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Petite histoire de l'abbaye de Beauport

Quand : 1184 - 1862

L'abbaye | JLPC / CC-BY-SA
Abbaye Prémontrés Abbaye de Beauport

Les débuts

Un climat terrible !

Les belles et fières ruines de l'abbaye de Beauport évoquent une histoire ancienne, celle de sa fondation à la fin du 12e siècle : Alain, comte de Tréguier et de Penthièvre, a une idée folle !

Celle de faire construire dans l'île de Guirvinil, entre 1184 et 1189, un humble monastère.

En l'honneur de ses parents... Des chanoines de Saint-Victor de Paris, régis par la règle de Saint-Augustin, viennent s'y installer.

Mais la vie est rude, sur l'îlot rocheux battu par les vents et les embruns ! Trop rude... Les moines abandonnent les lieux !

À l'abri du vent, ça va déjà mieux

Alain se retrouve donc à nouveau seul et réfléchit : il faut faire reconstruire le monastère sur la terre ferme !

À un endroit où l'eau douce abonde, grâce à une petite source d'eau claire, où la mer déborde de poissons, où le site sera protégé des vents trop violents...

Chose faite dès 1202, lorsque des religieux de la règle de saint Norbert (des Prémontrés) arrivent à Paimpol.

Ce sont eux qui construisent la nouvelle abbaye avec son cloître et ses bâtiments conventuels.

En théorie, les travaux s’achèvent en 1250... en fait, tout ne sera fini qu'en 1620 !

15 à 20 moines vivent alors à Beauport. Ils ont des bois qu'ils exploitent, des falaises pour leur servir de carrière de pierres, une source abondante d'eau potable, avec laquelle ils créent des étangs pour la pisciculture.

Au 14e siècle, on élève des digues pour se protéger de la mer, ainsi qu'une jetée pour faciliter l'arrivée des bateaux. Il faut dire que l'abbaye recevait au Moyen Âge les pèlerins venus d’Irlande et d’Écosse, sur la longue route allant à Compostelle !

En plus de ses biens, Beauport devient très puissante : elle a aussi le droit de haute et basse justice sur une douzaine de paroisses, ce jusqu'en 1650 !

Mieux, l’abbaye est placée directement sous l'autorité du pape : son abbé a le droit de porter la mitre dès le 15e siècle...

Salle au Duc

Salle au Duc | ©GO69 / CC-BY-SA

Salle capitulaire

Salle capitulaire | ©Giovanni-PSV / CC-BY-SA

L'heure de la décadence

Mais quel bazar !

Sauf qu'un siècle plus tard, voilà le début des ennuis. À cette époque, la règle se relâche et les moines ne se privent de rien.

On fait bombance, on s'amuse, on oublie même l'entretien du monastère !

Alors, quand surviennent les guerres de Religion, nos moines abandonnent les lieux, qui de toutes façons, tombent en ruine.

Un rapport de l'époque rapporte des « toits défoncés, des vitres brisées, des autels renversés »...

Un siècle plus tard, l'enceinte est partiellement détruite, la pluie entrant dans les dortoirs. Ça suffit ! Une restauration s'impose.

Le prieur Vincent Royer fait remanier les bâtiments dans le style classique, fait aménager des cellules pour les moines, restaurer l'église et refermer l'enceinte.

Néanmoins, les moines respectent de moins en moins la règle.

Excès, mœurs dissolues, décadence... l'anarchie, en un mot ! Et c'est peu de le dire, lorsqu'arrive la Révolution.

Une fois les 10 religieux restants jetés dehors, on vend l'abbaye comme bien national en 1791.

On projette de convertir l'abbaye en une fabrique de toile à voiles !

Beaucoup de bâtiments disparaissent à cette époque faute d'entretien, mais aussi la toiture, le clocher et les voûtes de l'église.

Ce qui survit à la destruction ne va pas faire long feu, vous allez le voir...

Saviez-vous qu'on décide alors de transférer l'importante bibliothèque de 2 000 volumes anciens vers Saint-Brieuc ?

Sauf que le bateau qui les transporte s'abîme en mer pendant une tempête et les livres finissent tous engloutis...

Bon, on a dit que Beauport est vendu comme bien national... mais à qui ? Au curé de Plouha !

Le bonhomme ne fait que précipiter la ruine : il démolit tout pour en récupérer les pierres, pour son église à lui !

Après la pluie, le beau temps

Vers 1845, le comte de Ponenski rachète l'abbaye. Le monsieur est un grand amateur d'archéologie.

Il réussit à préserver l'abbaye d'une ruine plus importante et permet un classement aux monuments historiques en 1862 par Mérimée en personne !

Mérimée qui en dit dans ses Notes d'un voyage dans l'ouest de la France :

« Ce coin de terre semble exceptionnel. J'y voyais avec surprise prospérer des arbres du midi de la France. Oubliant leur soleil natal, des myrtes, des mûriers, des figuiers gigantesques couvraient la plage, laissant presque tomber leurs fruits dans les flots. Que devait être Beauport, lorsque de riches oisifs l'habitaient, croyant peut-être servir Dieu en ornant leur demeure ? »

Depuis 1992, le conservatoire du Littoral gère le domaine.

Sources

  • Jules Geslin de Bourgogne. Anciens évêchés de Bretagne : diocèse de Saint-Brieuc. 1855.
  • Association des amis de l'abbaye de Beauport. Beauport : 8 siècles d'histoire en Goëlo. 2002.
  • André Legrand. Paimpol, Bréhat. Éditions Ouest-France, 1981.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !