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Sainte Marie-Madeleine : péripéties en Provence et reliques à l'odeur surprenante

Marie-Madeleine (H. Goltzius, 1585) | ©The Metropolitan Museum of Art / CC0
Basilique Relique Légende Basilique Sainte-Marie-Madeleine

L'histoire de Marie-Madeleine

De Galilée à la Provence

Tout commence avec une certaine Marie-Madeleine... Marie de Magdala, Marie la Magdaléenne.

Elle naît dans un château au bord du lac de Tibériade, en Galilée.

C'est une princesse de sang royal, mais cela ne l'empêche pas de vivre une vraie vie de débauche !

Jusqu'à ce qu'elle rencontre Jésus et entende ses sermons.

Là, révélation : finie, la vie de patachon... elle abandonne tout et le suit ! Ce n'est pas pour rien qu'on la dit l'épouse du Christ...

Après la mort de Jésus, Madeleine se regroupe avec saint Sidoine, saint Maximin, sainte Marthe et d'autres, et traversent ensemble la Méditerranée pour arriver en Provence, aux Saintes-Maries-de-la-Mer.

Madeleine décide de se détacher du groupe et de partir seule.

Marie-Madeleine pénitente d'après A. Coypel)

Marie-Madeleine pénitente d'après A. Coypel) | ©The Metropolitan Museum of Art / CC0

Une sainte pénitente dans sa grotte

Seule, sous le soleil de plomb, à marcher dans la caillasse, la poussière, des jours et des jours durant !

Au bout d'un moment à arpenter la forêt, elle trouve la grotte de la Sainte-Baume.

Humide, peu accueillante... mais cela ira : Madeleine désire juste... le rachat de ses fautes passées, faire pénitence !

La grotte sera parfaite. Et la voilà qui s'y retire pour le restant de ses jours !

Elle y passe 30 ans, seule, en prière constante, ne mangeant que des racines et buvant l'eau de pluie, le corps uniquement couvert de ses longs, très longs cheveux...

Marie-Madeleine dans sa grotte (17e s)

Marie-Madeleine dans sa grotte (17e s) | ©Rijksmuseum / CC0

Après la mort de Marie-Madeleine

Au bout de ces années de pénitence, Madeleine s'éteint.

La légende dit que son corps se fait transporter par les anges à la Sainte-Baume, pour reposer aux côtés de son ancien compagnon devenu premier évêque d'Aix-en-Provence, saint Maximin.

Leurs proches avaient construit un tout petit oratoire pour protéger leurs tombeaux.

C'est dans cet édifice que les pèlerins commencent à affluer en masse. Le pèlerinage ne se tarira pas de sitôt !

Alors, quelques siècles plus tard, des moines de l'abbaye Saint-Victor de Marseille menés par saint Cassien, qui se devaient de garder les reliques, taillent dans le roc un escalier assez rudimentaire, mais qui permettait d'accéder facilement à la grotte.

C'est cette grotte que l'on transformera en chapelle des siècles plus tard...

Grotte de Marie-Madeleine, la Sainte-Baume

Grotte de Marie-Madeleine, la Sainte-Baume | ©jean-louis Zimmermann / Flickr / CC-BY

La basilique de Saint-Maximin

Le secret des échanges de reliques

Nous sommes au 5e siècle, les pèlerins viennent toujours plus nombreux.

Mais les Sarrasins déboulent dans la région au début du 8e siècle ! Chaos. Destruction...

Ils saccagent tout sur leur passage.

Heureusement, ils ne trouvent pas les tombeaux des deux saints !

Il faut dire que les moines les avaient dissimulés sous des tonnes de sable et de terre...

Et pour encore plus de prudence, ils échangent la sépulture de saint Sidoine avec celle de Madeleine !

Comment bien brouiller les pistes...

Basilique Saint-Maximin

Basilique Saint-Maximin | ©Patrick - Morio60 / Flickr / CC-BY-SA

Provence-Bourgogne : match nul ?

Jusqu'à ce qu'au 11e siècle, une rumeur assez folle ne dise que les reliques de Marie-Madeleine se trouvent en fait... dans la basilique de Vézelay, en Bourgogne !

Les moines bourguignons n'en démordent pas : ils ont obtenu les reliques de saint Maximin en personne !

Troublé par ces doubles reliques, l'évêque d'Autun décide d’interdire le pèlerinage de Vézelay.

Décision annulée par le pape Pascal II quelques temps après...

Même si un léger doute subsiste encore, on a admis que les reliques de Madeleine se trouvent bel et bien en Provence.

Basilique Saint-Maximin : la crypte

Basilique Saint-Maximin : la crypte | ©Patrick - Morio60 / Flickr / CC-BY-SA

Des reliques... qui sentent le fenouil !

Un beau jour de 1279, pourtant, le futur comte de Provence Charles d'Anjou remet au jour le tombeau de la sainte, à Saint-Maximin en Provence !

On dit qu'en ouvrant le tombeau de Marie-Madeleine, il en sort une odeur « balsamique » et on trouve... un plant de fenouil tout vert qui avait poussé sur sa langue !

Le Guide de la Provence mystérieuse détaille :

« Lorsqu'on ouvrit le tombeau, il se répandit une suave odeur de parfums, comme si l'on eût ouvert un magasin rempli d'essences aromatiques... La langue, au milieu des ossements arides de ce corps, et malgré l'absence de l'os maxillaire inférieur, fut trouvée sans corruption, desséchée mais inhérente au palais, et il en sortait un rameau de fenouil verdoyant. »

Et au-dessus de l’œil gauche, un reste de chair... le front de Madeleine touché par Jésus, le matin de sa résurrection ?

La relique reste toute rose jusqu'en 1780, date à laquelle elle tombe et se racornit...

Du coup, d'Anjou décide de faire bâtir une basilique plus grande, sur les restes de l'église mérovingienne.

Construite par son architecte Pierre, c'est encore le plus grand bâtiment gothique de Provence, avec ses 74 m de long et 37 de large !

Puis d'Anjou fait venir des moines Dominicains pour garder les reliques : il faut leur faire construire un couvent, ce grand bâtiment en forme de fer à cheval collé à la basilique.

Avec cette redécouverte, les pèlerinages reprennent de plus belle, vous pensez !

Relique de Marie-Madeleine

Relique de Marie-Madeleine | ©Itto Ogami / Wikimedia Commons / CC-BY

Bout de mâchoire et sang mystérieux

Le clou du spectacle, la crypte !

Voilà le reliquaire de Marie-Madeleine en bronze doré du 19e siècle avec à l'intérieur... le crâne de la sainte.

On dit que son tombeau est le troisième tombeau du monde, après celui du Christ à Jérusalem et celui de saint Pierre à Rome !

Charles d'Anjou avait mis la tête de la sainte dans un reliquaire en or en forme de buste, son bras dans un autre et le reste du corps dans une châsse en argent.

Charles Ier d'Anjou, le père, envoie une couronne pour mettre sur la tête de la sainte.

Le pape Boniface VIII avait fait venir de l'église Saint-Jean-de-Latran (Italie) un bout de mâchoire pour la sainte à qui il manquait « l'os maxillaire inférieur » !

On dit que les deux parties s’emboîtèrent très bien...

En dessous du buste, une fiole contient un morceau du front de Madeleine, le fameux front qu'a touché Jésus lors de sa résurrection en disant noli me tangere, « ne me touche pas. »

Dans la grotte aussi, on voit une fiole contenant un liquide rouge : un liquide constitué de petites pierres et de terre teintées par le sang du Christ, que Madeleine a ramassé à ses pieds !

Encore au 19e siècle, on pouvait observer le vendredi saint chaque année après la lecture de la Passion, le sang passer d'un rouge sombre presque noir à une matière rouge rubis.

Le phénomène a cessé depuis...

Sources

  • Jean-Paul Clébert. Guide de la Provence mystérieuse. Éditions Tchou, 1968.
  • Abbé Maille. La Sainte Baume en Provence ou histoire de Marie-Magdeleine. 1860.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !