin et l’histoire hors normes d’une duchesse d’Aquitaine, reine de France et d’Angleterre...

Allez, on vous emmène à la découverte de la France d’Aliénor : châteaux, abbayes, cathédrales entre Charente-Maritime, Gironde et Poitou...  

A comme... Aliénor, tout simplement

Quoi ? : Le lieu de naissance d'Aliénor et là où se trouve la tombe de sa mère. Où ? : Abbaye de Nieul-sur-l’Autise (85) Quoi ? : La résidence d’Aliénor et des siens. Où ? : Palais des comtes de Poitiers (86)

Voilà Aliénor d’Aquitaine, fille « de ces ducs d’Aquitaine chevaliers et troubadours, licencieux, débauchés, brillants et prodigues » dit Michelet dans son Histoire de France (tome 2).

Comtesse de Poitou et duchesse d’Aquitaine, elle gouverne l’Aunis, la Saintonge, le Limousin, la Marche, l’Auvergne, le Périgord, l’Agenais... soit une bonne partie du sud-ouest actuel de la France !

Son papa le comte Guillaume de Poitou meurt alors qu’elle est encore toute petiote, la laissant seule héritière de l’immense duché.

Pas fou, il l’avait placée sous la tutelle du roi de France Louis VI le Gros (pour la protéger des convoitises de rustres seigneurs intéressés par l’Aquitaine, et il y en a).

Ledit roi, avec son tout petit domaine royal composé de l’Ile-de-France, de l’Orléanais et du Berry, fait pâle figure, à côté : il comprend bien l’intérêt d’un mariage avec son fils Louis, histoire de récupérer ces terres...

B comme... beau mariage !

Quoi ? : Le mariage de Louis VII et d'Aliénor. Où ? : Cathédrale Saint-André de Bordeaux (33)

Aliénor a 15 ans en 1137, quand elle se marie avec le futur Louis VII dans la cathédrale Saint-André de Bordeaux : Louis en prend plein les mirettes.

Sa future femme est perpulchra, disent les chroniqueurs, « incomparablement belle » ! La voilà donc, Aliénor, Alia Aenor, « l’autre Aénor » car c’est déjà le prénom de sa mère.

On n’a aucun portrait d’elle, mais ce qui ressort, c’est la blondeur auburn de ses cheveux et la beauté intense de son regard de feu.

Décalée, moderne, sujette à tous les ragots, elle sait lire et écrire, connait la musique, la poésie, les langues (elle est admirabilis astucia disent les chroniques, « d’une intelligence remarquable »).

Hé, elle a de qui tenir avec son troubadour de grand-père (le tout 1er de l’histoire), Guillaume IX d'Aquitaine ! Elle les invitera à sa cour, les troubadours, les protégera...

C’est une sacrée sportive aussi, elle adore la chasse au faucon.Tout le contraire de Louis ! Louis, surnommé le Pieux, timide, studieux et sérieux comme pas deux. D’un ennui, je ne vous raconte pas !

C comme... coquins !

Quoi ? : Après ça, Aliénor et Louis filent pour leur nuit de noces. Où ? : Château de Taillebourg (17)

C comme... couronnés ducs d'Aquitaine

Quoi ? : Vient ensuite le jour où l'on couronne Louis et Aliénor ducs d'Aquitaine. Où ? : Cathédrale Saint-Pierre de Poitiers (86)

C comme... cour parisienne

Sur quoi le petit couple débarque à Paris au palais de la Cité (actuelle Conciergerie) : tout semble si froid, si moche, si sombre ! Alors, Aliénor fait ajouter cheminées et tentures, des nappes aux tables, des jonchées de fleurs fraîches au sol...

Elle révolutionne la mode, fait ouvrir les décolletés et montrer les gambettes ; et puis, on s'amuse enfin, chez les austères Capétiens ! Se succèdent les fêtes les plus brillantes du royaume...

Un vrai choc nord/sud, elle le feu de la terre d’oc, lui le calme, la froideur de la terre d’oïl ! Mince, se dit-elle : je croyais avoir épousé un homme, pas un moine !

C comme... Croisade

Été 1147. Saint Bernard de Clairvaux appelle à la deuxième croisade. Croisez-vous, qu’y disait ! Louis VII part de Paris avec 70 000 hommes, direction Jérusalem.

Aliénor et les femmes des chevaliers sont du voyage : si, si, c’est même la première fois que des femmes partent ! On voit la reine quitter la ville non pas en amazone mais à califourchon sur son cheval, galopant fièrement en tête du cortège.

Holà, attendez deux secondes : on va tenir les femmes responsables du désastre qu’a été cette croisade. Ben tiens...

Après un rude périple, sans fin, dans une chaleur étouffante, enfin : l’arrivée à Antioche en 1148. Des palais de jades, des senteurs d’épices brûlantes, des bassins d’eau vive et un luxe inouï... sous le soleil !

Tout ça auprès de l’oncle d’Aliénor, Raymond de Poitiers, qui les reçoit. Rooooh, kilébô Raymond ! Tellement séduisant, fort comme un roc, son palais est un rêve éveillé. Aliénor tombe sous son charme... enfin, ça, c’est la tradition qui le dit. On leur prête des relations intimes !

Mais c’étaient peut-être simplement deux êtres cultivés venus du même pays d’oc, tout simplement, qui se retrouvent en pays étranger ? Quoiqu’il en soit, après 10 jours de paradis, le roi, furax, fait son baluchon en pleine nuit : sa femme passe pour une gourgandine qui couche avec tout le monde, ici, et puis quoi encore ?

Il ordonne à Aliénor de le suivre. Elle ne veut pas ? Il la fait enlever ! Retour en France dans deux bateaux séparés, après qu’Aliénor ait appris que tonton Raymond est mort décapité par les Turcs...

D comme... divorce

Quoi ? : Le clash ! Le divorce de Louis VII et d'Aliénor. Où ? : Abbaye Notre-Dame de Beaugency (45)

1149. France, de retour de croisade. Ambiance houleuse. Après la naissance d’Alix en 1150, Aliénor vient se reposer dans sa belle Aquitaine, dans l’île d’Oléron.

Louis de son côté est furieux : il décide le « divorce ». La raison ? Même degré de parenté (cousins au 5e degré) entre les deux époux. Parenté mon œil ! Elle et Henri II, son deuxième mari, auront aussi ce même degré, alors...

Non, la vraie raison, c’est que Louis en a ras la couronne d’Aliénor... et vice versa. Incompatibilité d’humeur nord-sud, on vous l’avait dit ! La désunion a lieu dans l’abbaye de Beaugency.

H comme... Henri Plantagenêt

Quoi ? : Mariage d’Aliénor avec Henri. Où ? : Cathédrale de Lisieux (14) Quoi ? : L’autre résidence poitevine des Plantagenêt. Où ? : Donjon de Niort (79) Quoi ? : Le fief des Plantagenêt en Val de Loire. Où ? : Chapelle Sainte-Radegonde de Chinon (37)

1154. Quelques mois seulement après son divorce, Aliénor convole à Lisieux avec Henri Plantagenêt. Henri ? Le futur roi d’Angleterre Henri II, tiens ! Sa maman, Mathilde, petite-fille de Guillaume le Conquérant, est l’unique héritière de la couronne anglaise.

Quand elle se marie avec le comte d’Anjou Geoffroy Plantagenêt, fondateur de la célèbre dynastie, c’est pour unir Normandie et Anjou... Henri, c’est donc leur fiston, né en 1133.

Heureux homme, Henri ! Avec son mariage avec Aliénor, il gagnait l’Aquitaine et le Poitou, en plus de la Normandie, l’Anjou, le Maine et la Touraine qu’il possédait déjà.

Et notre Aliénor ? La voilà couronnée reine d’Angleterre à Westminster, en novembre 1154. Pour son plus grand malheur, va-t-elle découvrir... « Reine d’Angleterre par la rage de Dieu » comme elle le signe en bas de ses lettres.

Car Henri n’est pas facile à vivre. Ils ont 8 enfants, dont les célébrissimes Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre.

H comme... hommage

Aliénor en a fait fantasmer plus d’un, à l’époque... si si, même des moines d’une abbaye au fin fond de l’Allemagne, d’où nous vient le Carmina Burana, célèbre recueil de poèmes médiévaux (13e siècle) écrit en latin et allemand !

Pourquoi je vous en parle ? Parce qu’il comporte une strophe à l’attention d’Aliénor, Were diu werlt alle min :

 « Si tout le monde m’appartenait, des bords de la mer jusqu’au Rhin, j’y renoncerais pour tenir la reine d’Angleterre entre mes bras. »


Benoît de St-Maure lui dédie son Roman de Troie en 1160 : elle devient « la riche dame de riche rei ». L’anglo-normand Robert Wace dédie son Roman du Rou à la belle :

 « De France est Aliénor et débonnaire et sage, Reine fut de France en son premier âge, Louis l’épousa qui eut grand mariage, Le roi Henri la prit en riche mariage. »

Enfin, le Roman de Brut, saga légendaire anglaise, où l’auteur la transforme en Ygerne : « Il n’eut si belle en tout le règne ; courtoise était et belle et sage Et moult était de haut parage. »

Sans oublier bien sûr le troubadour Bernard de Ventadour qui la suit outre-Manche :

 « Dame, je suis votre chevalier et je le serai toujours, toujours à votre service. Je suis votre chevalier par serment, vous êtes ma première joie et vous serez la dernière, tant que ma vie durera. »

R comme... Rosemonde

Le royal wedding bat de l’aile. Et en toile de fond, la guerre de Cent Ans qui déchire la France, la mort de Thomas de Canterbury (par la faute d’Henri)...

Pour oublier tout ça, celui-ci se jette dans les bras de la plus belle femme d’Angleterre, la blonde Rosamonde Clifford. Elle lui donne même des fils.

Ça ne plait pas à Aliénor, bien sûr, qui se rue outre-Manche directement chez Rosemonde : un combat de blondes, ça va faire mal !

Elle la trouve dans son château conçu pour elle par Henri comme un labyrinthe (mieux valait planquer sa maitresse, il savait sa femme jalouse comme une lionne) et la transperce d’un coup de poignard.

Bon, ça, c’est la légende qui le dit, celle qui veut faire passer Aliénor pour une vilaine harpie... Car la Rosamonde en réchappe avec une bête petite coupure et mourra bien des années plus tard, remplacée par une autre donzelle dans le cœur d’Henri...

Pendant ce temps Aliénor s’était retirée dans sa bonne vieille ville de Poitiers, s’entourant de troubadours (coucou Bernard de Ventadour) et commençant à pousser son fiston Richard contre son père de concert avec le roi de France. C’est qu’elle a rempli son devoir de pondeuse de rois et ne sert plus à rien à Henri...

R comme... rôles d’Oléron

Quoi ? : Aliénor et son célèbre code maritime. Où ? : Citadelle de Château-d’Oléron (17)

S comme... sa fille Aliénor

Quoi ? : Le baptême de la fille d'Aliénor. Où ? : Eglise Notre-Dame-de-l’Eau de Domfront (61) Quoi ? : Les fêtes pour le mariage de sa fille Aliénor. Où ? : Château de Puivert (11) Aliénor junior, c'est la mère de la reine Blanche de Castille, la maman terrible du roi saint Louis. Ce qui fait de notre Aliénor d'Aquitaine l'arrière-grand-mère de Louis !

T comme... this is the end !

Quoi ? : Le dernier repos d'Aliénor. Où ? : Fontevraud (49)

1173. Henri sent que quelque chose se trame derrière son dos... sa femme, son fils tentent un truc !

Alors, il envoie ses hommes de main arrêter Aliénor. Elle l’apprend de justesse, tente de s’enfuir se réfugier chez le roi de France, déguisée en homme : elle a 50 ans mais ne les fait pas, sa grande taille élancée et athlétique la faisant passer incognito sous des vêtements grossiers...

Mais finalement on la rattrape : de Chinon, on l’envoie en prison en Angleterre, à l’abbaye de Winchester (15 ans enfermée dans ce trou). Richard la libère à la mort d’Henri, en 1189.

Fatiguée, elle s’enferme à l’abbaye de Fontevraud en Anjou, n’en sortant plus qu’une fois seulement : pour assister au mariage de sa petite-fille Blanche de Castille avec Louis VIII, en Espagne... les parents du futur saint Louis !

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !